L'heure du verdict pour Pistorius
Oscar Pistorius est accusé d'avoir tué le 14 février 2013 sa compagne Reeva Steenkamp. Le mannequin de 29 ans a été retrouvée morte après avoir été touchée par plusieurs balles. Le seul témoin et seul survivant est le compagnon de la jeune femme. Pistorius explique ainsi avoir commis une "erreur", en pensant qu'un cambrioleur s'était introduit à son domicile et tirant sur la porte fermée de ses WC, sans voir sa victime. L'accusation réfute cette version des faits.
Star des Jeux Olympiques de Londres de 2012, Pistorius avait couru avec des valides, une performance couronnant des années de bataille juridique pour faire homologuer ses prothèses en carbone qui donna un rayonnement à tout le handisport. Le meurtre a brisé sa carrière mais n'a pas mis fin à l'intérêt des médias du monde entier qui devraient se bousculer à l'audience à partir de 09h30 (07h30 GMT) dans une effervescence qui n'aura d'égal que l'austérité des heures qui suivront.
"La juge va lire les charges, normalement en commençant par les charges mineures, puis récapituler tous les faits. C'est pour cela que cela va prendre du temps", explique à l'AFP Me Audrey Berndt, avocate française au barreau de Johannesburg. "Ce n'est pas comme dans les films américains où le jury remet un petit papier au juge. Ici, il n'y a pas de jurés, c'est la juge avec ses deux assesseurs qui décident, et ils ne peuvent pas juste donner leur opinion, j'aime ou j'aime pas Pistorius, ils doivent expliquer comment ils sont arrivés à leur décision", dit-elle.
Pristorius risque la perpétuité
La lecture du jugement s'annonce d'autant plus minutieuse que la juge Masipa, depuis le début du procès le 3 mars, s'applique à ne rien laisser au hasard, et à laisser le moins de marge de manoeuvre possible à la défense pour se pourvoir en appel. Indirectement, elle travaille à redresser l'image de la justice sud-africaine qui peine à se montrer aussi exemplaire envers la majorité des justiciables, dans un pays où les plus pauvres n'hésitent pas à se faire directement vengeance en groupe contre les auteurs de délits, lynchant pour un vol de portable ou un viol d'enfant.
Contrairement à l'ex-footballeur américain OJ Simpson, acquitté de l'assassinat de sa femme en 2005, Pistorius a peu de chance d'être totalement innocenté. "Cela me paraît difficile, estime l'avocat David Dadic. Cela créerait un précédent terrible si une personne peut être acquittée pour un tel comportement." "Le fait que Pistorius ait tiré et tué quelqu'un n'est pas en doute", souligne aussi Me Berndt. Ce que la justice doit prouver, au-delà du doute raisonnable, c'est l'intention qu'avait Pistorius au moment de tirer. "C'est là-dessus qu'ils vont décider s'il est coupable de meurtre, ou d'homicide involontaire", ajoute-t-elle. Lui-même a répété à la barre : "Je n'ai pas eu le temps de penser. J'ai entendu du bruit, j'ai pensé que quelqu'un était venu m'attaquer, donc j'ai tiré."
Une version improbable selon l'accusation qui s'appuie sur le témoignage de voisins réveillés par des cris mais qui n'ont rien vu. Le parquet souligne aussi que Pistorius a tiré quatre fois. L'arme était chargée de balles expansives. Il ne s'en séparait jamais et la plaçait sous son lit pour dormir, à l'image de sa mère décédée qui dormait avec un pistolet sous l'oreiller. L'accusation avance aussi que le jeune homme de 27 ans se disputait souvent, même en compétition, et avait tendance à se comporter comme si tout lui était permis, notamment avec les armes à feu. Deux infractions à la loi sur le port d'armes ont été jointes au dossier. Passible de la perpétuité (25 ans incompressible) s'il est jugé coupable de meurtre, Pistorius pourrait obtenir une peine plus légère voire rester en liberté sous caution en attendant d'avoir épuisé tous les recours.
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