L'étoffe des perdants magnifiques
A un coup droit du miracle. Devant son public, il n'a manqué qu'un coup à Jo-Wilfried Tsonga pour faire basculer sa rencontre contre Novak Djokovic dans la légende de Roland-Garros. Bien sûr, son match restera dans les mémoires. On se souviendra longtemps de ce face-à-face épique, au niveau de jeu inattendu. Ces quatre heures de combat où le n.1 français a fait trembler le n.1 mondial, au point d'en obtenir quatre balles de match. L'exploit était au bout de la raquette. A 10 cm près. Ceux qui ont fait rester son coup droit dans la bande au moment le plus critique pour le Serbe. Peut-être que ce quart de finale restera comme la rencontre de quinzaine, peut-être qu'il sera éclipsé par une autre joute homérique. Le niveau de jeu des cinq dernières rencontres le dira. Mais au tennis, seul le résultat compte. Tsonga a raté le coche. En perdant magnifique.
Pourtant, à entendre l'ovation du public lors de son interview au micro du court il était difficile de savoir qui de Djokovic ou de Tsonga était le vainqueur. Les 15 000 spectateurs du court Philippe Chatrier ont porté en triomphe leur chouchou. Des joueurs comme on les aime. Glorieux perdants. Telle à été la tendance de cette édition 2012. Celle de matchs joués avec les tripes. Des rencontres où le public a plus d'une fois permis à nos représentants de se surpasser. Avant de s'incliner selon la logique des choses. Avec la fierté du champion qui a tout donné contre plus fort que lui.
Sur le papier, ce quart de finale dans le tableau hommes ne masquera pas la débâcle du tennis féminin, sans représentante en huitième de finale. Le bilan global sur les deux tableaux est d'ailleurs moins bon qu'en 2011 (quart de finale de Monfils, demi-finale de Bartoli). Et pourtant. Au niveau des émotions, cette édition lui est d'ores et déjà supérieure. En ça, elle est une réussite.
Tsonga : "Je fais partie de ceux qui perdent tout le temps"
Les champions malheureux ont été légion. En début de quinzaine, Arnaud Clément, pour ses quinzièmes et derniers Internationaux de France offraient deux matchs grandioses à ses supporteurs. Deux rencontres en cinq sets et trois jours de matchs. Face à David Goffin, il a cédé sous l'ovation du public. A 34 ans, il venait de démontrer une fois de plus qu'avec du cœur, on pouvait soulever des montagnes et les foules qui vont avec.
La morale a été la même pour Paul-Henri Mathieu. A 28 ans, ce miraculé du tennis a enflammé la première semaine à la Porte d'Auteuil. Quinze sets en trois matchs et au passage un succès de prestige face à John Isner (N.11) conclu 18-16 après 5h41. Au troisième tour, c'est une nouvelle fois en cinq sets qu'il s'inclinera face à Marcel Granollers. Pour le public, peu importait. Son envie de s'accrocher devant les siens l'a emporté sur le résultat. Il avait gagné dans les cœurs. Tant pis pour la feuille de match.
Et que dire de l'élimination de Virginie Razzano ? Sa défaite face à la Néerlandaise Arantxa Rus était bien peu de chose après son succès exceptionnel face à Serena Williams (N.5) au premier tour. Dans le tableau féminin, elle est la rare éclaircie de cette édition.
L'histoire tient parfois à peu de chose. Une heure après le match, Tsonga le reconnaissait avec un brin de fatalité : "Il y a des joueurs qui gagnent tout le temps et moi je fait partie de ceux qui perdent tout le temps." Une réalité. Ce n'est pourtant pas faute d'essayer. Mais ce constat ne doit pas saper le moral des troupes. C'est à travers ces matchs, où l'on touche le Graal du bout du doigt que l'on doit puiser l'énergie de faire basculer le résultat du bon côté la fois suivante. La victoire finale, je jour où elle viendra, n'en sera que plus grandiose. Reste à savoir maintenant s'ils seront capables à l'avenir de franchir cette dernière marche. Celle qui sépare l'héroïsme d'un jour à la légende éternelle.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.