JO de Sotchi : les excuses les plus incroyables des athlètes
Justifier un échec devant les caméras du monde entier n'est pas chose facile. Mais certains athlètes font preuve de beaucoup d'imagination, de mauvaise foi, ou juste de malchance. Parfois même les trois à la fois.
Demandez à un athlète participant aux JO de Sotchi comment il explique sa contre-performance : dans 90% des cas, il assumera humblement son échec et ne se cherchera pas d'excuses. ll rendra même souvent hommage à ses adversaires - le fameux esprit olympique. Reste les 10% restants, qui vont parfois chercher loin pour trouver une excuse appropriée. Très loin même.
C'est pas ma faute, j'ai oublié de me faire opérer des yeux
C'est l'argument avancé par le skieur américain Bode Miller pour justifier sa décevante 8e place dans l'épreuve du géant. "Je devais être opéré des yeux plus tôt dans la saison, explique Miller, sacré en super-combiné à Vancouver en 2010, sur NBC (en anglais). Mais je n'ai jamais trouvé le temps de le faire, à cause du calendrier des courses, bien trop chargé. Ca m'énerve qu'on n'ait pas eu le temps de le faire, car ma vision est essentielle pour mon ski." Surtout quand les conditions de luminosité ne sont pas réunies... comme c'est le cas depuis le début de la quinzaine.
C'est pas ma faute, je suis allergique au béton
C'est l'argument avancé par le skieur norvégien Aksel Lund Svindal, pourtant parmi les favoris, pour justifier son départ en catimini du village olympique, lundi 17 février. "Il y a beaucoup d'athlètes qui ont une sorte d'allergie à quelque chose, ici, se justifie-t-il à l'agence Associated Press. Je pense que ça vient du béton dans l'air, des fines particules de poussière. Dès que je suis arrivé, je l'ai ressenti. Les docteurs sont au courant du problème, car ils m'ont tout de suite donné un médicament contre l'allergie. Ça aide, mais je suis vidé."
C'est pas ma faute, la patinoire est trop grande
Le tournoi de hockey entre à peine dans le vif du sujet, mais les Canadiens et les Américains ont commencé à ouvrir le parapluie pour prévenir toute élimination. En cause : la taille de la patinoire. Aux Jeux de Turin en 2006, la patinoire était de taille européenne, un peu plus grande que ce qui se fait en NHL, le championnat nord-américain. Et comme par hasard, trois équipes européennes se sont partagées le podium.
A Vancouver, en 2010, la patinoire était plus petite, et la finale a opposé le Canada aux Etats-Unis. Et à Sotchi... la patinoire est de nouveau aux normes européennes, "big ice" comme on dit de l'autre côté de l'Atlantique. "Vous pouvez vite vous retrouver perdu sur la patinoire si vous n'avez pas d'automatismes", affirme sans rire Peter Chiarelli, du staff canadien, au journal canadien The Star (en anglais).
C'est pas ma faute, j'ai bu l'eau marron qui sortait des robinets, ma femme a passé 36 heures à l'hôpital et j'ai un contrôle fiscal à sept chiffres qui m'attend
Eux, ils ont une bonne excuse pour avoir totalement raté leurs Jeux. Gary et Angela di Silvestri faisaient partie des belles histoires des Jeux olympiques. Ces gérants d'un fonds de pension à Wall Street avaient obtenu la nationalité dominicaine, pour avoir aidé à bâtir des hôpitaux pour enfants. Et ils s'étaient qualifiés pour les Jeux olympiques, à presque 50 ans. Mais le rêve olympique a tourné au cauchemar, et tous deux ont dû déclarer forfait. Angela raconte au site U-T San Diego (en anglais) le calvaire de son mari : "Un des tuyaux du village olympique a cassé, et de l'eau marron s'est mise à sortir des robinets. Gary prenait une douche, et n'a pas fait attention à la couleur de l'eau. Il s'est aussi brossé les dents. Le lendemain, il souffrait de fortes crampes abdominales. A la clinique, on lui a diagnostiqué une gastro-entérite bactérienne aiguë".
Les déboires de la famille di Silvestri ne faisaient que commencer. A l'entraînement, Angela chute lourdement dans les barrières de sécurité. Au lieu de battre le record du plus vieux participant dans l'épreuve de ski de fond, elle passe 36 heures en soins intensifs. Elle est la seule non-partante de l'épreuve des Jeux. Entre-temps, le site américain Deadspin a mis au jour une affaire de fraude fiscale qui leur colle aux basques en République Dominicaine, lors de la revente de leur île privée. Le montant de la fraude frôle les 20 millions de dollars.
C'est pas ma faute, je n'avais pas de docteur
Le patineur de vitesse Barton Lui Pan-to, unique représentant de la délégation de Hong-Kong, a justifié son élimination dès le premier tour des séries du 1 500 mètres par l'absence de médecin à ses côtés. Comme par hasard, de vieilles blessures se sont réveillées au village olympique, expliquant le fait que son tournoi olympique n'a duré que deux minutes. Même la presse chinoise n'y croit pas et compare cette excuse à l'affaire du steak empoisonné d'Alberto Contador sur le Tour de France 2010.
La réponse du comité olympique ne s'est pas fait attendre. Non seulement Barton Lui Pan-To avait passé un examen médical poussé avant le début des Jeux, mais il pouvait aussi se rendre dans un des centres médicaux du village olympique. "Nous n'avons envoyé qu'un seul athlète à Sotchi, donc ça ne nous a pas paru indispensable de lui joindre un médecin. On le fait quand on envoie de plus grosses délégations, comme aux Jeux d'été", explique Pang Chung, patron du comité olympique de Hong-Kong dans le South China Morning Post (en anglais).
C'est pas ma faute, c'est un complot
A quoi est due la décevante 8e place du patineur de vitesse Shani Davis dans l'épreuve du 1000 mètres ? Pour son entraîneur Ryan Shimabukuro, c'est évident, il y a "quelque chose". "On est vraiment très loin derrière. Il y a quelque chose de louche." Oui, mais quoi ? Shimabukuro a refusé de dire quoi. Mais une recherche Google "Sochi illuminati" donne 13 000 résultats. A creuser.
C'est pas ma faute, c'est ma tenue qui me ralentit
Une autre explication est avancée pour expliquer l'échec retentissant de l'équipe américaine de patinage de vitesse (zéro pointé contre 20 médailles pour les Pays-Bas, excusez du peu) : leur combinaison les ralentirait. L'équipementier Under Armour a beau faire valoir que la tenue a été élaborée en soufflerie avec le constructeur d'avion Lockheed Martin pour assurer côté aérodynamisme, les résultats ne sont pas probants. Interrogée par ESPN, la coach Nancy Swider-Peltz affirme "avoir remué ciel et terre" pour obtenir un changement de combinaison. "Je leur ai écrit des mails. J'ai pleuré. Je suis devenue folle. Je vais avoir des problèmes en vous le disant. Mais je m'en fiche. J'en ai marre qu'on ne me croie pas."
D'après Bloomberg, des trous d'aération situés à l'arrière de la tenue pour permettre à la chaleur de s'échapper créent un appel d'air qui clouent les patineurs à la glace. Le contrat de l'équipementier expire à la fin des Jeux, et Under Armour n'est pas favori pour obtenir le prochain bail, jusqu'aux Jeux de 2018.
C'est pas ma faute, j'ai loupé mon fartage
Les températures élevées à Sotchi ont un impact sur la consistance de la neige, et aussi du fartage des skis. Ce revêtement badigeonné sous les skis peut ruiner toute chance pour un skieur, même un favori. Le 10 février, le Canadien Alex Harvey explique ainsi sa piteuse 18e place au skiathlon de 30 km au site La Presse. Sur Internet, ça chambre, raconte Yves Bilodeau, le chef des huit farteurs canadiens au Journal de Québec : "Il y a même des gens qui nous balancent sur des blogues: 'Vous n’êtes pas capables de lire les instructions sur la boîte de fartage?'"
La (mal)chance tourne, et quelques jours plus tard, la Norvège connaît un double échec en ski de fond, vécu comme un drame national. L'excuse d'un mauvais fartage ne fait pas rire dans un pays où la fédé de ski a dépensé 4 millions d'euros de recherche sur la question et a envoyé 20 farteurs (oui, 20 !) aux Jeux. "C'est un mystère que nous n'ayons pas gagné", s'est borné à répondre Knut Nystad, le chef des farteurs norvégiens, devant un parterre de journalistes hostiles, rapporte Associated Press. "Cela ne devrait pas être possible". Et pourtant...
C'est pas ma faute, les juges sont des vendus
Quand on ne peut ni accuser le béton, l'eau du robinet, sa combinaison et qu'on fait un sport artistique, rien de tel que d'accuser les juges. La palme revient à l'Américaine Ashley Wagner, qui n'a d'après elle pas été récompensée de ses efforts dans l'épreuve du patinage par équipe. "Forcément, on est en Russie, on est aux Jeux olympiques, et on ne peut rien laisser à la décision des juges, sinon ils vont vous saquer", confie-t-elle après coup à US Weekly (en anglais) La déception était particulièrement visible sur son visage, dans la "kiss and cry zone", où les patineurs attendent le verdict.
Oui, vous avez bien vu. Elle dit : "bullshit !" On peut traduire ça poliment par "n'importe quoi !"
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