Violoniste, chauffeur de taxi, développeur... les vrais jobs des athlètes de Sotchi
Tout le monde n'a pas la chance d'avoir une armée de sponsors pour financer sa carrière et sa participation aux Jeux olympiques.
Avant les Jeux olympiques de Vancouver, en 2010, la patineuse américaine Ashley Wagner avait un petit ami, un travail à mi-temps, des études à mener en parallèle et habitait dans une maison avec son entraîneur. Ses JO se sont soldés par un échec cuisant. Changement de stratégie pour 2014 : "J'ai largué mon copain, j'ai quitté mon job, j'ai terminé la fac et je n'habite plus avec mon coach", explique-t-elle à NBC (en anglais). Elle se considère bien mieux préparée pour Sotchi. Pourtant, beaucoup d'athlètes qui vont participer aux Jeux olympiques doivent exercer une activité professionnelle à côté de leur carrière sportive. Même des médaillables.
Violoniste virtuose et skieuse (un peu moins virtuose)
Vanessa Mae a vendu 10 millions de disques, est considérée comme une violoniste prodige, mais cela ne lui suffit pas. Elle a réussi à se qualifier – "d'un cheveu", a reconnu son entraîneur sur la BBC – à deux semaines du début des Jeux, en disputant des compétitions juniors où elle avait 15 ans de plus que toutes les autres participantes. Ce n'est que la deuxième Thaïlandaise à participer à des JO d'hiver. Son prédécesseur, un skieur qui avait tenté sa chance en cross-country à Salt Lake City, skiait tellement lentement qu'il avait été disqualifié par les commissaires...
Chauffeur de taxi et spécialiste du slalom
Pas facile d'être skieur dans un pays où la lutte est reine. Alicher Koudratov, 26 ans, va pourtant vivre son rêve olympique. D'abord grâce à son travail de chauffeur de taxi à Douchanbé, la capitale du Tadjikistan. Puis grâce au pécule que lui verse la fédération tadjike : 1 500 dollars quand le salaire moyen culmine à 140. Contrairement à l'autre skieur olympique tadjik qui s'est exilé en Allemagne, Koudratov continue à s'entraîner sur l'unique piste du pays, dans le centre d'entraînement national... qui n'a pas de remontées mécaniques et "même pas l'électricité", rappelle son directeur sur le site Central Asia Online (en anglais).
Développeuse et championne de curling
La Canadienne Jacquie Armstrong a un agenda bien chargé. Trop, peut-être. "Je suis développeuse de logiciels. J'ai un boulot, un mari, deux enfants. C'est dur de trouver un équilibre entre mon sport, mon travail et mes amis. Et de ne négliger personne." Chaque semaine, elle parvient à dégager 20 heures pour s'entraîner. Alors son mari doit s'arranger avec son travail pour s'occuper de l'intendance. "Le plus dur, c'est de manquer les matchs de hockey de mon fils", confie-t-elle à la déclinaison canadienne du site Monster.
Le curling est le sport le plus "CSP+" de ces Jeux olympiques : on trouve beaucoup de banquiers, de chefs d'entreprise ou d'avocats d'affaires dans les équipes favorites.
Ecrivaine pour enfants et skieuse acrobatique
L'Australienne Amy Sheehan est en train de se faire un nom en portant les couleurs du pays où elle est née aux Jeux olympiques, en halfpipe. Mais la skieuse bénéficie déjà d'une petite réputation en Australie et en Nouvelle-Zélande (où elle vit) en tant qu'auteure de livres pour enfants. "J'ai négligé le dessin pour skier, c'était une erreur, confie-t-elle au journal néo-zélandais Otago Times (en anglais). C'est important de ne pas se concentrer que sur le sport." Pour ne rien gâcher, Amy Sheehan va bientôt pouvoir conjuguer ses deux passions. "Je suis en train de travailler sur une nouvelle série de livres pour enfants, raconte-t-elle au site spécialisé Chicks with sticks (en anglais). Ça s'appelle Amy la skieuse, et j'espère pouvoir le sortir l'année prochaine."
Courtiers et skieurs de fond
Gary et Angelica di Silvestri représenteront la République Dominicaine dans l'épreuve de cross-country. Lui est américain, elle italienne. Ensemble, ils gèrent une société de courtage à Wall Street... et se sont vus offrir la nationalité dominicaine en remerciement pour leurs actions philanthropiques. Le couple a permis d'ouvrir des hôpitaux pour enfants dans un pays qui en manquait cruellement. Ces skieurs émérites ont saisi leur chance de participer aux Jeux olympiques, grâce aux dérogations accordées aux petits pays. Restait un dernier obstacle à franchir : la méfiance des organisateurs, qui les ont interrogés pendant des heures, incrédules. "Ils regardaient les dates de naissance des engagés. 1990, 1991, 1992, 1993 et d'un seul coup 1967 et 1965. 'Eh, il n'y a pas une faute de frappe ici ?'", raconte Gary di Silvestri à NBC (en anglais).
Sans ressources et patineuse de vitesse
La patineuse de vitesse Emily Scott a sans doute emprunté le chemin le plus tortueux pour rallier Sotchi. Quand l'allocation versée par sa fédération est brutalement divisée par trois, de 2 000 à 600 dollars, en 2013, elle n'arrive tout simplement plus à joindre les deux bouts. Elle partage alors son appartement avec une colocataire. La nuit, elle travaille à temps partiel dans une fabrique d'outil de chirurgie. Elle arrête d'envoyer de l'argent à sa mère, qui purge une peine de prison pour trafic de drogue. Elle lance un appel aux dons sur le site de sponsoring participatif GoFundMe. Et récolte 190 malheureux dollars. Emily Scott demande aussi des food stamps, une aide alimentaire gouvernementale réservée aux plus démunis.
Le miracle a lieu : le quotidien USA Today l'apprend et écrit un article sur ses efforts financier pour pouvoir participer aux épreuves qualificatives des Jeux olympiques. Soudain, les dons affluent. Souvent modestes – 5 ou 10 dollars –, parfois incroyablement généreux, comme ce don de 4 000 dollars. "Un type qui n'a pas réussi à réaliser son rêve d'aller aux JO et qui ne voulait pas que j'échoue", confie-t-elle à NBC. Elle décroche finalement son ticket début janvier.
Thank you to everyone for all of the sweet messages and calls! I can't believe I'm going to the Olympics!
— Emily Scott (@EmScott89) 6 Janvier 2014
Elle visait 15 000 dollars, elle en a récolté près de 50 000. Elle est arrivée lundi 3 février à Sotchi. Elle essaie désormais de récolter des fonds pour que son père la rejoigne.
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