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Racisme : Après les beaux discours, le football italien doit passer aux actes

Les paroles du président de la Fifa, Gianni Infantino, étaient fortes lors de la remise des trophées Fifa The Best (récompensant les meilleurs joueurs de l'année) à Milan. C'était même la première fois qu'un dirigeant aussi haut placé s'exprimait de la sorte sur ce fléau qui sévit depuis des années dans le football, et plus particulièrement en Italie. Mais le football italien a encore beaucoup de travail pour remédier à une situation qui s'éternise.
Article rédigé par Romain Bonte
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 3 min
 

"Je veux dire ça en Italie, dans mon pays. Hier encore, nous avons assisté dans le championnat d'Italie à un épisode de racisme. Ce n'est plus acceptable", a déclaré l'Italo-suisse, Gianni Infantino.

Dimanche, le match de Serie A entre l'Atalanta Bergame et la Fiorentina avait été interrompu quelques minutes après des cris racistes visant le Brésilien Dalbert. Alerté par le joueur de la Viola, l'arbitre M. Orsato avait arrêté le jeu et demandé la diffusion d'un message par le speaker du stade. Ce message avait alors été accueilli par des sifflets nourris ! Le soir même des faits, le patron de la plus haute instance mondiale du football avait condamné une situation jugée "grave" et qui ne s'était "pas améliorée". "Le racisme se combat par l'éducation, en le condamnant, en en parlant", avait-il dit au micro de la chaîne Rai2.

Des paroles aux actes…

Le 26 décembre dernier, le franco-sénégalais Kalidou Koulibaly avait été visé par des cris de singe lors d'Inter Milan – Naples. L'équipe napolitaine avait demandé à plusieurs reprises l'interruption du match, en vain. Et le joueur avait fini par être expulsé suite à un deuxième jaune. Alors que ces agissements étaient auparavant ignorés, la commission de discipline de la Ligue italienne (LNP-A) avait cette fois infligé deux matchs à huis clos. On aurait pu penser que cette commission avait enfin fait son travail, si elle n'avait pas dans le même temps justifié deux matches de suspension à l'encontre du joueur. L'un visait une accumulation de cartons jaunes, et l'autre,  sanctionnait "les applaudissements ironiques adressés à l'arbitre"

Depuis ce triste épisode, la Fédération italienne a annoncé le 30 janvier dernier de nouvelles mesures. En cas d'agissements racistes, le match doit être aussitôt arrêté et les joueurs doivent se regrouper au milieu du terrain pendant qu'une annonce est diffusée dans le stade. Si de nouveaux faits interviennent, les joueurs quitteront la pelouse et la décision de reprendre la rencontre serait prise par l'ordre public. S'il s'agit bien d'avancées, l'Italie a tardé, volontairement et pendant de longues années à lutter efficacement contre ces actes venus d'un autre temps.

Un mal bien ancré en Italie

En 2013, la Fédération italienne avait atténué la règle de suspension de stade en cas de racisme. La notion de sursis avait en effet été intégrée à la législation et l'instance italienne avait ajouté que l'éventuelle sanction devait s'appliquer si et seulement s'il s'agissait de nombreux spectateurs. "C’est pour éviter que vingt idiots agités puissent nuire à 50.000 bons tifosi et causer la fermeture d'un stade entier", avait argumenté à l'époque le président de la Ligue professionnelle (Lega), Maurizio Beretta, toujours en poste.

Six ans plus tard, les cris de singe se multiplient et il semble bien que les règles établies après l'affaire Koulibaly ont été quelque peu oubliées. Depuis le début de saison, le Belge de l'Inter Milan Romelu Lukaku et l'Ivoirien de l'AC Milan Franck Kessié ont déjà été ciblés par des cris de singe, sans qu'aucune sanction n'ait été prise.

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"Nous sommes en 2019 et au lieu d'avancer, nous reculons", avait pesté Lukaku le 2 septembre, invitant les joueurs de football à "prendre position". Deux semaines plus tard, Kessié était à son tour victime de chants racistes lors du match Hellas Vérone – AC Milan. Curieusement, il n'existe aucune trace de ces actes que ce soit dans le rapport de l'arbitre, ou celui du parquet fédéral…

La saison passée, Blaise Matuidi, Moïse Kean et donc Kalidou Koulibaly avaient subi ces mêmes violences. Ils rejoignent tous la longue liste de joueurs victimes de racisme sur les terrains de Serie A, une liste dont font partie notamment Kevin-Prince Boateng, Lilian Thuram, Thierry Henry, Mario Balotelli, Samuel Eto'o… Le 15 septembre, lorsqu'un consultant tient des propos racistes en plein direct sur la chaîne Top Calcio 24 c'est à la fois insupportable, affligeant, mais malheureusement, guère surprenant dans un pays qui s'est laissé gagner par ce fléau.

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