L'Allemagne, le début d'une nouvelle ère
La Ligue des Champions va retourner en l'Allemagne. Douze ans après la dernière victoire d'un club de Bundesliga (le Bayern Munich en 2001) dans la reine des compétitions européennes, l'Allemagne va à nouveau s'asseoir sur le toit de l'Europe. C'était quasiment écrit après les matches aller de ces demi-finales, depuis mercredi soir, on en a la confirmation. Éclatante, puissante même, pour le Bayern Munich. Après sa victoire 7-0 sur l'ensemble de la confrontation contre le FC Barcelone, "la meilleure équipe du monde", selon Karl-Heinz Rummenigge, patron du club bavarois, le Bayern est un prétendant très sérieux à ce titre officieux.
Les hommes de Jupp Heynckes dans la foulée d'un duo "Robbery" infernal a fait boire le calice jusqu'à la lie à des Barcelonais qui voient leur rêve d'une troisième C1 en 5 ans s'envoler. Brutalement. La cinquième "coupe aux grandes oreilles" ne sera pas pour cette année pour Barcelone, la "Decima" tant désirée par Madrid non plus. Ce matin, ce trophée semble même s'éloigné un peu pour les deux géants espagnols. Après avoir émerveillé l'Europe pendant cinq ans par leur jeu, le retour sur terre est difficile pour des Barcelonais broyés par une machine qui semble lancer pour dominer le foot européen dans les prochaines années. A l'image des Catalans. Même s'il est impossible de prédire ce que sera le foot européen l'année prochaine, ou encore que le Bayern ne va pas se faire surprendre par Dortmund à la fin du mois de mai, la domination du football allemand va dans le sens de l'histoire.
Esprit de revanche
Si le Barca détient un record avec six demi-finales de C1 d'affilée (série en cours), le Bayern aussi est en train de marquer son époque avec une troisième finale en 4 ans. Après les échecs de 2010 contre l'Inter et celui, à domicile, contre Chelsea, l'année dernière, la bande à Ribéry a une troisième occasion d'offrir la cinquième C1 de son histoire au Bayern. Battus par le commando Chelsea en mission aux tirs au but à Munich il y a un an, un nouvel échec ferait tâche. "Notre objectif est vraiment de la gagner cette fois", a prévenu Arjen Robben. L'esprit de revanche et l'ambition qui anime les Bavarois ont explosé aux yeux de l'Europe lors de cette double confrontation. L'abattage d'un Javi Martinez, la débauche d'énergie de Franck Ribéry en sont autant d'exemple. "Ti Franck" était sur la pelouse lors de l'humiliation du quart de finale aller au Camp Nou en 2009 (4-0). Depuis mercredi soir, son honneur et celui du Bayern sont vengés. Mais la soif de victoire elle n'est pas rassasiée. Les plaies de 2009 et 2011 seront complètement refermées qu'en cas de succès à Wembley le 25 mai.
Si la présence du Bayern est à ce niveau est tout sauf une surprise, celle du Borussia, elle, vient confirmer la santé du foot allemand. Depuis sa victoire en C1 en 1997, le Borussia s'est reconstruit en gagnant. Sous la houlette de Jurgen Klopp, le Borussia a soulevé ses septième et 8e titres en Bundesliga de son histoire. Mais ce groupe jeune a connu un baptême désastreux en Ligue des Champions. Un affront qu'il s'était juré de laver. Eliminés dès le premier tour en 2012 (dernier d'un groupe où figurait l'OM), sans passer par la coupe UEFA, les Jaune et Noir ont rectifié le tir cette année. Brillamment. Premier du "groupe des Champions" (Real, Manchester City, Ajax) en phase de poule, ils se sont concentrés sur cette C1 en laissant filer inconsciemment le championnat qui va revenir au Bayern.
Question de génération
Les qualifications du Bayern et du Borussia sont aussi les victoires de la formation. Ce travail prend racine après un Euro 2000 désastreux pour la Mannschaft soldé par un cinglant 3-0 face au Portugal. Eliminée dès le premier tour, vieillissante, elle doit changer et cela passe par les jeunes. Les instances fédérales se sont lancées donc dans une vaste politique de développement des centres de formation à travers le pays, pour un coût estimé au final à plus de 700 millions d'euros. Dont elles récoltent les fruits aujourd'hui. A Dortmund, pas moins de six produits de cette nouvelle politique ont terrassé le Real : Mats Hummels, Marco Reus, Mario Götze, Marcel Schmelzer, Ilkay Gündogan et Sven Bender. Au Bayern, Thomas Muller, Bastian Schweinsteinger, Manuel Neuer, l'Autrichien Alaba ou encore Toni Kroos (blessé face au Barca) sont les porte-étendards de la formation bavaroise.
Cette génération dorée a mangé son pain noir en sélection. Dominés par l'Espagne en finale de l'Euro 2008 et en demi-finale du Mondial 2010, puis en demi-finale de l'Euro 2012 par l'Italie, ces joueurs germaniques retrouvent le sourire en club. Avant le Mondial 2014? Comme en club, les courbes espagnoles et allemandes pourraient de nouveau se croiser avec les équipes nationales.
Toute puissance financière
Un chiffre pour illustrer cette domination : 122 millions. En euros le chiffre d'affaires affiché par le Borussia Mönchengladbach en 2012. Voilà ce qu'a dégagé l'actuel 7e de Bundesliga, quand l'OM prévoit en cas de deuxième place en fin de saison un budget de 125 millions d'euros pour l'année prochaine. Sur le plan financier, l'Allemagne du foot est à l'image de l'Allemagne en Europe, devant et les autres derrières. Autre exemple, le cas Javi Martinez. Courtisé par le Barca et le Bayern lors de la dernière intersaison, ce sont les Allemands qui ont aligné les zéros et répondu sans sourciller aux exigences de Bilbao (40 millions d'euros). C'est encore le Bayern qui a signé Mario Götze, le "talent du siècle" selon Mattias Sammer, directeur sportif du club bavarois, pour 37 millions d'euros en vue de la saison prochaine.
A l'heure du fair-play financier cher à Michel Platini qui doit entrer en vigueur en 2014, les clubs de Bundesliga sont déjà prêts, quand d'autres géants européens – le Barca et le Real pour ne pas les citer (on parle de 300 millions d'euros de dette globale pour les Catalans) – affichent des dettes énormes. Instrument de la domination allemande, l'aspect financier est sûrement l'une des raisons pour laquelle l'entraîneur le plus courtisé du monde, Pep Guardiola, a choisi le Bayern Munich pour entraîner la saison prochaine. Décidemment, sur le banc, comme sur la pelouse, les courbes allemande et espagnole n'ont pas fini de se croiser.
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