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Rio Mavuba, champion en 2011 avec Lille : "Au moment de conclure pour le titre, il y a du stress, beaucoup de pression"

Le milieu de terrain du LOSC, champion il y a dix ans, évoque ses souvenirs et les parallèles dressés avec ses possibles successeurs pour le titre en Ligue 1.

Article rédigé par Vincent Daheron, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10min
Rio Mavuba en 2011, lors des célébrations du titre de champion de France de Ligue 1 avec Lille/ (BERTRAND LANGLOIS / AFP)

Le 21 mai 2011, Lille remportait le titre de champion de France en accrochant le match nul sur le terrain du PSG (2-2). Tout juste dix ans plus tard, le LOSC a l'occasion d'être couronné pour la quatrième fois de son histoire, dès dimanche 16 mai, s'il fait un meilleur résultat que le PSG lors de la 37e journée de Ligue 1. Rio Mavuba, ancien milieu de terrain et capitaine lillois en 2011, revient sur les derniers instants qui ont précédé le titre et évoque ses éventuels successeurs.

Franceinfo sport : Lille pourrait être champion dix ans après votre titre en 2011, ce serait un beau symbole ?
Rio Mavuba : 
C'est clair que c'est un beau symbole. Comme le disait un certain auteur [Vegedream] : "Ramenez la coupe à la maison, vingt ans après c'est le moment." Eh bien là, c'est plutôt : "Dix ans après, c'est le moment."

Comment appréhende-t-on les matchs où l'on sait que le titre se joue ?
Pour nous, c'était simple : être concentrés uniquement sur nous. On ne se concentre que sur notre performance parce que si on commence regarder l'autre équipe, ça ne marche pas. Il vaut mieux assurer le coup en se disant : "On gagne notre match", ça c'est la priorité. En gagnant, on est plus tranquilles, on a notre destin entre nos mains. On essayait aussi de relativiser et d'aborder chaque match comme un match à gagner et non comme un championnat à gagner.

Quels souvenirs gardez-vous de l'approche de ces derniers matchs, notamment de la 37e journée où vous remportez le titre face au PSG ?
Ce qu'il faut prendre en compte, c'est qu'on avait gagné la Coupe de France le 14 mai et ensuite il nous restait trois journées [dont un match en retard]. Le fait de gagner la Coupe de France nous avait soulagés, on avait déjà remporté un trophée. Ca nous a permis de relativiser et de mieux aborder la fin de championnat. Le match contre Sochaux, quatre jours après, on savait qu'il fallait gagner et malgré la fatigue – parce qu'on était épuisés –, on a su le gagner. On était portés par l'euphorie, par ce qu'il se passe au bout.

Mais à Paris, quand il a fallu conclure, il y avait du stress, beaucoup de pression. C'était au Parc des Princes, on jouait une belle équipe qu'on venait de battre avant. Ça avait été compliqué à gérer émotionnellement. Je me souviens qu'ils étaient à dix et qu'on n'a pas fait un grand match. Mais on a fait ce qu'il fallait parce qu'un nul nous suffisait.

Ressentiez-vous une pression supplémentaire à l'approche de ces derniers matchs ?
Oui, surtout au niveau du jeu, avec la fatigue. On avait ce supplément d'âme pour aller chercher ce titre mais on était moins performants dans le jeu, alors que c'était notre qualité première.

"Fébriles comme jamais"

Quelle était l'ambiance dans ce groupe justement, au fur et à mesure que la saison avançait ? Aviez-vous ressenti une différence par rapport à d'habitude ?
Non, parce qu'on avait eu l'épisode du match contre Saint-Etienne. On gagne et je marque alors que ça n'arrive jamais, alors on se dit que plus rien ne peut nous arriver. Il y a eu plutôt une forme de décompression qui s'est installée et encore plus après la victoire en Coupe de France. Mais encore une fois, c'était plus au niveau du jeu, pas au niveau de l'ambiance dans le groupe.

Ressentiez-vous une forte confiance en vous ?
Exactement. Sur les trois derniers matchs, on sentait qu'on pouvait jouer et que rien ne pouvait nous arriver. Même si contre Paris, quand ils sont revenus à 2-2, je nous ai senti fébriles comme on ne l'avait jamais été cette saison-là. On a manqué de maîtrise alors qu'on était en supériorité numérique. Paris a égalisé et heureusement que le match n'a pas duré plus longtemps.

Parliez-vous du titre entre vous ou ce sujet est venu naturellement ?
C'est venu naturellement. De toute façon, on n'était pas programmés pour le titre. Ensuite, à la trêve, on s'est dits que ça pouvait être sérieux, mais que c'était long et qu'on n'avait pas l'expérience de Marseille, champion la saison d'avant, que ce soit entre les entraîneurs (Rudi Garcia et Didier Deschamps), ou la différence entre les joueurs. Puis ça a commencé à sentir bon dans les quatre, cinq dernières journées. 

En début de saison, le titre était un objectif, un rêve ou aucun des deux ?
C'était ni l'un ni l'autre, l'objectif c'était d'aller chercher la Ligue des champions car l'année d'avant, on perd la deuxième place à la dernière journée et on termine quatrième. Faire aussi bien, ç'aurait déjà été top.

"Si on n'avait pas gagné la Coupe de France..."

Vous aviez gagné la Coupe de France la semaine d'avant, en une semaine la saison aurait pu basculer dans l'autre sens. Vous en étiez conscients ?
Clairement. On pouvait tout perdre en une semaine. On aurait pu perdre la finale de la Coupe de France et finir deuxièmes. Evidemment, ça aurait été une belle saison mais elle aurait été ratée pour nous. Ça m'avait traversé l'esprit mais on a fait ce qu'il fallait.

Vous aviez senti un poids en moins sur vos épaules après la victoire en Coupe de France ?
Oui bien sûr. Après la finale, on était vachement soulagés parce qu'on avait au moins un trophée sur les deux. On était plus détendus et sereins pour aborder la fin de saison. À l'inverse, si on n'avait pas gagné la Coupe de France, la fin de championnat aurait pu être très compliquée.

Quels sont les parallèles que vous faîtes entre votre équipe et celle du LOSC 2021 ?
Au niveau du jeu, en transition, dans le jeu de contre, les deux sont très fortes. Certainement plus forts même pour l'équipe de cette saison. Nous, en 2011, on avait peut-être un jeu plus léché, plus posé, en possession. Mais tactiquement, le point qui nous rallie c'est l'attaque rapide. Oon n'avait pas le même effectif que le LOSC cette année, en terme de quantité. À l'inverse, ce que fait Lille cette saison est exceptionnel parce que concurrencer Paris, Monaco et Lyon en même temps, c'est très, très fort.

La différence en 2011, c'est que vous n'aviez pas le PSG de l'ère qatarie. La Ligue 1 était-elle plus ouverte ?
Oui, plus ouverte mais on n'était pas plus un candidat au titre que ça. Depuis l'ère qatarie, à part Monaco et Montpellier, personne ne l'a fait donc ce serait un réel exploit.

"Ils ont le mental et le physique, je pense que ça va aller au bout"

Vous étiez une équipe jeune, le LOSC de cette saison est un mélange de joueurs prometteurs et de joueurs plus expérimentés. Vous voyez une ressemblance avec 2011 ?
C'est difficile... A part David Rozenhal, moi j'avais 27 ans, j'étais capitaine, Landreau devait avoir 32 ans. On était les deux joueurs les plus expérimentés au niveau international ou européen. Ce n'est pas vraiment comparable. Après, au niveau des jeunes talents, que ce soit les Hazard, Gervinho ou Moussa Sow, c'étaient des révélations, ou même Cabaye ou Debuchy. On va dire que ces joueurs-là ont plutôt explosé après le titre. Je trouve qu'ils sont plus confirmés dans le LOSC actuel avec Benjamin André ou Burak Yilmaz.

Avez-vous encore des contacts avec vos anciens coéquipiers de 2011 ? Si oui, parlez vous de vos éventuels successeurs ?
Oui, on a toujours des contacts, avec Florent Balmont par exemple. Ça nous arrive d'en parler, on sait la complexité de leur tâche.Les époques sont différentes, mais ce qu'ils font est très, très fort.

Rio Mavuba face à Guillaume Hoarau, lors de la 37e journée de Ligue 1, le 21 mai 2011. (AMANDINE NOEL/ICON SPORT / EPA ICON SPORT)

Seriez-vous contents d'avoir des sucesseurs ?
Oui oui, c'est top ! Pour la ville, pour le club qui a beaucoup travaillé. Après, ils nous succéderont juste au championnat parce qu'ils n'ont pas fait le doublé. Il faut remettre l'église au milieu du village. Sincèrement, ce serait top parce que c'est un club, une région de passionnés et ils méritent ce qui leur arrive.

Vous les pensez armés pour ne pas baisser le pied ?
Je les sens armés pour ne pas lâcher, notamment grâce à l'expérience de Jose Fonte, de Burak Yilmaz. Je les sens costauds, ils mettent du rythme, ils ont une fraîcheur dans cette fin de saison qui démontrent qu'ils ne vont rien lâcher.

Quelles sont les qualités les plus importantes avant ces derniers matchs ?
Ce sont les qualités mentales qui vont faire la différence. Il y a une fraîcheur physique à avoir mais ils l'ont. C'est ce qui m'impressionne d'ailleurs, ils dominent tous leurs adversaires physiquement. Ils ont le mental et le physique, donc je pense que ça va aller au bout.

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