OM : Pablo Longoria, l'avènement d'un pro du scouting précoce et travailleur acharné
Non, non ça ne me dit rien... Jamais vue cette moustache brune chargée de tromper une apparence juvénile. Mais qui est donc ce monsieur tout le monde agrippé à son téléphone portable sur toutes les photos prises de lui ? Lorsque son nom a été associé à l’OM, rares sont ceux n’ayant pas essayé de savoir qui était ce fameux Pablo Longoria. Après tout, il sera l’un des éléments clés de la “phase 2” imaginée par Jacques-Henri Eyraud, le président du club phocéen.
L'Espagne comme seul point commun avec Zubi
Dans une tribune publiée sur Linkedin le 24 mai dernier, ce dernier affirmait sa volonté de "monter un peu plus en puissance sur l'aspect sportif en recrutant un spécialiste du monde du football doté d'un profil d’un nouveau genre". Les qualités requises pour occuper le poste ? Des capacités de projection sur “le long terme”, de supervision de “la stratégie en matière de formation”, mais aussi de maintien de “l'équilibre financier” du secteur sportif. En somme : une personne "moderne", "très analytique dans son approche de la donnée", dont le rôle principal consiste à être un "support décisif pour le coach".
S’il ne l’a pas dit explicitement, Eyraud était en quête d’un profil diamétralement opposé à celui d’Andoni Zubizarreta, relevé de ses fonctions de directeur sportif en mai dernier. Le Basque était un ancien joueur et plus particulièrement le gardien du FC Barcelone, un homme d’expérience qui a tissé son réseau grâce à sa carrière. Apôtre de la start-up nation qu’il est, on peut déjà lire la satisfaction sur le visage de Jacques-Henri Eyraud, venant tout juste d’attirer le talent précoce et convoité Pablo Longoria, au nez et à la barbe de Newcastle.
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L’Asturien correspond aux grandes lignes décrites par Eyraud en mai dernier. En dépit de ses 33 printemps, Longoria a déjà bien garni les lignes de son CV. Très tôt recruteur pour Newcastle (2007/08), ce dernier est monté en grade au fil des années. Directeur du recrutement à Huelva (2009/10), il a commencé à se faire un nom du côté de l’Atalanta Bergame, qui lui a confié un poste de scout entre 2010 et 2013, qui lui a permis de devenir chef du recrutement à Sassuolo entre 2013 et 2015.
Si jeune et pourtant si expérimenté
C’est l’illustre Juventus Turin qui l’a ensuite appelé, lui confiant de grosses responsabilités pour surveiller les jeunes et la zone sud-américaine notamment (2015/18). Au cours de son aventure turinoise, Pablo Longoria a notamment déniché le milieu uruguayen Rodrigo Bentancur, qui a su se faire une place dans les onze de départ de Maurizio Sarri. Avant de rejoindre l’OM, c’est à Valence où l’Asturien travaillait, dans un rôle situé entre celui de directeur sportif et celui de directeur du recrutement. Son départ du club en septembre dernier a été difficilement compris par les supporters parce que ses compétences n’ont jamais été remises en question.
Pas franchement dans une position confortable, au beau milieu du démantèlement du projet sportif par le propriétaire Peter Lim, il n’avait pas énormément de latitudes. D’après la presse locale, le vrai directeur sportif était Mateu Alemany et Longoria n’avait pas le dernier mot, même s’il a su balayer le scepticisme de ses dirigeants lors du recrutement de Mouctar Diakhaby pour 15 millions d’euros l’été dernier. L’Asturien n’était en position de force que lorsque le coach Marcelino l’était également.
Car Pablo Longoria est un protégé de longue date de ce dernier. Ils avaient travaillé ensemble à Huelva, à Santander ou encore à Saragosse. Ce sont des désaccords sur la dernière fenêtre estivale des transferts qui ont coûté sa place à Marcelino en septembre dernier, après seulement trois journées de championnat. Longoria a quitté le club dans la foulée. L’ambiance en interne était de toute façon peu propice à l’émulation. Demandez à Vicente Rodriguez.
"El Niño de la Play"
Très amer, l’ex-joueur clé du FC Valence entre 2000 et 2011 n’a pas hésité à pointer du doigt Pablo Longoria après son éviction de la cellule de recrutement. "Longoria m'a trompé. Il n'a rien apporté. Il n'a rien prouvé parce que les signatures de joueurs étaient faites par (Mateu) Alemany et Marcelino. Ce gosse m'a trompé quatre ou cinq fois et m’a mal traité. Je lui ai dit que je ne travaillerais plus jamais avec lui. C'est un lâche et un indésirable", avait-il lâché sans concession dans une interview accordée à la Cadena SER.
Discret, avec un côté homme agissant dans l’ombre, Pablo Longoria n’est pas friand des interviews et généralement des interventions médiatiques. Surnommé “El Niño de la Play” lors de son passage en Andalousie, il n’était pas du genre à jouer des coudes et parler fort au milieu des zones mixtes et dans les centres d’entraînement pour se faire un nom, comme cela se faisait encore au début des années 2000. Longoria était au départ un adepte des forums internet et un érudit de Football Manager.
Il a ensuite multiplié les déplacements sur les terrains de football et surtout fait la rencontre de l’agent Eugenio Botas, qui lui a permis d’entrer dans le monde du football. Avec l’expérience accumulée, Pablo Longoria s’est affirmé en polyglotte. On dit qu’il parle six langues : l’Espagnol, l’Anglais, l’Italien, le Français, l’Allemand et le Portugais. Pour ceux qui l’ont côtoyé, sa réussite extrêmement précoce est tout sauf innée : elle est le fruit d’un travail démentiel. “C’est rare que je passe un jour sans voir sept ou huit matches de football”, disait l’intéressé lui-même lors d’une de ses rares interventions médiatiques.
Un "malade" du football et travailleur compulsif
“Travailler avec Pablo, c’est s’améliorer un peu tous les jours. C’est un apprentissage perpétuel dans lequel ça ne sert à rien d’être conformiste, au contraire tu dois forcer un peu plus tous les joueurs à évoluer au même rythme que le football d’aujourd’hui. J’ai eu la chance de travailler avec lui à Sassuolo et je peux assurer que c’est une personne très exigeante, très passionnée, qui dit les choses mais qui sait aussi écouter et accorder sa confiance aux professionnels qui travaillent avec lui”, décrit Javi Alonso pour Marcadorint, un scout qui a travaillé sous ses ordres.
Les éloges viennent également du côté de la Juventus, et notamment de la part de Javier Ribalta, directeur du recrutement chez la Vieille Dame entre 2012 et 2017. “Je soulignerais sa connaissance du marché et des impératifs de son équipe, sa capacité d’analyse des joueurs. Longoria est un malade du football, une machine de travail. C’est un grand travailleur, mais toujours disponible (...). C’est une personne qui se réinvente constamment”, s'enflamme Ribalta, lui aussi dans les colonnes de Marcadorint.
A première vue, l’Olympique de Marseille tient un crack pour gérer ses futurs mercato. Ces dernières saisons, les 25 millions d’euros posés sur la table pour accueillir Kevin Strootman (et son salaire important) et les recrutements de Valère Germain et de Kostas Mitroglou ont été pointés du doigt par les supporters olympiens. Ces derniers réclament aussi du mouvement en vue de la prolongation de certains cadres comme Florian Thauvin, en fin de contrat la saison prochaine. C’est dans ce contexte passionné et de fronde contre la direction actuelle que Pablo Longoria va devoir faire ses preuves, dans un costume de directeur sportif qu'il n'a jamais vraiment porté.
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