Les défis de Laurent Blanc au PSG
Prouver qu’il n’est pas qu’un choix par défaut
Arsène Wenger, Brian Laudrup, José Mourinho, Rafael Bénitez, Roberto Mancini, ou encore Fabio Capello… Tous ces noms ont été avancés pour succéder à Carlo Ancelotti. Nasser Al-Khelaïfi et Leonardo les ont tous envisagés avant de prononcer celui de Laurent Blanc. Et tous ont refusé ce poste. Laurent Blanc s’assoit sur un banc dont personne ne voulait alors qu’il n’était pas le choix numéro 1. On a connu mieux comme base de collaboration. Le Cévénol va donc devoir surmonter une arrivée qui, si elle n’a pas été chaotique dans son processus (la signature de Blanc s’est déroulée en quelques jours, le temps d’un week-end), ressemble fortement à un cadeau empoisonné.
Se faire accepter par le vestiaire
Partout où il est passé, Carlo Ancelotti a fait l’unanimité derrière lui. A Milan, à la Juventus, à Chelsea et au PSG aussi. Tous les joueurs parisiens ont multiplié les appels dans la presse ou dans l'intimité du vestiaire, pour que l’Italien revienne sur sa décision. Peine perdue donc puisque Ancelotti a rejoint Madrid. Pas un premier choix pour la direction du club, Laurent Blanc n’est donc pas véritablement "attendu" par ses nouveaux joueurs. Entre Lucas qui ne le connait pas – et qui va se renseigner - et Mino Raiola, l’agent de Zlatan, qui a tout de même précisé que "Laurent Blanc est un grand nom, on va le respecter" (le contraire aurait donc été possible?), le "Président" peut mesurer le fossé qui le sépare de son prédécesseur. Avant de diriger son premier entraînement le 1er juillet prochain, seuls Jérémy Ménez, qui a déclaré dans L’Equipe que "Blanc n’était pas un choix par défaut", et Kevin Areola se sont félicités de la venue de l’ancien champion du monde. "C'est bien pour le club, ils (les dirigeants, ndlr) ont trouvé un coach. Ce sont eux qui prennent les décisions et ce n'est pas à moi de juger, mais c'est tant mieux pour le club. C'est une légende", a assuré le 3e gardien du PSG.
Gérer des stars
A Bordeaux, sa première expérience sur un banc, Laurent Blanc avait pris en main un effectif de Ligue 1 où seul Yoann Gourcuff, et à un degré moindre Marouane Chamakh, sonnaient comme des noms connus. A Paris, il débarque au sein d’un effectif pléthorique composé d’une dizaine d’internationaux. Des Sud-Américains, des Italiens, des Français et un Suédois. Laurent Blanc va donc devoir apprendre à gérer les (gros) égos. A commencer par celui de Zlatan Ibrahimovic qui avait apprécié la façon de manager de Carlo Ancelotti. "Je n'ai jamais eu un entraîneur comme Carlo, et pour moi c'est quelque chose de nouveau. J'ai été habitué à une discipline de fer, avec Mourinho, Capello, ce qui m'a fait grandir, mais la méthode Carlo est plus douce, plus patiente. Il responsabilise les joueurs, les fait se sentir en confiance et j'aime ça. Quand on est bon, c'est aussi sa réussite", avait déclaré Ibra. Les premiers contacts vont être intéressants à suivre, mais le souvenir d’un Blanc ayant maille à partir avec les "enfants gâtés" du foot français (Ben Arfa, Nasri, Ménez qui ne sont pas au niveau d’un Ibrahimovic) durant l’Euro 2012 est encore dans les mémoires et ne joue pas forcément en sa faveur.
Gérer les cas "français"
Carlo Ancelotti avait une équipe-type en tête et n’en changeait que rarement. Ce qui avait valu quelques tensions notamment avec les "Français" du groupe, peu à peu mis à l’écart, comme Mamadou Sakho, Kevin Gameiro ou encore Jérémy Ménez. Le premier n’était pas le premier choix de Blanc en défense centrale (5 sélections sous Blanc, dont 3 comme titulaire) qui lui préférait la doublette Adil Rami-Philippe Méxès. Jamais vraiment titulaire à part entière sous Ancelotti, il pourrait encore pâtir de la concurrence puisque la signature de David Luiz, également désirée par Blanc, est espérée du côté du Parc des Princes. Les deux autres ont également subi la loi de la concurrence. Kevin Gameiro a eu droit à des miettes et a d’ailleurs craqué en toute fin de rencontre face à Troyes en fin de saison après un énième remplacement. Jérémy Ménez, lui, s’est peu à peu retrouvé sur le banc après l’arrivée de Lucas au mercato d’hiver, mais l’international n’est pas inquiet puisqu’il a assuré que Blanc savait "comment (l)’utiliser". Toutefois, l’ancien monégasque a assuré que la venue de Blanc n’était pas une occasion de redistribuer les cartes entre les Français et les étrangers. "L’an passé, ce n’était pas les étrangers d’un côté et les Français de l’autre. Tout le monde a eu sa chance", a-t-il ajouté dans L’Equipe.
Subir ou agir sur le recrutement
Si on ignore encore réellement les raisons qui ont poussé Ancelotti à partir, on sait que l’Italien n’a pas vraiment apprécié la manière dont s’est déroulé le recrutement de Lucas notamment dont il n’était pas au courant. Signer au PSG, c’est aussi accepter l’ombre de Leonardo au-dessus de son épaule. Laurent Blanc le sait et est au courant de ce qu’il attend. En matière de recrutement notamment, un domaine géré de main de maître par le directeur sportif brésilien et Nasser. Si son avis a été sondé sur l’éventualité de la venue de David Luiz, certains dossiers ont été entamés sans attendre la nomination du "Président". Celui de Lucas Digne, le latéral gauche de Lille, notamment dont la signature pour 15 millions d’euros est attendue. Sans parler de l’éventuelle arrivée d’un galactique (Rooney, Ronaldo) qui fait fantasmer le board parisien. Pas sûr que Laurent Blanc soit contre non plus.
Faire ublier les sorties ratées
C’est un peu une mauvaise ritournelle chez Laurent Blanc. Le "Président" a la désagréable habitude de rater un peu ses sorties. A Bordeaux, après deux premières saisons idylliques (2e en 2008, champion en 2009), il va vivre six derniers mois compliqués en 2010 qui se termineront par une élimination en quarts de finale de C1 contre Lyon et une sixième place en championnat alors que les Girondins étaient premiers à la trêve. En équipe de France, la prise de fonction après le chaos du Mondial 2010 est compliquée (2 défaites de suite), mais l’embellie est significative (23 matches sans défaite dont des victoires de prestige contre le Brésil, l’Angleterre ou l’Allemagne) avant un brusque coup d’arrêt à l’Euro 2012 où la défaite 2-0 lors du dernier match de poule contre la Suède précède l’élimination, sans gloire, en quarts de finale contre le futur champion, l’Espagne (2-0).
Des victoires et du beau
A Paris, Laurent Blanc va tout de suite devoir faire face à la pression. Des résultats et de la manière. Carlo Ancelotti a rapporté le titre à Paris, 19 ans après le dernier, Blanc devra le conserver. Désormais, le PSG a quasiment l’obligation d’être champion tous les ans pour créer une dynastie. Le communiqué du PSG qui a accompagné l’officialisation de sa venue ne dit pas autre chose : "La mission assignée par les dirigeants duParis Saint-Germain à Laurent Blanc est de poursuivre le chemin initié l’an dernier et de conduire l’équipe vers les sommets européens". Ces "sommets" sont, dans l’esprit des dirigeants parisiens, sans doute plus hauts que ceux atteints la saison dernière (élimination en quarts de finale contre le Barca sans perdre). Le dernier carré minimum ? Un sacré objectif donc pour Blanc qui devra y mettre la manière puisque le communiqué soulignait le "style de jeu séduisant" des équipes dirigées par le Cévénol. Parfois critiqué sous Ancelotti, le projet de jeu, une expression chère au nouvel entraîneur du PSG, devra être attirant, en plus d’être efficace. Trop "en réactions" et pas assez dominateur de son sujet l’année dernière, le jeu du PSG va devoir passer un cap. Gagner ne suffira peut-être pas. Kombouaré l’a appris à ses dépens, Ancelotti aussi. Un dernier défi, et non des moindres, pour Blanc qui a du pain sur la planche.
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