Lens, la fin de l'ère Martel
"Les conditions fixées en juin 2011 pour que Gervais Martel rachète les parts du RC Lens et redevienne majoritaire avant le 30 juin n'étant pas réunies, il a démissionné de ses fonctions de président du club de Lens, ce dont la banque a pris acte", a indiqué le Crédit agricole (CANF) dans un communiqué, précisant que Luc Dayan avait été nommé président de la SASP RC Lens.
"Les dernières propositions d'apports de capitaux nouveaux formulées par Monsieur Gervais Martel ne sont que partiellement financées et ne permettent donc pas d'assurer la trésorerie de l'entreprise pour la saison à venir", a précisé le CANF, ajoutant que "Gervais Martel (garderait) une option prioritaire d'acquisition du RC Lens à conditions égales, en cas d'offre émise par un tiers". Le Crédit agricole est propriétaire de 70% des parts du club sang et or, dont Gervais Martel est actionnaire à hauteur de 27,34%.
"Dans l'immédiat, la Caisse régionale a décidé de mettre de nouveau en oeuvre les moyens d'éviter un dépôt de bilan", a poursuivi la banque, qui affirme que seul son "appui financier réaffirmé à la DNCG (direction nationale du contrôle de gestion) le 26 juin dernier, est susceptible d'assurer le maintien du club en Ligue 2 la saison prochaine".
Luc Dayan, ancien président de Lille, "a été chargé de redéfinir un cercle vertueux pour le club, conciliant performance sportive et contraintes économiques nécessaires pour que le RC Lens retrouve les meilleurs standards du football, en redonnant aux spectateurs, aux supporters et aux partenaires le plaisir de soutenir leur équipe". Ancien médecin, qui s'est spécialisé dans la reprise de clubs sportifs (Lille, Sannois-Saint-Gratien ou encore Nantes) avec plus ou moins de succès, Dayan a été présenté par le CANF comme "un expert reconnu du monde du football professionnel et en particulier des clubs en situation difficile".
Après une saison très décevante au plan sportif (12e de Ligue 2), les supporteurs du RC Lens (qui étaient en moyenne plus de 20.000 par match malgré la descente) doivent s'attendre à une cure d'austérité et à une ambition sérieusement revue à la baisse pour la saison prochaine. La banque entend poursuivre "l'harmonisation de la politique salariale des joueurs et la poursuite de l'intégration en équipe première des joueurs issus de la formation". En revanche, le projet de rénovation du stade Felix-Bollaert ne semble pas dans l'immédiat en danger après cette redistribution des rôles au sein du club.
Le Président jette l'éponge
Gervais Martel, le bouillant président, qui était sûr de pouvoir trouver une solution, a remué ciel et terre mais cette fois rien n'y a fait: il n'a pas trouvé d'investisseurs pour l'aider à reprendre la main sur le club de cette petite ville de 37.000 habitants. C'est un constat d'échec terrible pour cette figure du football français, président de l'UCPF (union des clubs professionnels de football) de 1993 à 2008, déjà déprimé par la saison cauchemardesque de son équipe en L2 (sauvée de peu du National) et par une mise en examen pour "corruption privée et recel d'abus de bien sociaux", ce qu'il "conteste absolument".
Gervais Martel, qui a fait fortune en créant en 1983 le Galibot, hebdomadaire gratuit de petites annonces, a pourtant traversé bien des épreuves avec Lens en 24 ans de présidence, avec notamment une descente en 2e division dès sa première saison à la tête du club. Mais ce bon vivant au tempérament sanguin, fervent supporteur de Lens depuis tout petit, n'est pas le genre d'homme à se laisser abattre. Dix ans après son arrivée au club, le RC Lens obtient la consécration avec le titre de champion de France et s'offre ainsi le droit de disputer la prestigieuse Ligue des champions. En 1999, le club nordiste remporte un nouveau trophée: la Coupe de la Ligue. Sans retrouver les sommets de la fin des années 90, le Lens de Gervais Martel reste dans le haut du tableau dans les années 2000, avec une nouvelle participation à la Ligue des champions, en 2002. Le président en profite pour faire grandir le club en diversifiant les filières, en autofinançant le centre d'entraînement de la Gaillette et en multipliant le démarchage de partenaires afin de garnir les nouvelles loges du stade Felix-Bollaert, dont le club a depuis 1999 la gestion, grâce à un bail emphytéotique (longue durée) signé avec la ville.Pourtant, tout le monde, le président le premier, est pris de court par une nouvelle relégation en L2, à l'issue de la saison 2007-2008. Le club, aux portes de la C1 en 2007, perd beaucoup d'argent dans cette nouvelle descente. Même si Lens retrouve l'élite dès la saison suivante, la relégation laisse des traces.
Lens peine en L1 (11e en 2009-2010) et retrouve la L2 dès 2011, une descente alors qualifiée d'"embêtante" mais de "moins dure à gérer" par le président Martel. Elle fut pourtant pour lui la plus douloureuse. Et surtout la dernière.
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