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Leonardo, gendre idéal ou grand méchant du foot français ?

Il parle cinq langues, a un des jobs les plus puissants du foot français et une marionnette sympa aux "Guignols". Pourtant, la France du foot le déteste.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Le Brésilien Leonardo lors d'un match Inter Milan-Schalke 04, le 5 avril 2011 à Milan (Italie).  (OLIVIER MORIN / AFP)

Leonardo Nascimento de Araujo, dit Leonardo, parle cinq langues, a sa page personnelle sur le site de Dolce&Gabbana, un des jobs les plus puissants du foot français payé 400 000 euros brut mensuels, une marionnette sympa aux "Guignols" et une tête de gendre idéal. Un de ses précédesseurs au poste de directeur sportif du PSG, Jean-Michel Moutier, dit de lui que "c'est loin d'être un con", quand le plus connu des supporters du club, Nicolas Sarkozy, affirme dans Le Parisien que "Leonardo, c'est la classe absolue".

Et pourtant, depuis plus d'un an, il enchaîne les commentaires acerbes sur le championnat. Samedi 3 mars, contre Reims, il explique ainsi que le PSG n'est pas une équipe pour les matchs "où le terrain n’est pas bon et le match se joue sur la bagarre". Où est donc passé le gentleman footballeur ?

De l'amour, des câlins et de la philanthropie

Lors de son arrivée au PSG en tant que directeur sportif, le 14 juillet 2011, son CV sans tache faisait se pâmer tout le microcosme footballistique. Le joueur a laissé un excellent souvenir au PSG, où il n'est resté qu'une saison, en 1996-1997. On se rappelle son but d'entrée contre Strasbourg, ses quatre passes décisives lors de ses adieux, un soir de Coupe d'Europe contre Bucarest avec un 3-0 à remonter. On se souvient moins du joueur inconstant, qui a peu pesé sur la saison parisienne et qui a manqué une occasion énorme en finale de la Coupe des Coupes contre Barcelone, un soir de mai 1997, où il tira au-dessus seul face au but vide, laissant le Barça s'imposer 1-0.

Leonardo (à droite), et Raï (à gauche), les deux attaquants du PSG, se congratulent après la victoire 5-0 sur le Steaua Bucarest en barrage de qualification en Ligue des champions, le 27 août 1997 à Paris. (PIERRE VERDY / AFP)

Hormis un malheureux "tchin-tchin" lancé lors d'un toast à ses partenaires japonais lors de son passage aux Kashima Antlers (loin d'inviter à trinquer, ce mot désigne un pénis en japonais), son CV de joueur est impeccable, relève ESPN (en anglais). Après une reconversion mi-foot mi-humanitaire aux commandes de la fondation du Milan AC, qui aide handicapés et déshérités du monde entier, il s'assoit sur le banc du club rossoneri. Sa philosophie de jeu : "de l'amour et des câlins". A l'époque, le Milan joue en "4-2-fantasy", avec quatre joueurs offensifs créatifs qui produisent un jeu très spectaculaire. Il finit par démissionner, mais à la Leonardo, classe, en comparant Silvio Berlusconi à Narcisse : "Tout ce qui ne lui ressemble pas ne lui plaît pas."

"Casser mon image trop lisse"

Sa première faute de goût arrive en 2011, quand il prend les commandes de l'Inter Milan, le club rival. Les tifosi le représentent en Judas sur une banderole. Le Brésilien ne reste qu'un an à l'Inter avant d'arriver au PSG, dans un rôle de directeur sportif avec les pleins pouvoirs sur le recrutement, qu'il affirme préférer à celui d'entraîneur. Leonardo se coupe les cheveux, et perd le sourire qu'il affichait souvent sur le banc. "J'ai changé, explique-t-il dans une interview au quotidien italien La Repubblica en décembre 2011. J'ai cassé mon image trop lisse. Je n'ai pas peur de fâcher. Le football n'est pas une utopie et je ne suis pas candidat au prix Nobel de la paix." 

Le directeur sportif du PSG, Leonardo, lève le pouce aux côtés de sa nouvelle recrue, David Beckham, le 12 février 2013 à Valence (Espagne).  (PHILIP OLDHAM / COLORSPORT / SIPA)

Depuis, Leonardo concentre les critiques sur le PSG, qui malgré un recrutement pharaonique, n'a toujours pas remporté de titre. Il enchaîne les messages contradictoires : il soutient publiquement l'entraîneur Antoine Kombouaré, alors que fuite dans la presse sa rencontre dans un hôtel parisien avec celui qui deviendra son successeur, Carlo Ancelotti.

"Maladresse" ou "mégalomanie" ?

Il affirme être attaché au PSG, mais rappelle de temps à autre que "l'Italie [lui] manque" et qu'il "aimerai[t] bien entraîner en Angleterre". Il tente de justifier une défaite à Reims, samedi 3 mars - "le PSG est bâti pour l'Europe, pas pour ce genre de match" -, alors que deux semaines plus tôt, il appelait dans le magazine britannique FourFourTwo (en anglais) "à ne pas oublier d'où vient le PSG" après le beau succès européen contre Valence. Pire, au printemps 2012, il fustige la faiblesse de la L1 : "Le niveau de préparation des joueurs et des entraîneurs est vraiment bas." Avant d'estimer quelques semaines après : "Il faut arrêter de dire que la L1 est nulle. 70% des équipes espagnoles perdraient contre des équipes françaises." Allez comprendre…

La stratégie de communication de Leonardo rompt avec sa réputation de "robinet d'eau tiède" évoquée par L'Humanité en 1997. En deux ans à la tête du PSG, il a concentré plus de critiques que pendant toute sa carrière. Beaucoup parlent de "maladresse", certains, comme l'ancienne idole du Parc des Princes Francis Llacer, évoquent carrément une "espèce de mégalomanie puante" sur mercato365.com. So Foot fait le rapprochement avec José Mourinho, l'entraîneur du Real Madrid, connu pour lancer en moyenne une polémique par jour : "Allumer un feu à droite pour ne pas voir que ça brûle à gauche."

Cette stratégie arrange au moins une personne dans le club parisien : le peu bavard Carlo Ancelotti, qui s'occupe d'entraîner ses joueurs et de gérer les egos de son vestiaire. 

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