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Foot : l'Espagne est-elle en fin de cycle ?

Depuis qu'ils ont fait match nul contre la Finlande vendredi, les Espagnols font beaucoup moins peur. Impression trompeuse, avant le match contre la France ?

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
L'attaquant espagnol David Villa se prend la tête entre les mains lors du match nul 1-1 concédé par l'Espagne contre la Finlande, le 22 mars 2013, à Gijon (Espagne).  (ELOY ALONSO / REUTERS)

Vous avez dit "fin de cycle" ? Les acteurs du match France-Espagne de qualification au Mondial 2014, mardi 26 mars, n'ont que ces mots à la bouche. Prenez Yohan Cabaye, le milieu français : "Je ne pense pas que l'Espagne soit en fin de cycle." Quid de Santi Cazorla, le milieu espagnol : "Nous avons toujours aussi faim de victoires et vous ne pouvez pas parler de fin de cycle", affirme-t-il, conforté par son sélectionneur, Vicente Del Bosque : "Je crois que nous sommes dans le cycle de l’Espagne." Ô catastrophe, pour mériter pareil débat, l'Espagne a simplement enchaîné deux nuls (1-1 à domicile contre la France puis la Finlande) dans son groupe de qualification pour la Coupe du monde 2014. Cela dit, la question se pose.

Six ans au sommet, mais combien de temps encore ?

Frédéric Begbeider a écrit L'Amour dure trois ans. Les grandes équipes aussi, à en croire l'entraîneur Bela Guttmann, l'homme qui a façonné la grande équipe hongroise, meilleure équipe des années 50. "La troisième année est fatale", estimait-il, cité par le Guardian (en anglais)

L'Espagne en est à six ans au plus haut niveau, avec l'Euro 2008, le Mondial 2010 et l'Euro 2012 à son tableau de chasse. Son style caractéristique, fait de petites passes redoublées façon Barça, et de longues ouvertures dans les espaces façon Real Madrid, a été qualifié de formidable au début, de répétitif ensuite, et d'ennuyeux maintenant. Tant que ça marche, la Roja n'a aucune raison d'en changer. "Le passé ne compte pas pour obtenir des résultats, mais conditionne notre approche des matchs. Ça ne veut pas dire que nous allons tout gagner dans le futur, mais nous savons comment nous allons essayer de le faire", se justifiait le milieu de terrain du Real Madrid Xabi Alonso, cité par le site spécialisé Zonal Marking (en anglais)

Les adversaires savent comment les jouer

Mine de rien, l'Italie et le Portugal ont tenu en échec les Espagnols à l'Euro polono-ukrainien, avant d'être imités par les Français et les Finlandais lors des qualifications au Mondial 2014. Philippe Gargov, spécialiste de tactique qui tient le blog Les Dé-Managers sur les Cahiers du Football, explique précisément à francetv info comment maîtriser l'Espagne : "La rampe de lancement de cette équipe, c'est le duo de milieux de terrain Sergio Busquets - Xabi Alonso. Le premier utilise beaucoup le jeu dans les petits espaces, quand le second, un des rares Espagnols passés par un championnat étranger, joue comme un quaterback au foot américain, en privilégiant le jeu long. La capacité d'alternance du jeu de l'Espagne repose sur ces deux joueurs. Les équipes adverses s'épuiseraient à presser tous les joueurs espagnols, mais si elles parviennent à bloquer ces deux joueurs, elles réduisent considérablement la capacité de nuisance de l'Espagne." 

Les cadres de l'équipe ne sont plus tout jeunes

Autre épée de Damoclès qui pèse sur le succès espagnol : le vieillissement de ses cadres. Particulièrement au milieu de terrain, où les plus belles années des cerveaux de l'équipe Xavi (33 ans) et Xabi Alonso (31 ans) sont derrière eux. "Xavi ne fait pas une saison extra, il est de plus en plus sujet à des blessures, et je ne pense pas qu'il connaîtra un rebond, analyse Christophe Kuchly, monsieur tactique chez Horsjeu.net. Il fait son âge. Ce n'est plus lui qui fera toutes les différences, comme par le passé. Un joueur avec un tel génie, qui voit ce que les autres ne voient pas, est très difficile à remplacer."

Côté attaquants, Fernando Torres et David Villa ne sont plus que l'ombre du duo d'attaque qui mettait à feu et à sang les défenses pendant l'Euro 2008. Comme la relève peine à percer, c'est... Sergio Ramos, un défenseur, qui a tiré le plus de fois au but pour la Roja lors des éliminatoires pour le Mondial. Le rendement de l'attaque s'en ressent : la France a marqué plus de buts que l'Espagne (8 contre 7) après quatre rencontres. 

Il est clairement trop tôt pour parler de fin de cycle, mais celle-ci pourrait arriver plus vite que prévu pour l'équipe d'Espagne, et une défaite contre la France accélérerait le processus. La Roja restera la seule équipe de foot à avoir remporté trois trophées majeurs consécutivement. Mais il lui faudra rester à ce niveau encore un petit moment pour égaler la longévité de la meilleure équipe de tous les temps dans un sport collectif : la grande Hongrie... en water-polo entre 1925 et 1960. C'est la Société française de l’histoire du sport qui l'affirme à Rue 89.

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