De la confidentialité à la Coupe du monde, comment le futsal français a su opérer sa mue

Qualifiés pour la Coupe du monde en Ouzbékistan, les Bleus du futsal débutent leur aventure, lundi, face au Guatemala. Une première historique pour la France, après un long chemin parcouru.
Article rédigé par Justin Schroeder
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
L'équipe de France de futsal en match amical face à l'Argentine, au stade de la Source d'Orléans, le 31 août 2024. (CHARLES LEGER / FFF)

De l'ombre à la lumière. Classée 37e mondiale il y a dix ans, l’équipe de France de futsal a opéré une transformation spectaculaire en une décennie. Désormais 10es, les Bleus s'apprêtent à disputer leur tout premier match en Coupe du monde, lundi 16 septembre (17 heures) à Boukhara, en Ouzbékistan, face au Guatemala. Bien qu'ils aient dû attendre la dixième édition de la compétition pour se qualifier, les joueurs nourrissent de grandes ambitions, fruit de plusieurs années de professionnalisation.

Créée en 1997 à l'occasion d'un match amical contre la Belgique, l’équipe de France de futsal se formalise en 1998 avec l’arrivée d’Aimé Jacquet, champion du monde avec l’équipe de France de football, à la tête de la direction technique nationale. Pourtant, malgré ces bases installées, les résultats se sont fait attendre et les Bleus ont peiné à s'imposer sur la scène internationale.

Le premier sport collectif au collège et lycée

Contrairement au Brésil, à l’Espagne, au Portugal ou à l’Ukraine, le futsal a longtemps eu du mal à se faire une place en France. Ce sont d'abord les jeunes qui se passionnent pour ce sport né en Uruguay dans les années 1930. Le futsal s'est développé dans les collèges et lycées, loin des sphères professionnelles. Aujourd'hui, il est le sport collectif le plus pratiqué en milieu scolaire (UNSS), devant le handball, le basket et même le football, avec plus de 200 000 pratiquants d'après la Fédération française de football (FFF).

Ce n'est qu'en 2017 que la FFF reconnaît enfin l'importance du futsal, en le faisant passer comme une priorité. Noël Le Graët, alors patron du foot français, lance un plan de développement sous la direction de Philippe Lafrique, référent futsal au sein du comité exécutif. "Nous étions en retard par rapport aux autres pays. Il fallait démocratiser le sport en France. Beaucoup de districts n'avaient pas de championnat de futsal", se souvient-il. Des ressources ont alors été déployées pour développer les infrastructures et la formation, et le nombre de clubs a depuis augmenté, pour atteindre 1582 en septembre 2024.

Le pôle France futsal, ouvert en 2018, à Lyon le 3 octobre 2023. (ANTOINE BOUREAU / AFP)

En 2018, un pôle France est créé à Lyon pour accompagner la professionnalisation. "Comme tous les clubs du championnat de France ne sont pas professionnels, nous avons pris du retard. Ce centre de formation est destiné à combler ce déficit, ajoute Philippe Lafrique. Il y a huit ans, nous devions composer avec les emplois de nos joueurs, qui ne pouvaient pas toujours répondre aux convocations." En 2024, la situation a bien changé : tous les joueurs sont désormais professionnels.

Raphaël Reynaud, sélectionneur de l’équipe de France depuis 2021, attribue cette réussite aux moyens mis en œuvre par les clubs et la fédération. Les joueurs bénéficient d'un encadrement plus structuré, avec jusqu'à sept séances d'entraînement hebdomadaires. La professionnalisation de l’équipe s'est également accompagnée d'un renforcement du staff technique avec un préparateur physique, un analyste vidéo et trois kinésithérapeutes.

Les clubs français, comme l'Etoile lavalloise et le Sporting Club de Paris, régulièrement qualifiés pour la Ligue des champions, fournissent de nombreux internationaux. Raphaël Reynaud souligne aussi l'importance des joueurs évoluant à l'étranger, tels que Mamadou Touré au FC Barcelone ou Souheil Mouhoudine au Jimbee Cartagena, en Espagne également, qui contribuent à élever le niveau de l’équipe.

En Europe, des pays comme le Portugal, champion du monde en titre, ou l’Espagne, qui possède le meilleur championnat, sont des références. "En France, nous manquons de culture futsal. Pour combler ce déficit, nous misons sur une identité de jeu forte, basée sur un pressing constant et des transitions rapides", explique le sélectionneur tricolore. Ce modèle est appliqué dès les équipes de jeunes au sein du pôle France, ainsi qu'auprès de l'équipe féminine.

Une section féminine créée en 2023

Si l’équipe de France masculine existe depuis plus de vingt-cinq ans, l’équipe féminine est, elle, toute récente. Sa première sélection a vu le jour en 2023, avec la première Coupe du monde en ligne de mire, prévue pour 2025 aux Philippines. "Le futsal féminin est crucial pour nous, affirme Philippe Lafrique. Le nombre de licenciées augmente chaque année et nous travaillons à mettre en place des championnats dans les districts." Cependant, les internationales ne bénéficient pas encore du statut de professionnelles.

Plus avancés dans leur développement, les Bleus ont même réalisé des performances remarquables, comme leur victoire contre le Brésil en avril. Sous la direction de Raphaël Reynaud, l’équipe affiche un bilan impressionnant de 30 victoires en 44 matchs.

A l'approche de la Coupe du monde, la FFF s'est donc fixé pour objectif de sortir des poules en terminant aux deux premières places de son groupe ou parmi les quatre meilleurs troisièmes, sur six poules. Raphaël Reynaud et son équipe nourrissent de grands espoirs. "Nous avons demandé à nos joueurs quel était leur objectif pour le Mondial. L’un d’eux a répondu : 'Nous y allons pour fermer le gymnase, pour être les derniers à partir'. Ils veulent aller jusqu'au bout. Nous restons humbles, car c’est notre première Coupe du monde, mais nous sommes des compétiteurs", affirme le sélectionneur, tout de même lucide et conscient que "leur manque d'expérience" pourrait leur jouer des tours.

Pour leur entrée en lice, et espérer lancer une magnifique épopée, les Bleus évolueront sous les yeux du président de la FFF, Philippe Diallo, qui a fait le voyage jusqu'en Ouzbékistan.

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