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Dopage : après une histoire rocambolesque, Ophélie Claude-Boxberger face à son destin

Ophélie Claude-Boxberger comparait, ce lundi 15 mars, devant le collège des sanctions de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), pour répondre de son contrôle positif du 18 septembre 2019. Ce jour-ci, un dossier rocambolesque mêlant dopage, sordide histoire familiale et règlement de comptes s'est révélé. Récit.
Article rédigé par franceinfo
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Ophélie Claude-Boxberger, lors des Mondiaux à Doha en septembre 2019 (STEPHANE KEMPINAIRE / KMSP)

Il va falloir aux sages du collège de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) beaucoup de perspicacité et de patience pour accoucher d’une décision solide, tant ce dossier fourmille de chausses-trapes, contradictions, revirements, faits connexes. À la base, c’est pourtant simple : on a trouvé dans les urines d’Ophélie Claude-Boxberger, ou OCB (elle a gagné cet acronyme au fil de l’affaire), de l’EPO recombinante exogène (non produite par le corps) qui n’a pu arriver ici que par injection. A ce stade, elle doit donc être suspendue, quatre ans maximum. 

Mais voilà, en garde à vue devant les gendarmes de l'Office centrale de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (OCLAESP), Ophélie Claude-Boxberger déclare qu’elle n’est en rien responsable de cette injection unique, que l’EPO a dû lui être administrée à l’occasion d’un massage par son beau-père Alain Flaccus, lors de son stage d’été à Font-Romeu, dans les Pyrénées. Pourquoi aurait-il fait cela ? Parce qu’il serait jaloux de la relation qu’elle entretient avec le médecin de l’équipe de France d’athlétisme. Mais pourquoi serait-il jaloux ? Parce qu’il aurait abusé d’Ophélie quand elle était adolescente et qu’il nourrirait toujours des sentiments à son égard.

Dr Flaccus, Mister Alain

Cette histoire est confirmée par Alain Flaccus lui-même, en audition devant les gendarmes puis plus tard devant l’AFLD. Il le confirmera dans la presse, comme il l’avait laissé entendre en premier lieu dans Stade 2 en décembre 2019 quand il avait déclaré : "J’ai fait une connerie, j’assume". OCB pensait tenir ici l’explication d’une machination contre elle, qui pourrait l’exonérer de toute sanction mais ni les gendarmes ni l’AFLD (qui n’a pas pu avoir accès aux PV judiciaires) n’ont "acheté sur facture" cette version. Problème, il leur faut démontrer de manière irréfutable que ce n’est pas possible.

Depuis, Alain Flaccus est revenu sur ses déclarations dans la presse et à l’AFLD et affirme maintenant s’être accusé pour couvrir OCB, dans une sorte de pacte. Ce qui n’en fait malgré tout qu’un tissu de déclarations contradictoires. À la suite de quoi OCB a déposé plainte contre lui pour viol aggravé, en plus de sa plainte pour atteinte à son intégrité physique (la piqûre).

L’AFLD a mis dans la balance une autre sanction (4 ans supplémentaires) contre OCB pour défaut de localisation sur le chemin du retour de Font-Romeu (un hôtel où elle n’a pas dormi faisant la route directement vers son domicile à Montbeliard, dans le Doubs). Un élément qui sera contesté par la défense dans la mesure où cette sanction relève d’informations fournies par OCB de son plein gré à posteriori, et qu’elle n’a pas eu de contrôle à l’hôtel où elle n’était pas… On vous dit que ce n’est pas simple.

L’expert Ami-Ami

Reste une dernière carte abattue par l’agence et récemment versée au dossier : l’expert scientifique. Martial Saugy, qui a longtemps dirigé le laboratoire antidopage de Lausanne, en Suisse, produit une analyse des échantillons dans laquelle il favorise la piste d’une cure d’EPO et non d’une injection unique. Mais sa démonstration est truffée de "plausible", "possible", "probable". Il ne dégage clairement aucune certitude scientifique quant à la durée d’élimination de l’EPO, ni sa concentration, mais pourtant il conclut que selon lui "il est fortement probable" que plusieurs injections aient été pratiquées, dont la dernière deux à trois jours avant. C’est à dire qu’il en est convaincu mais qu’il n’arrive pas à le démontrer scientifiquement. Il serait surprenant que la défense, à l’occasion, ne rappelle pas un épisode trouble du passé de Martial Saugy. Selon NBC et Travis Tygart, patron de l’agence antidopage américaine, au début des années 2000 et des tests EPO, Saugy aurait indiqué à Lance Armstrong et son directeur sportif Johan Bruyneel comment fonctionnaient les tests et leurs limites. Saugy a reconnu la rencontre mais dément leur avoir indiqué comment feinter les tests. Une affaire qui dérange toujours en Suisse.

Ainsi, ce lundi 15 mars, les débats s’annoncent tendus et complexes… Et publiques, car OCB à demandé à ce que les médias puissent y accéder. Une demande exceptionnelle, d’autant que le collège de l’AFLD préfère généralement débattre à huis clos, mais assez logique de la part de l’athlète qui n’a jamais cherché à se cacher et s’est largement exposée dans les médias depuis le début. Les sages qui jugent en toute indépendance vont sans doute avoir le sentiment de plonger dans une drôle d’affaire, entre dopage, fait divers et règlement de compte familial.

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