Des Samoa sous le signe de la fierté
Une équipe marquée du sceau de l'exil. Dans la liste des 30 joueurs seuls deux jouent aux Samoa . Les 28 autres évoluent aux quatre coins du monde: France, Royaume-Uni, Japon, Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud... Ils se retrouvent deux fois l'an sous le maillot du "Manu Samoa ", la sélection baptisée du nom d'un ancien chef tribal.Cet exil s'est généralisé après la Coupe du monde 1991 où une bande de solides gaillards emmenée par un capitaine "déménageur" dans le civil, Peter Fatialofa, a chamboulé la hiérarchie. Avec une victoire de prestige face au pays de Galles à Cardiff, puis une autre sur l'Argentine, les "Samoa occidentales" avaient accédé aux quarts de finale, éliminés ensuite par l'Ecosse . Après les virevoltants Fidjiens en 1987, les Samoans aux qualités physiques hors normes ont suscité les convoitises.
La Nouvelle-Zélande voisine -qui a apporté le rugby sur l'archipel pendant qu'elle l'administrait entre 1914 et 1962-- était alors la seule destination pour quelques rares pionniers comme Fatialofa. D'autres avaient même choisi de rejoindre les All Blacks, à l'instar de Michael Jones qui ouvrira la voie. Mais si de plus en plus de joueurs évoluent désormais au plus haut niveau en club (Johnston à Toulouse, Paulo à Clermont, Fotuali'i aux Ospreys, Mulipola à Leicester...), la sélection n'a atteint qu'une autre fois une phase finale de Coupe du monde, en 1995.
Classée dans les nations du "deuxième tiers" (avec le Canada, les Etats-Unis, les Fidji, le Japon, la Roumanie et les Tonga), les Samoa disputent peu de test-matches face aux nations majeures et doivent se contenter de compétitions régionales comme la Coupe du Pacifique des nations face aux Tonga, aux Fidji et au Japon. Elle a pourtant déjà réussi plusieurs coups d'éclat comme face au pays de Galles vendredi dernier ou l'Australie en 2011.
Un rugby moderne
Alors que les dernières semaines ont révélé les difficultés du rugby fidjien à attirer ses joueurs en sélection face aux sommes d'argent proposées par certains clubs, les Samoa alignent souvent leurs meilleurs joueurs, animés de leur fierté nationale. "Les Samoa ne sont pas une équipe pour la célébrité et la fortune.... Les gars perdent même de l'argent quand ils jouent avec l'équipe nationale", explique le manager de la sélection Pat Lam. "Avant le match contre le Pays de Galles, j'ai parlé aux garçons de 1991 et de la manière dont ça nous avait ouvert les portes du rugby international, raconte-t-il. On leur a montré une vidéo avec des gens aux Samoa . Ça leur a rappelé d'où nous venons".
Pat Lam, conseiller dans l'encadrement des Samoa joueur entre 1991 et 1999: Dans notre sélection, on ne joue pas pour l'argent ou la gloire, on est l'équipe du peuple, là-bas au pays. En 1991, nous avons ouvert la porte à la génération suivante. Tous les joueurs d'aujourd'hui étaient alors des enfants. Ils me racontent comment ils nous regardaient à la télé. Ils ont beaucoup de fierté. Quand je pense à mes frères de cette époque, tout ce que nous avons fait et dit sur notre avenir est en train d'arriver.
Longtemps confinés à des rencontres contre les autres nations du Pacifique, Fidji eet Tonga, les Samoans n'ont joué leur premier match contre une équipe européenne qu'en 1986. Longue est pourtant la liste des grands joueurs qu'ils ont fournis aux All Blacks, à commencer par Michael Jones, Tana Umaga, Jerry Collins, ou Mils Muliaina
En quête de reconnaissance, les Samoans se sont rapprochés avec leur victoire à Cardiff de leur objectif: accrocher le Top 8 mondial et figurer dans le "deuxième chapeau" au tirage au sort du Mondial-2015. Pour cela, il leur faudra encore quelques exploits qu'ils sont tout à fait capables d'accrocher au vue de leur potentiel qui n'est plus seulement physique. Désormais, au contact des autres nations ils ont sérieusement progressé et avec l'expérience, de leur côté désormais, en plus de leurs capacités à découper les défenses adverses, il y a aussi du talent, de l'efficacité et de l'organisation. Au-delà des qualités individuelles, ils affichent aussi un collectif de plus en plus performant.
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