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Des Bleus à l'âme

Insultes, dérives claniques, mésententes. La défaite face au Mexique (0-2) révèle de profondes fractures. D'après le journal l'Equipe, Nicolas Anelka aurait insulté Raymond Domenech lors de la mi-temps de ce match. Les leaders tant attendus - Gallas, Henry, Evra, Ribéry - sont recroquevillés sur eux-mêmes. Le sélectionneur a beau rappeler les espoirs, bien réels, de qualification. Plus personne n'y croit. Pire, plus personne n'en rêve. Une fin au goût de chicotin.
Article rédigé par franceinfo
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Nicolas Anelka

"Va te faire enculer, sale fils de pute". Ces mots déplaisants n'ont pas leur place en Une d'un grand quotidien national. Selon le journal, à la mi-temps du match, le score étant nul (0-0), le sélectionneur n'a pas prévu de remplacer Anelka. "Il souhaite juste qu'il arrête de décrocher en permanence, de "dézoner" à volonté et qu'il reste plus en pointe, plus proche de la surface (...)". L'avant-centre de l'équipe de France conteste, Domenech menace de le remplacer. Anelka lance alors cette insulte plutôt salée. "Ok, tu sors", réplique Domenech et c'est André-Pierre Gignac qui joue la seconde mi-temps. Est-ce ce que c'est pire que le "casse toi, pauvre con" du Président de la République Nicolas Sarkozy balancé à l'un de ses concitoyens? Pas sûr. Ces mots malvenus écornent un peu plus l'image d'Anelka et celle de cette équipe de France décidément peu respectueuse. Autre problème: pourquoi Domenech a-t-il attendu la mi-temps de ce cinquième match pour recadrer le joueur? Ce fait révèle aussi l'incompétence d'un sélectionneur.

Dans le même article, intitulé "Insultes, sourires moqueurs et consternation", le journal décrit une "image saisissante". Gourcuff répond à des questions de journalistes en fin de match. "Pendant que le Girondin s'exprime, ses "deux amis" (Anelka et Ribéry, ndlr) déboulent sac à dos sur l'épaule. Quand Gourcuff aperçoit le milieu de terrain du Bayern Munich, l'image est saisissante: il évite de croiser son regard frondeur et se colle un peu plus à la barrière pour le laisser passer comme le premier de la classe fait place au caïd du collège par peur de prendre une baffe derrière la tête". Consternant. Les clans pourrissent l'ambiance et la gestion des Bleus.  

Ces révélations s'accumulent à d'autres griefs. Refus de saluer les supporters, refus de parler à la presse, les caprices d'enfants trop gâtés sont devenus insupportables. Le comportement hautain des joueurs avaient déjà mis en exergue un état d'esprit nauséabond. La "bunkerisation" mis en place par Raymond Domenech a fini de refermer le groupe sur lui-même. Ses errements dans la gestion des hommes, la pauvreté des entraînements, pas assez fournis et tactiques selon les joueurs, et sa volonté de créer une atmosphère de défiance vis à vis de la presse et du monde en général ont font implosé le groupe de l'intérieur.

Le déferlement de critique sur les Bleus, joueurs, encadrement, Fédération, ne faiblit plus. Les voiles tombent peu à peu. Et c'est pire que prévu. Au lieu d'un groupe uni, solidaire et heureux de vivre ensemble, nous découvrons un vieux couple où la parole est éteinte. Les faits révélés par l'Equipe dépassent le cadre strict du football. Ils dévoilent un comportement irrespectueux. Envers le maillot de l'équipe nationale, envers les supporters, envers les valeurs du sport. Ce groupe ne s'est jamais construit un dessein collectif. Les joueurs n'avaient pas cette ambition personnelle nécessaire. "Je ne me suis jamais donné comme objectif dans ma vie, dans ma carrière de faire un Mondial", avait d'ailleurs déclaré Nicolas Anelka à l'AFP le 11 mai. Au lendemain de l'appel du 18 juin du "petit colonel" De Gaulle qui lançait les fondations d'un projet national, Domenech et ses hommes, toutes proportions gardées, ont refusé de sacrifier leur égo pour se donner l'envie d'avoir envie. Celle de gagner ensemble. La belle maxime de 2006 -"On vit ensemble, on meurt ensemble"- est bien loin.

Loin de proposer un football positif, le jeu français manque detout: de gnac, de discipline tactique, de simplicitétechnique. A l'image des dribbles sans intérêt de Nicolas Anelka, desdéboulés kamikazes et inutiles de Franck Ribéry ou des chevauchées apathiques deSidney Govou, chacun joue pour lui-même. Une infamie dans un sport oùle collectif est la clé de tous les succès. L'Italie en 2006 ou plus récemment l'Inter Milan en Ligue desChampions sont là pour le rappeler. La qualification est toujours possible en cas de victoire sur l'Afrique du Sud conjuguée à une défaite du Mexique ou de l'Uruguay. Restons humbles: cette équipe n'a pas les moyens, ni l'envie de voir plus loin. "Mais le dernier mot est-il dit ? L'espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ? Non ! Croyez-moi, moi qui vous parle en connaissance de cause et vous dis que rien n'est perdu pour la France. Les mêmes moyens qui nous ont vaincus peuvent faire venir un jour la victoire." De Gaulle, appel du 18 juin 1940.

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