De l'équipe de France à l'octogone, le chemin tout tracé de Manon Fiorot
La combattante française de MMA sera dans la cage pour son deuxième combat à l'UFC, samedi à Las Vegas. Une nouvelle étape vers la ceinture de sa catégorie.
Coup de pied à l'arrière du crâne, uppercut et déferlante de quinze coups de poing. L'enchaînement dure à peine plus de cinq secondes. Pour son tout premier combat en UFC le 20 janvier dernier, face à l'Américaine Victoria Leonardo, Manon Fiorot n'a pas tardé à justifier sa place dans la plus prestigieuse organisation de MMA. Vainqueure par K.-O., la Française de 31 ans s'est fait un nom et veut continuer à le porter haut, samedi 5 juin, à Las Vegas, face à la Brésilienne Tabatha Ricci. Cette dernière a remplacé au dernier moment l'Ukrainienne Maryna Moroz, qui a déclaré forfait.
You can NOT ask for a better debut!
— UFC Europe (@UFCEurope) January 20, 2021
@ManonFiorot_MMA was relentless. #UFCFightIsland8
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Manon Fiorot est aussi déterminée dans la cage qu'elle n'est discrète, presque timide, en dehors. Comme Ciryl Gane, elle fait partie des nouveaux visages tricolores du MMA. La venue récente de la Niçoise à l'UFC (Ultimate Fighting Championship) tient autant à la lente légalisation de la discipline en France qu'à un cheminement de carrière progressif.
Après une infidélité le temps d'un sport-études snowboard, elle revient vite vers son amour de jeunesse, les sports de combat. "J'ai commencé par le karaté, que j'ai pratiqué une dizaine d'années, explique-t-elle à franceinfo: sport. J'étais en équipe de France puis je me suis mise au kickboxing. Et c'est de là que j'ai découvert le MMA."
Déjà performante en karaté et en pied-poing (championne de France), elle quitte les rings pour les cages et les combats plus complets, il y a six ans. "Les débuts étaient super compliqués, l'octogone c'est bien plus impressionnant qu'un ring ! Cela n'a rien à voir au niveau de l'adrénaline. C'était difficile de gérer tous les aspects de la discipline, je ne connaissais pas grand-chose au sol, j'étais vraiment débutante. Quand on est au sol, que tu peux prendre des coups, la première fois, c'est bizarre."
Des amateurs à la (télé-)réalité
Mais Fiorot a le combat dans le sang. Elle progresse vite, presque trop, et échoue pour ses premières grandes compétitions, les Championnats du monde puis d'Europe amateurs. On ne l'y reprendra plus. Son entraîneur Aldric Cassata façonne sa guerrière et en fait une championne du monde amateur en 2017, à peine deux ans après ses débuts.
Ce sacre mondial lui offre une opportunité rare et improbable : participer à une télé-réalité pour gagner un contrat pro dans l'Extreme Fighting Championship, la principale ligue de MMA en Afrique. La Française surclasse la concurrence. Elle récidive un an plus tard, en 2020 à l'UAE Warriors, la ligue des Émirats Arabes Unis. Avec deux ceintures, Manon Fiorot peut cette fois passer à la vitesse supérieure. "L'UFC, il n'y a pas mieux. La ceinture UFC, c'est le plus grand accomplissement."
Son palmarès intrigue les organisateurs. Son style lui offre d'emblée un surnom lourd de sens, "The Beast", la bête. "Des journalistes m'ont appelé ainsi (sourire). Ça vient de ma capacité à finir les combats, je reste sur six victoires, cinq par K.-O." Du karaté, Manon Fiorot a gardé un jeu de jambes impeccable, vif et puissant à la fois. Et cette approche stratégique offensive : toucher sans être touchée. "Je m'appuie sur mes déplacements, on peut se prendre un K.-O. très vite, surtout avec des petits gants comme ceux de MMA. Ce n'est pas comme la garde à la boxe. Les side kick (coups de pied latéraux) du karaté, ça bloque tout de suite les avancées des adversaires, au niveau du ventre ou au niveau des jambes." Dans un sport où les contacts sont nombreux et les organismes mis à rude épreuve, la pompier volontaire étonne en finissant régulièrement les combats sans la moindre trace.
Le 20 janvier dernier, sa déferlante de coups sur l'Américaine Victoria Leonardo a plié son premier combat UFC, la toute première victoire d'une Française au sein de l'organisation. Ce, sans la moindre égratignure.
"L'UFC met autant en avant les femmes que les hommes, c'est en France où c'est plus compliqué. Mais petit à petit, j'ai l'impression que ça s'améliore"
Manon Fiorotà franceinfo: sport
Car Fiorot n'est pas du genre à foncer tête baissée dans le combat. Si la Française cherche à agresser le plus tôt possible ses vis-à-vis, c'est toujours après avoir savamment mis au point une stratégie avec son entraîneur. "J'ai toujours un plan de combat, Aldric sait ce que l'adversaire va faire, assure Manon Fiorot. Et une fois que je suis face à elle, je m'adapte. Je peux travailler beaucoup sur le sol, dans la lutte. J'essaie d'ajouter des armes à mon jeu au fur à mesure. C'est compliqué pour les adversaires parce que je sais tout faire."
Les fondamentaux sont là, le potentiel aussi. L'UFC le sait bien et voit en Fiorot une potentielle challenger chez les -57kg. La combattante, elle, ne vise rien d'autre que le Graal. "J'y pense mais je me concentre sur chaque combat. Cela sert à rien de faire des plans. Déjà, le top 10 mondial est atteignable au troisième combat." Contre Tabatha Ricci, elle tentera de poursuivre son invincibilité, même si Manon Fiorot est consciente du défi qui l'attend.
"Ma préparation s'est super bien passée. On arrive sur la fin, la perte de poids et les derniers réglages. En terme de niveau, je suis en avance par rapport à d'habitude. Une défaite, ça pourrait faire partie du parcours, mais ça n'enlèverait rien à ma volonté d'arriver à la ceinture UFC. Je me laisse trois ans pour y parvenir."
Il faudra pour cela détrôner Valentina Shevchenko, qui règne d'une main de maître sur les poids mouches depuis 2018 et n'a pas perdu le moindre combat en UFC dans la catégorie. Entourée de son coach, d'un préparateur physique et d'une équipe de six anciens combattants professionnels, Fiorot se donne les moyens de la détrôner. Pour elle, et pour toutes celles qui pourraient suivre sa trace.
"C'est une fierté d'être une pionnière française en UFC. Ça va aider pour les autres combattantes, prouver qu'on peut être une fille et être en mesure de combattre."
Une nouvelle victoire et une place plus grande encore de l'autre côté de l'Atlantique cimenterait son statut parmi les cadors et son image dans l'Hexagone. "Si chaque combat se passe bien, on passe à la suite. Pour l'instant, tout se passe comme prévu. Il faut maintenant gagner le prochain combat, par K.-O." Dans cette destinée idéale toute tracée, "le rêve, ce serait de combattre en France pour la ceinture" imagine déjà Manon Fiorot. "D'ici 2-3 ans, pourquoi pas", lâche-t-elle dans un sourire.
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