Cyclisme : "Ne rien s'interdire"... L'équipe FDJ-Suez veut s'affirmer comme la meilleure équipe du peloton féminin

Chaque saison de plus en plus ambitieuse, la formation française a annoncé la couleur en début de saison et a tenu parole sur Liège-Bastogne-Liège dimanche.
Article rédigé par Andréa La Perna
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Cecilie Ludwig Uttrup remporte la 2e étape du Tour Down Under, à Adélaïde en Australie, le 13 janvier 2024. (BRENTON EDWARDS / AFP)

Un sprint parfaitement géré, décomplexé. Grace Brown s'est imposée sur Liège-Bastogne-Liège devant le gratin du peloton, dimanche 21 avril. Toujours fringante malgré une longue échappée, la coureuse australienne de la formation française FDJ-Suez a surpris son monde car la victoire semblait promise à la surpuissante SD Worx-Protime. La "Doyenne des classiques" n'est pas un Monument du cyclisme féminin mais est l'une des courses les plus prisées du calendrier. En l'ajoutant à son palmarès, FDJ-Suez confirme son nouveau statut.

 

Quelle victoire de Grace Brown ! Dans l'échappée du jour, qui s'est révélée être finalement la bonne échappée, l'Australienne a vu les grandes favorites revenir sur elle à une dizaine de kilomètres de l'arrivée. Si chacune a tenté d'attaquer dans le final, la victoire s'est jouée au sprint et la coureuse de la FDJ-Suez, après deux 2e places sur cette épreuve, a cette fois devancé Elisa Longo Borghini et Demi Vollering.
La course femmes : Grace Brown s'impose au sprint devant Elisa Longo Borghini Quelle victoire de Grace Brown ! Dans l'échappée du jour, qui s'est révélée être finalement la bonne échappée, l'Australienne a vu les grandes favorites revenir sur elle à une dizaine de kilomètres de l'arrivée. Si chacune a tenté d'attaquer dans le final, la victoire s'est jouée au sprint et la coureuse de la FDJ-Suez, après deux 2e places sur cette épreuve, a cette fois devancé Elisa Longo Borghini et Demi Vollering.

Depuis 2022, l'équipe fait partie des cinq meilleures au monde et vise encore plus loin. Lors de la traditionnelle conférence de presse de début de saison, organisée au sommet de la tour Suez de La Défense le 19 février, le manager général Stephen Delcourt avait prévenu qu'il ne comptait pas freiner ses ambitions. Ce dernier a révélé avoir mis au point un plan sur cinq ans pour que sa formation remporte les neuf courses les plus importantes : les Strade Bianche, le Tour des Flandres, Paris-Roubaix, La Flèche wallonne, l'Amstel Gold Race, le Tour de France, le Giro, la Vuelta et Liège-Bastogne-Liège, qui est donc déjà dans la poche.

4 millions d'euros de budget

"Le but c'est qu'on réduise le cycle de domination de SD Worx et qu'on devienne l'équipe qui domine le sport", a osé Stephen Delcourt, micro en main aux côtés de six de ses coureuses et devant les journalistes. Bien qu'extrêmement ambitieux, son discours a été appuyé par Flavien Soenen, l'un des deux directeurs de la performance, lorsqu'il a été interrogé sur les ambitions de l'équipe sur le prochain Tour de France. "On ne s'interdit rien. On doit rêver de ce qui est le plus beau dans notre sport. Un podium au Tour de France est, je pense, un excellent résultat, mais quand on vise le podium c'est qu'on peut aussi atteindre la gagne", a tranché l'ancien coach de Nairo Quintana et Warren Barguil chez Arkea-Samsic.

FDJ-Suez n'est plus cette équipe entrée en World Tour (le plus haut niveau international) par la petite porte en 2020. Elle a affiché 17 victoires en 2022 et 19 en 2023, des chiffres sans précédent pour celle dont le record était de trois jusqu'en 2021. L'arrivée du groupe Suez en tant que co-sponsor titre juste avant la première édition du Tour de France femmes, il y a deux ans, a donné un gros coup de pouce financier. "On a multiplié notre budget par quatre en quatre ans. En 2017, je disais qu'on serait enfin professionnel avec 1 million d'euros de budget. Aujourd'hui, on va passer les 4 millions et je vous dirai que ce n'est pas assez", assume Stephen Delcourt, figure centrale depuis plus de 16 ans et décrit en interne comme un acharné de travail.

Marta Cavalli lors de son succès sur la Flèche wallone 2022, à Huy, le 20 avril 2022. (BENOIT DOPPAGNE / AFP)

En 2024, FDJ-Suez compte dans son effectif plusieurs des têtes d'affiche internationales du peloton féminin, à commencer par Cecilie Ludwig Uttrup. Arrivée en 2020 en tant que première recrue internationale de premier plan, la puncheuse danoise a rapporté 10 victoires, dont une étape du Tour de France. Grace Brown l'a suivie un an plus tard. L'Australienne au gros moteur est double vice-championne du monde du contre-la-montre. L'Italienne Marta Cavalli fait également partie de ce groupe. Elle n'a pas encore eu l'occasion de tirer son plein potentiel à cause de chutes particulièrement douloureuses mais ses succès sur La Flèche wallonne et l'Amstel Gold Race en 2022 ont marqué les esprits.

Vers une arrivée de Demi Vollering en 2025 ?

Evita Muzic est la figure de proue tricolore de l'équipe et sera encore cette année l'une des deux meilleures chances françaises pour le classement général sur le Tour de France, en même temps que Juliette Labous (DSM-Firmenich). Et si l'on en croit La Gazzetta dello sport, FDJ-Suez devrait encore se renforcer la saison prochaine en enregistrant l'arrivée de Demi Vollering (SD Worx-Protime), la vainqueure du dernier Tour de France. Rien que ça.

La rumeur n'a en tout cas pas été démentie par l'équipe française et semble même crédible si l'on se fie au discours de Stephen Delcourt. Avant même les premiers bruissements médiatiques concernant une potentielle arrivée de la Néerlandaise, le patron de FDJ-Suez avait glissé un indice mi-février en répondant à une question portant sur la stratégie à employer pour bousculer l'hégémonie de SD Worx : "On ne croit pas en la fatalité. Nous on a envie de jouer. Il y a des fins de contrat chez elles, ça va bien finir par tourner". Après tout, recruter la tête d'affiche de l'ennemi est une technique efficace. En plus, une place pourrait se libérer dans l'effectif puisque Cecilie Ludwig Uttrup est en fin de contrat à l'issue de la saison.

L'équipe est attractive. A l'intersaison, elle a recruté une deuxième directrice de la performance en attirant Lieselot Decroix qui officiait du côté de Jumbo-Visma, l'une des meilleures formations du peloton. La Belge, ex-coureuse professionnelle, est venue apporter son expertise, en particulier sur les stages en altitude que l'équipe a ajoutés dans sa préparation en 2024. "Je suis allée pour aller plus loin et chercher le détail", résume celle qui travaille en duo avec Flavien Soenen.

"Nous pouvons compter sur 40 salariés. On a la chance d'avoir une nutritionniste à plein temps, un médecin qui s'engage de plus en plus avec nous. On a l'un des plus beaux bus au monde, recouvert de panneaux photovoltaïques et autonomes 27h, se félicite Stephen Delcourt, également impliqué sur le volet développement durable. Les batteries au lithium à l'arrière nous permettent d'être autonomes pour les frigos, les congélateurs, la climatisation... On récupère toute l'eau de pluie pour laver nos voitures." Dans un peloton où une partie des équipes ne peut se permettre de compter sur un staff salarié, le contraste est d'autant plus frappant. 

Tous ces paramètres influent sur la réussite de la FDJ-Suez qui sera particulièrement scrutée sur le Tour de France cet été (du 12 au 18 août). Un peu moins de quatre mois doivent encore s'écouler d'ici-là et l'équipe française a bien d'autres courses à disputer, à commencer par le Tour d'Espagne qui débute dimanche. Leaders, Evita Muzic et Marta Cavalli y seront particulièrement attendues.

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