A quand un Tour sans affaire ?
Après l’affaire Rémy Di Grégorio, le patron du Tour Christian Prudhomme s’était à la fois félicité de voir que « les tricheurs sont pris tôt ou tard » et avait expliqué que « la caisse de résonance du Tour de France intéresse tout le monde », ce qui est aussi l’avis de Vincent Lavenu. « On connaît l’impact que cela peut avoir en raison de l’événement que représente le Tour de France. Cela fait le buzz… C’est dommage car cela ne fait pas une bonne publicité à notre sport qui pourtant a fait beaucoup d’efforts pour présenter un peloton correct », résume le manager de la formation AG2R-La Mondiale.
L’épreuve la plus contrôlée au monde
Ce dernier affirme qu’il est possible de voir un jour un Tour sans affaire de dopage. « Oui je le crois. Pour moi le peloton est à 95% sain, indique-t-il. D’ailleurs, on voit que tout le monde est en difficulté, on ne voit plus quelqu’un voltiger comme on avait pu le voir auparavant. Le peloton va beaucoup mieux qu’il ne l’a été, même si tout n’est pas forcément réglé.» Il existe encore malheureusement des brebis galeuses. Sur les 198 coureurs qui ont pris le départ de cette 99e édition, 20 d’entre eux avaient déjà contrevenu au règlement antidopage lors de leur carrière.
Depuis l’affaire Festina en 1998, le Tour de France reste l’épreuve la plus contrôlée au monde, et c’est sans doute aussi pour cette raison que les affaires de dopage semblent plus nombreuses que dans les autres sports. Mais en se basant sur les chiffres, les cyclistes ne sont pas les plus tricheurs. Avec 1,19 % de cas détectés, ils restent derrière des sports comme l'haltérophilie (2,42 %), la boxe (1,94 %), le tir à l'arc (1,47 %) ou encore le basketball (1,45 %). Il faut aussi savoir par exemple que des Fédérations internationales comme celle du football (la Fifa) n’ont pas signé d’accord avec l’AMA…
On estime qu’environ 500 contrôles sont effectués sur les trois semaines de compétition, le nombre exact de contrôles restant assez difficile à obtenir, ce qui fait dire à Vincent Lavenu que « ceux qui ont encore des dérives ont de grandes chances de se faire attraper. C’est comme cela que l’on éradiquera les derniers récalcitrants. Il ne faut pas baisser les bras. »
Un travail en amont et des sanctions plus lourdes
Parmi les armes utilisées contre ce fléau, il y a d’abord le travail de prévention effectué auprès des clubs amateurs. « La pression doit être à tous les niveaux. En amont bien entendu avec les jeunes, et c’est déjà le cas », assure le Trésorier du Mouvement pour un cyclisme crédible (MPCC). « Dans beaucoup d’équipes, les fédérations font beaucoup de travail. Aujourd’hui, par rapport aux jeunes, il n’y a pas d’inquiétude à avoir. Quand vous voyez des jeunes coureurs français ou étrangers, aller gagner des belles étapes de montagne, c’est plutôt rassurant pour notre sport », indique-t-il.
« Il faut maintenir la pression, les contrôles doivent être performants, il y a des contrôles systématiques. La pression UCI existe. Nous, au niveau de la Fédération française de cyclisme, et le MPCC faisons des contrôles qui n’ont rien à voir avec l’UCI. Nous avons d’ailleurs eu ce matin un contrôle FFC-MPCC, et les coureurs se prêtent de bonne grâce à ces dispositions là », explique Vincent Lavenu.
Selon le règlement, Fränk Schleck qui a été suspendu après que l’on a retrouvé des traces d’un diurétique dans son organisme, risque du simple blâme à une suspension de deux ans. « Je suis de ceux qui pensent que pour les produits lourds, comme les transfusions, l’EPO, les sanctions doivent être plus sévères encore, affirme Vincent Lavenu. Et selon les règelements en vigueur, il faut savoir qu’il existe des sanctions pouvant aller jusqu’à quatre ans pour une première affaire. « Sur les produits lourds, il faut faire plus peur aux coureurs qui seraient tentés de les utiliser », réagit Lavenu.
Le ras le bol des coureurs
Egalement interrogé avant le départ de la 16e étape entre Pau et Bagnères-de-Luchon, Maxime Bouet était plus dégouté encore que son manager. « Je ne sais pas si on arrivera un jour à éradiquer le dopage. Cela commence vraiment à saouler », s’est indigné le coureur français. Je ne sais pas trop à quoi jouent les mecs. (…) Le vélo, c’est ça,… A chaque journée de repos, on a été entaché d’une affaire. C’est saoulant. Quand tu fais ton métier proprement, sainement, professionnellement tout simplement, et qu’il y a des tricheurs, c’est chiant ! », a-t-il lâché.
Car le plus triste dans ces affaires, est que l’amalgame est fait. On parle bien ‘des coureurs du Tour de France’, et tout le monde est mis dans le même sac. Il arrive aussi à la suite de telles affaires que les partenaires financiers préfèrent se retirer pour ne pas voir le nom de leur enseigne associé à une telle affaire, et c’est donc dans l’intérêt de tous que la lutte contre le dopage soit performante. « Nos sponsors nous connaissent depuis 15 ans, ils savent la manière dont nous travaillons. Ils connaissent notre investissement pour lutter contre le dopage, donc la confiance existe », précise Vincent Lavenu, qui comme les autres manageurs d’équipes cyclistes doit batailler chaque jour pour restaurer l’image ternie de son sport. Malheureusement, il est aujourd’hui difficile d’assurer que le cyclisme et a fortiori le monde du sport dans son ensemble sera irréprochable un jour, mais c'est bien ce que les passionnés de sport souhaitent vivement.
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