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Reportage Basket : la folie Wembanyama a embrasé Roland-Garros, pour la dernière du prodige en France

Article rédigé par Adrien Hémard Dohain, franceinfo: sport - De notre envoyé spécial
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7 min
Victor Wembanyama fait son entrée sur le court Philippe-Chatrier de Roland-Garros, le 15 juin 2023. (ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP)
Pour sa dernière sortie en club sur le sol français, Victor Wembanyama a eu le droit à une soirée d'anthologie à Roland-Garros, malgré la défaite des siens face à Monaco, nouveau champion de France.

Il n'a jamais fait aussi chaud sur le Philippe-Chatrier. Peu importe le mercure, les rayons du soleil qui chauffent la terre battue, jamais le court central de Roland-Garros n'a chanté comme il l'a fait jeudi 15 juin, pendant un peu plus de deux heures... pour du basketball. Le temps d'une soirée, les voisins des Boulogne-Levallois Metropolitans 92 ont investi le temple du tennis français, reconverti en playground pour l'occasion. Un tapis rouge de circonstance pour la dernière en France de Victor Wembanyama, avant l'envol du prodige pour la NBA, et probablement les San Antonio Spurs détenteurs du choix n°1 de la draft.

Les portes de Roland-Garros ont rouvert jeudi 15 juin 2023, mais pour une rencontre de basketball. (Franceinfo: sport)

Si 15 000 personnes sont venues garnir les tribunes du Chatrier, ce n'est pas seulement pour admirer les gestes de Wemby. En face, la Roca Team de Monaco comptait sur ce troisième match des finales de Betclic Elite pour soulever le titre, après ses deux victoires à domicile pour lancer les finales. Habitués des salles survoltées aux quatre coins de l'Europe, les Monégasques n'ont sans doute pas été déçus de l'accueil dans une arène chauffée à blanc, qui a tout fait pour que cette rencontre ne soit pas la dernière de Wembanyama en France. Ce qui a presque été réussi, puisque les Metropolitans ont mené les débats avant de s'écrouler à cinq minutes de la fin (85-92).

Un Rocher insubmersible

Le titre de champion de France de Monaco, personne ne s'en souciait vraiment, à vrai dire, aux abords des serres d'Auteuil. Mais tous rêvaient d'une victoire des Mets pour relancer ces finales, et assister à un match 4 samedi, toujours dans l'antre du tennis. Sur les coups de 18h30, il régnait d'ailleurs encore un parfum de Roland-Garros, que ce soit les affiches dans le métro, ou par la présence des derniers bénévoles attelés au rangement plus de quatre jours après la fin du Grand Chelem parisien. Pourtant, l'heure était bien au basket, comme le suggéraient les innombrables maillots de franchises de NBA qui "pèlerinaient" vers l'enceinte, sous le soleil de la fin d'après-midi. Mais, pour une fois, c'est un club hexagonal qui avait la cote : les Metropolitans 92. Avec, systématiquement, le même flocage dans le dos : le numéro 1 de Victor Wembanyama.

Après une saison à jouer dans la modeste salle Marcel-Cerdan à Levallois (2 800 places), et en dehors de deux rencontres disputées à Bercy, le club de l'ouest parisien a investi le court Philippe-Chatrier, métamorphosé en l'espace de trois jours, sous son toit fermé, la délicate terre battue ayant été recouverte d'un parquet. De l'ocre, il n'en restait que sur le mur attenant au Philippe-Chatrier, devant lequel de nombreux spectateurs, vêtus de maillots de basket, posaient : un parfait résumé de la soirée.

Sur le parvis de Roland-Garros, les maillots à l'effigie de Victor Wembanyama étaient légions, jeudi 15 juin 2023. (Franceinfo: sport)

Alors que le public investissait les allées, les plus déroutés étaient finalement les habituels suiveurs du championnat. Quelques confrères et consœurs étaient ainsi perdus dans les souterrains du Chatrier : "Comment on va au terrain ? C'est où les vestiaires ?". Au milieu, Victor, jeune reporter radio, souriait : "Au début de la saison, c'était déjà fou quand on était 20 à Marcel-Cerdan, mais là, c'est énorme. On est dans une autre dimension". À ses côtés, Sami, plume de l'Equipe, pesait ses mots : "C'est tout simplement, d'un point de vue du contexte, le plus grand match de l'histoire du championnat de France de basket". Si le record d'affluence pour un match de Betclic élite n'a pas été battu, le cadre et l'enjeu de ce Metropolitans-Monaco relevaient en effet de l'extraordinaire. Les yeux écarquillés de chaque personne pénétrant dans l'arène ne disaient pas le contraire.

Une salle, deux ambiances

Autre indice : la présence d'une équipe de la NBC, la chaîne américaine, en reportage dans les coulisses de la dernière soirée home sweet home pour Wembanyama. Même la TV japonaise était au rendez-vous, au milieu des 180 journalistes accrédités, soit autant que pour le dernier match de NBA organisé à Paris, c'est dire. Le gratin présent dans les tribunes, dont la ministre des Sports, témoignait aussi du prestige de l'affiche. La question qui restait en suspens, en revanche, c'était de savoir si l'ambiance serait au rendez-vous. “Il faut 15 000 supporters, et non 15 000 spectateurs, alors à nous de faire des choses qui permettent au stade de prendre feu", appelait Vincent Collet, l'entraîneur des Mets 92, avant la rencontre. Et il a été entendu.

Dès l'entrée des joueurs, le compteur de décibels a explosé, avec une victoire à l'applaudimètre pour Victor Wembanyama, évidemment. Son dunk pour lancer la soirée a fait rugir le public, qui a remixé un chant barcelonais dédié à Lionel Messi pour son "Wemby". Une ferveur volcanique qui tranchait avec la quiétude habituelle de Roland-Garros, même si l'on a retrouvé quelques "popopopoooo, olé!". Cette fois pas de silence, ni d'appel au calme de l'arbitre, ou des speakers. Le dernier quart-temps, qui a vu Monaco recoller avant de passer en tête pour la première fois, a frôlé l'hystérie collective, surtout quand Victor Wembanyama a, un temps, redonné de l'air aux siens.

Finalement, les Metropolitans se sont inclinés, mettant ainsi un terme à ces finales de Betclic Elite après trois défaites en autant de matchs. Monaco pouvait savourer son titre champion de France, et Boulogne-Levallois n'avait plus qu'à dire au revoir à son joyau, promis à un avenir brillant de l'autre côté de l'Atlantique. "Je ne me disais pas que c'était le dernier match car je voulais le gagner. Mais à la fin, franchement, c'était spécial. Je me dis qu'avec l'équipe de France, j'en jouerai d'autres en France. Surtout l'année prochaine [avec les JO]. Je me dis que ce n'est qu'un au revoir", a souligné le pivot ensuite.

Le géant français Victor Wembanyama tente un tir à trois points, lors du match 3 de la finale de la Betclic Elite entre Boulogne-Levallois et Monaco, le 15 juin 2023 au stade Roland-Garros. (ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP)

Le temps d'installer le podium pour les vainqueurs, quelques derniers chants venaient saluer "Wemby". À un coin du terrain, le probable futur joueur des Spurs de San Antonio observait les Monégasques soulever le trophée. Un regard en l'air, aussi, pour admirer une dernière fois le public venu lui souhaiter un bon voyage. Puis le géant des Mets a engouffré ses deux mètres vingt et un dans les vestiaires du Philippe-Chatrier. "J'ai l'impression de clore une partie de ma vie. Je suis fait pour ça, je n'ai pas d'inquiétude. Je savais que j'irais en NBA mais je sais aussi qu'il y aura des épreuves. Chaque défaite est plus une leçon qu'un échec. Si j'ai perdu aujourd'hui, je sais que ça me servira dans cinq ou dix ans", a pris date celui qui devrait s'installer dans le Texas à partir de cet été.

Les joueurs de Monaco profitent du sacre avec leurs familles, alors que les tribunes se sont rapidement vidées, jeudi 15 juin 2023. (Franceinfo: sport)

Victor Wembanyama n'a pas ajouté de titre de champion de France à son palmarès (il en a gagné un en 2022 avec l'Asvel), mais qu'importe, la fête a été belle. Et donne des idées à la Ligue de basketball, qui entend bien surfer sur la dynamique de cette saison historique (35% de rencontres à guichets fermés). Dans les entrailles de Roland-Garros, le directeur de la LNB, Fabrice Jouhaud, rêvait ainsi tout haut : “L’ambition de la Ligue, ça doit être de jouer au Parc des Princes, au Stade de France. On doit avoir l’envie de faire des choses comme ça. Il y a bien eu du hockey à Lyon… Ce qui s’est passé cette saison montre qu’on peut pousser un peu les murs, au sens propre, comme au sens figuré”. Vu l'engouement autour de lui jeudi porte d'Auteuil, Victor Wembanyama pourrait effectivement remplir un stade à lui seul. Après tout, le garçon n'a, paraît-il, aucune limite.

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