Moto GP : derrière Quartararo et Zarco, la relève française ronge son frein

Les deux pilotes français ont bouclé une saison de MotoGP contrastée, à Valence, dimanche. Mais aucun jeune Tricolore ne semble encore prêt à leur succéder.
Article rédigé par Othélie Brion
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4 min
Derrière Fabio Quartararo, champion du monde en 2021, peu de Français sont prêts à prendre la relève en Moto GP. (GIGI SOLDANO / STUDIO MILAGRO)

Pas de surprise. Le GP de Valence, dimanche 26 novembre, aura été à l’image de la saison des Français : en demi-teinte. Si Johann Zarco s’est une nouvelle fois illustré, terminant sa saison avec un cinquième podium et une cinquième place au championnat, Fabio Quartararo, champion du monde 2021, a dû se contenter d’une 11e place et d’une neuvième position finale au général. Entre les deux pilotes français, la hiérarchie s’est donc inversée cette saison, mais elle ne risque pas d’être chamboulée par un nouveau venu tricolore. Pour l’heure, la jeunesse bleue n’est pas encore au niveau.

Depuis 2019, les Français sont absents de l'antichambre de la catégorie reine : la Moto2, championnat du monde des motos de 765 cm3. Dans la catégorie inférieure, la Moto3 (moto de 250cc), Lorenzo Fellon est le seul représentant tricolore depuis 2021. Il a terminé l’exercice 2023 à la 27e place du classement général. “On n’a plus le vivier qu'on avait encore au milieu des années 2010, où on avait 4-5 pilotes français par catégorie, ce qui permettait d'en avoir au moins un qui se mette en avant", constate Alexis Masbou, ex-pilote de Moto 3 et actuellement en charge de l'équipe de France espoirs de moto auprès de la fédération française de moto (FFM). La présence en Moto2 ou Moto3 ne garantit pas, en outre, un passage en MotoGP. Par le passé, Louis Rossi, Jules Danilo ou encore Enzo Boulom en ont fait les frais.

Un manque de structures criant 

Pour l’ancien pilote de Moto 500cc, Régis Laconi, le constat est sans appel : "La relève française n'est pas prête". La faute à une filière vitesse, dans l’Hexagone, pas aussi structurée et compétitive que dans d’autres pays comme l'Italie ou l'Espagne. "Ces nations ont l’avantage d’avoir des structures qui ont de l’argent pour avoir suffisamment de matériel, gérer les déplacements, accompagner des jeunes. Il y a en plus un réel engouement pour la moto là-bas. L’Italie regorge de fabricants [Ducati, Gilera, MV Agusta entre autres]. En Espagne, il n’y a pas de marques, mais il y a la Dorna qui gère la MotoGP, ce qui aide", explique Régis Laconi. Dans une discipline onéreuse, la participation de sponsors et de la filière industrielle est un avantage encore peu développé en France.

Si le nombre de circuits de karting accessibles aux motos a doublé entre 2019 et 2023, avoisinant les 80 aujourd’hui, il en reste également toujours plus en Espagne et en Italie, et à un tarif plus attractif. Résultat, ce sont ces nations qui comptent le plus de pilotes en championnat du monde, peu importe la catégorie. 

Un tournant dans la stratégie de la fédération depuis 2019

Mais les temps sont en train de changer. À son arrivée à la tête de la FFM, en 2020, Sébastien Poirier, le président de la fédération, a fait le choix de mener une politique offensive en faveur de la jeunesse car "un sport est porté par ses champions. Il faut donc toujours travailler sur la relève". Parmi les chantiers principaux, l’homologation de circuits de karting et la création de huit championnats régionaux contre deux en 2019. "En rendant la moto plus accessible, on se donne les moyens d’avoir plus de pilotes, donc plus de chances d’avoir un jeune performant", estime-t-il. 

Le titre mondial de Fabio Quartararo en 2021 et les bons résultats de Johann Zarco en MotoGP ont aussi contribué à un engouement pour la discipline. "En 2022, on a franchi la barre des 100 000 licenciés et titres de participation [toutes spécialités confondues], un record. Cette année, on est déjà à 103 000", assure Sébastien Poirier.

Le vivier de pilotes se remplit et les jeunes à fort potentiel sont aussi plus encadrés. Depuis 2020, la fédération a mis en place deux groupes d’entraînement : l’un avec six jeunes entre 9 et 13 ans, l’autre avec six pilotes entre 11 et 15 ans. "Ce sont des jeunes que l’on sélectionne puis que l’on accompagne toute l’année, sur les compétitions, sur le plan médical…On organise également cinq stages sur la saison et des rencontres, notamment avec Johann Zarco, l’ambassadeur du programme", explique Alexis Masbou, en charge du groupe des 11-15 ans. 

La prochaine relève attendue à l’horizon 2026 

Trois ans après son lancement, ce nouveau système commence à porter ses fruits. "On est en train de rattraper notre retard. Il y a quelques années, la France était peu représentée dans les championnats d’Europe chez les jeunes [dont le plus prestigieux est le JuniorGP] et les résultats difficiles. Aujourd’hui, on a plus de pilotes et ils se mettent plus en valeur. Guillem Planques a par exemple décroché un top 5 en European Talent Cup", se réjouit l’entraîneur. Amaury Mizera a, lui, intégré la Redbull MotoGP Rookie Cup, un championnat réservé à de jeunes pilotes sélectionnés par la célèbre marque de boisson, auquel avait participé Johann Zarco en 2007. 


Pour voir ces jeunes pousses rouler en MotoGP, il faut tout de même s’armer de patience. "Les plus âgés devraient accéder à la Moto3 en 2026 car il faut maintenant avoir 18 ans pour être en Grand Prix contre 16 ans auparavant", rappelle Alexis Masbou. Comme quoi, finalement, la valeur peut attendre le nombre des années... 

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