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Testicule arraché, genou cassé, vertèbre fendue : ces sportifs qui ont bravé la douleur pour gagner

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7 min
La main gauche du tennisman Rafael Nadal, lors de son quart de finale de l'Open d'Australie contre Grigor Dimitrov, le 22 janvier 2014 à Melbourne.  (QUINN ROONEY / GETTY IMAGES)

Rafael Nadal, avec sa main crevassée comme le sol lunaire, est loin d'être un héros comparé aux intrépides, voire insconscients, que francetv info a retrouvés.

Depuis le deuxième tour de l'Open d'Australie, Rafael Nadal souffre d'une ampoule à la main gauche. Embêtant pour un tennisman. Encore plus quand on doit disputer une demi-finale contre son grand rival, ce qui est le cas de l'Espagnol, vendredi 24 janvier, qui doit affronter Roger Federer. "C'est surtout ennuyeux pour le service", explique Rafael Nadal, qui confie avoir peur de laisser échapper sa raquette sur chaque mise en jeu. Contre Grigor Dimitrov en quarts de finale, il n'a pu servir qu'à 170 km/h, un handicap à ce niveau de la compétition. Mais ce n'est rien à côté de ce que d'autres champions ont pu endurer. Vraiment rien. 

Gagner la Cup avec une vertèbre fracturée, c'est possible

Bert Trautmann restera à tout jamais dans l'histoire du football anglais. Ce qui n'était vraiment pas gagné au départ. Ce parachutiste nazi capturé par les Anglais pendant la deuxième guerre mondiale n'est pas le bienvenu quand il signe à Manchester City, en 1949, pour occuper le poste de gardien de but. L'importante communauté juive de la ville organise une manifestation le jour de son arrivée, et les "Heil Hitler" ironiques fusent dans les gradins lors des déplacements. Il faut une intervention du rabbin de Manchester pour que la colère s'apaise, raconte le Guardian (en anglais)

Mais un match va changer son statut du tout au tout. En ce jour du printemps 1956, Manchester City rencontre, en finale de la Coupe d'Angleterre, la prestigieuse Cup, Birmingham City. A 16 minutes de la fin, Trautmann se jette dans les pieds de l'attaquant adverse Peter Murphy (à 49' sur la vidéo). Sur le moment, il ressent une vive douleur au cou, mais reste sur le terrain. Pas le choix, les remplacements ne sont pas encore autorisés. Trautmann effectue deux arrêts décisifs, et joue un rôle crucial dans la victoire de son équipe 3-1. Quand il se penche pour recevoir sa médaille des mains de la Reine, des témoins remarquent l'inclinaison bizarre de son cou.

Ce n'est que quelques jours plus tard qu'il passe des examens. Verdict : une de ses vertèbres cervicales s'est fendue en deux, et s'est tassée sur une autre. Un autre choc pendant la rencontre aurait pu lui être fatal : "J'ai vraiment eu de la chance. Les chirurgiens m'ont dit que j'aurais pu finir paralysé."

Décrocher la médaille d'or avec un genou cassé, c'est possible

Shun Fujimoto fait partie de l'équipe de gymnastique japonaise aux JO de Montréal, en 1976. Grosse pression sur les Nippons, qui détiennent le titre olympique de la spécialité depuis 1960. Lors du concours au sol, l'athlète se fracture le genou. Il lui reste pourtant la redoutable épreuve des anneaux à passer. "J'ai ressenti une douleur terrible dans la jambe, se souvient Fujimoto dans un documentaire diffusé sur la chaîne japonaise TBS. Mais j'ai essayé de ne rien montrer. Je ne voulais pas que les juges voient que j'étais diminué. Je devais le faire, pour l'équipe."

Malgré la douleur, Fujimoto réalise le concours parfait, et obtient la note de 9,7/10, le meilleur résultat de sa carrière. Lors de son saut final, sa jambe se tord un peu, mais le gymnaste serre les dents. Il vient de se rompre un ligament à l'atterrissage : "J'ai ressenti comme un coup de couteau." Le Japon décroche la médaille d'or par équipes, d'un cheveu, devant l'URSS. Mais quand Sports Illustrated (en anglais) demande à Fujimoto s'il referait, avec le recul, pareil sacrifice, sa réponse fuse : "Non, pas question !" Il faut dire que son genou le fait toujours souffrir...

Conquérir le titre NBA malgré une pizza empoisonnée, c'est possible

Finale de NBA 1997. Les redoutables Chicago Bulls de Michael Jordan, Dennis Rodman et Scottie Pippen affrontent les Utah Jazz, auteurs d'une saison impressionnante. Trois heures avant le cinquième match (la finale du tournoi de basket américain se disputait en sept manches à l'époque), Michael Jordan est cloué au lit, en position fœtale, ruisselant de sueur. "Je ne l'avais jamais vu comme ça, il avait l'air mal, très mal", se souvient Pippen. Jordan prend tout de même la décision de jouer. Lors du premier quart-temps, il manque de s'évanouir sur le parquet. Au fil du match, la forme revient, et Jordan termine la rencontre avec 37 points au compteur, dont le tir à 3 points, en toute fin de rencontre, qui donne la victoire à son équipe. "C'est là qu'on voit que c'est le plus grand joueur de tous les temps", s'enthousiasme Pippen.

Le basketteur Michael Jordan sur le banc des Chicago Bulls lors du 5e match de la finale de la NBA contre Utah Jazz, à Salt Lake City (Etats-Unis), le 11 juin 1997. ( REUTERS)

Quinze ans plus tard, on ne sait toujours pas ce qui a mis Jordan dans cet état. La thèse de la pizza pas fraîche ou empoisonnée tient la corde, à en croire le témoignage de Tim Grover, l'entraîneur personnel d'"Air Jordan", cité par USA Today (en anglais) : "C'est le seul à en avoir mangé." Mais le coach des Bulls de l'époque, Phil Jackson, a incriminé sur ESPN le mal des montagnes, Salt Lake City, où se jouait le match, se trouvant à une altitude moyenne de 1 320 mètres. Et pour le moment, c'est "the Jordan flu", la grippe de Jordan, qui est resté pour qualifier cet incident.

Remporter le Superbowl avec une gueule de bois épouvantable, c'est possible

Max McGee n'est qu'un remplaçant dans l'équipe des Green Bay Packers qui va disputer le Superbowl 1967. La veille, certain de cirer le banc pendant le match au sommet du football américain, il décide d'aller boire. Beaucoup. Trop. Paul Hornung, qui partageait sa chambre avec McGee, reçoit un coup de fil en fin de soirée. McGee, manifestement ivre, est aussi en galante compagnie : "Tu ne peux pas t'imaginer à quel point ces filles sont mignonnes !", lui lance McGee pour tenter de le convaincre de le rejoindre. Hornung refuse, il se marie dans trois jours. McGee regagne sa chambre, en piteux état, à 4 heures du matin. 

Lors du Superbowl, ce qui devait arriver arriva : le titulaire, Boyd Dowler, se blesse. McGee entre en jeu. Enfin, essaie. Dans les vapes, il ne trouve pas son casque sur le bord du terrain, et prend le premier qui lui tombe sous la main. Il entre, se lance à l'assaut de l'en-but adverse... et marque le premier touchdown du match ! Les Packers l'emportent 35-10, et McGee, dont l'histoire a fuité dans la presse, devient une légende. 

Etre l'un des meilleurs joueurs de base-ball de l'histoire avec de l'arthrite, c'est possible

Sandy Koufax fait partie des meilleurs joueurs de l'histoire du base-ball américain quand un médecin lui diagnostique, en 1964, de l'arthrite traumatique au niveau du coude. Malgré ce handicap, Koufax continue à être le meilleur au lancer et à la batte. 

Mais sa vie de sportif devient un enfer : "Son coude était rempli de cortisone plusieurs fois dans la saison. Son estomac était toujours nauséeux à cause du cocktail d'anti-inflammatoires qu'il ingurgitait avant chaque match. Il trempait son coude dans un bain de glace 30 minutes avant chaque rencontre, le bras protégé des engelures par une coudière. Et malgré ça, son bras gonflait", écrit Sports Illustrated (en anglais) en 1999. Koufax raccroche au sommet de sa gloire, vaincu par la douleur et le risque de perdre l'usage de son bras, fin 1965.

Remporter le Mondial de rugby après avoir eu un testicule arraché, c'est possible

La pire de toutes les blessures revient au rugbyman All Black Wayne Shelford. En 1986, lors d'un match contre la France, tellement violent qu'il sera surnommé "la bataille de Nantes", les Tricolores, survoltés, offrent un traitement de choix au troisième ligne néo-zélandais, qui n'y laisse pas que quelques dents.

Shelford raconte la suite sur ESPN (en anglais) : "Je crois que le Français Daniel Dubroca tente de m'arracher le ballon des mains en donnant un coup de pied, me tapant à l'aine. Sur le coup, ça m'a fait très mal, mais je n'y ai pas prêté d'importance. Ce n'est qu'en sortant du terrain, à la 60e minute de jeu, que je me rends compte que mon scrotum a été éventré et que mon testicule pend 10 centimètres en dessous. Le médecin de l'équipe m'a remis ça en place et a recousu. C'est juste une blessure liée aux rigueurs de notre sport chéri, le rugby." L'année d'après, les All Blacks ne font qu'une bouchée de la France en finale de la première Coupe du monde...

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