: #EtAprès Quel avenir pour le sport ? "Le sport comme outil thérapeutique", l'appel de Stéphane Diagana
Vous êtes signataire d'une tribune dans le JDD sur l'importance d'investir dans le sport-santé. Quel est l'enjeu lorsque la crise du covid sera passée ?
Stéphane Diagana : "La crise m'a interpellé car le réflexe a été de dire : 'on n'a pas assez de lits de réanimation'. Mais on ne s'est pas posé la question de la prévention de ces malades chroniques qui sont les plus touchés par le covid (malades présentant des comorbidités ndlr.). Sans aller jusqu'à une prise en charge au préalable de leur condition physique, si seulement on avait suivi ces personnes d'un point de vue de la nutrition, par exemple, peut-être que ces 5000 lits de réanimation auraient suffi. Je comprends la détresse des soignants, et la question qui se pose désormais c'est : "Où doit on investir ? Il faut mettre l'argent dans le sport-santé".
Que préconisez-vous ?
SD : "Je travaille depuis une dizaine d'années sur la question du sport-santé. Je suis co-initiateur des "As du cœur", un programme qui mesure l'impact médico-économique d'une intervention thérapeutique auprès de patients coronariens et qui a donné lieu a des études et des publications. Il y a un intérêt thérapeutique pour les malades et il y a un enjeu préventif pour éviter des maladies. L'activité physique thérapeutique est retenue par la haute autorité de santé depuis une dizaine d'années. Il y a désormais une reconnaissance de ce soin qui reste à mettre en œuvre. Mais il ne faut pas faire tout et n'importe quoi car c'est dangereux. Et puis ce n'est pas efficace car si vous demandez à un patient d'arrêter de fumer du jour au lendemain, il ne va pas le faire. Il faut trouver le bon sport, la bonne fréquence, c'est comme un médicament."
"C'est intolérable d'imaginer que des gens doivent payer des programmes de remise en forme 100 ou 120 euros car c'est du domaine du thérapeutique"
Comment faire ?
SD : "Depuis mars 2017, les médecins peuvent prescrire la prise en charge thérapeutique des patients pour faire du sport mais il n'y a pas de suivi et d'encadrement pour le moment. Aussi, les offres vont différer en fonction du niveau social du patient et de ses connaissances. L'idée c'est d'éviter une inégalité d'accès aux soins. Il y a des enjeux de formation des médecins à la prescription, à l'encadrement et au déploiement sur le territoire. Le sport est un outil thérapeutique. C'est l'enjeu de cette tribune. "
C'est un programme qui existe déjà dans des centres de rééducation ou de réadaptation...
SD : "On a des offres de ce type dans des établissements de rééducation, dans des centres de soins de suite et de réadaptation mais on garde les gens trois semaines avec un encadrement et on vous dit de continuer après. Mais il manque ce suivi sur le long terme. De surcroît, quand on a quelqu'un qui n'a pas les moyens de se payer les cours de fitness ou autre, la difficulté sera plus grande de continuer. C'est intolérable d'imaginer que des gens doivent payer ces programmes 100-120 euros car c'est du domaine du thérapeutique. Il est urgent de mettre en place des études médico-économiques qui montrent l'importance de ces aides".
Économiquement parlant, est-ce un système viable ?
SD : "On a un vrai potentiel pour améliorer la santé des Français et par la même occasion soulager les comptes de l'assurance-maladie. Car beaucoup d'hôpitaux prennent en charge des patients qui ont des maladies chroniques liées au manque d'activité. Et ils restent longtemps dans ces établissements ce qui pèse très lourd sur les comptes. Si on agit, tout de suite on va recueillir les fruits. On va créer aussi de l'emploi".
Une centaine de "maisons sport-santé" ont vu le jour en 2020, est-ce là aussi l'occasion de développer ce processus de suivi ?
SD : "Avec cette mission de maison sport-santé, on permet l'évaluation de la condition physique, l'orientation et la mise en œuvre de la pratique éventuelle. On peut penser que des gens au niveau local peuvent après permettre cette mise en place. On voit aujourd'hui que ça n'existe pas. Il y a cette nécessité, car les malades chroniques représentent 11 millions de personnes. Il y a un manque de savoir-faire physique, psychologique. Les clubs sportifs ne sont pas adaptés à ça. Il faut évidemment évaluer ces pratiques. Mais on peut être assez confiant car on commence à comprendre beaucoup de choses sur le corps humain et ça va nous aider à mieux le garder en bonne santé. Les choses avancent."
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