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Roland-Garros 2023 : recyclage des balles de tennis, le rebond écologique

Le tennis est l’un des sports les plus polluants. Un constat écologique qui s’explique en grande partie par l’utilisation effrénée de petites balles jaunes.
Article rédigé par Luc Sares, franceinfo: sport, Baptiste Royer
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
C'est plus de 50 000 balles qui sont utilisées pour chaque édition de Roland-Garros. (MATTHIEU MIRVILLE / AFP)

“Changement de balle ramasseurs, s’il vous plaît. Balles neuves”. Cette petite rengaine, les spectateurs de Roland-Garros la connaissent bien. Après les septs premiers jeux, puis tous les neuf jeux, l’arbitre ordonne le changement des six balles utilisées lors d’un match. Lors du premier tour de Gaël Monfils, ce sont donc pas moins de 36 balles qui ont été frappées pour ce seul match. Et, au total, plus de 50 000 balles sont consommées pendant la quinzaine de Roland-Garros. 

Des chiffres qui donnent le tournis et dont l'ampleur s'explique par une raison très simple: la durée de vie extrêmement courte des balles jaunes. “Les joueurs professionnels doivent changer de balles quasiment toutes les heures car ils frappent tellement fort que le feutre s’use très rapidement”, explique Gregory Merguerian, co-fondateur de Bounce, une start-up à l’origine de plusieurs produits visant à rendre le tennis plus écologique.

Les joueurs amateurs, bien que plus cléments avec leurs balles, sont eux aussi amenés à les changer très fréquemment. “Les balles neuves sont maintenues sous pression. Une fois sorties de leur emballage d’origine, elles perdent en pression et doivent être remplacées après quelques heures de jeu, assure Gregory Merguerian, et ce même si le feutre reste intact ”. En France, 17 millions de balles jaunes sont utilisées chaque année par l’ensemble des pratiquants. Des balles composées majoritairement de caoutchouc qui se retrouvent totalement obsolètes et qui mettent en moyenne 2500 ans à se dégrader naturellement.

L’Opération Balle Jaune encore perfectible

Face à ce défi environnemental, la Fédération française de tennis s’est emparée du dossier et a donné naissance en 2009 à l’Opération Balle Jaune. Une initiative invitant les licenciés à déposer leurs balles usagées dans des boîtes en carton installées dans les clubs. Les balles sont ensuite collectées, rapatriées dans un centre de broyage et transformées en granulats de caoutchouc. Une matière qui est utilisée dans la réalisation de sols d’infrastructures sportives comme des terrains multisports ou des aires de jeux. Une opération que Nathalie Dechy, notamment demi-finaliste de l'Open d'Australie en 2005 et marraine de l’opération depuis 2016, qualifie de “boucle vertueuse”.

Une “boucle vertueuse” qui reste perfectible. D’abord parce que les procédés de recyclage utilisés par la fédération sont complexes et coûteux mais aussi parce que le nombre de balles recyclées chaque année - 1,3 million en moyenne - constitue seulement une fraction du nombre de balles utilisées par les pratiquants. Pour limiter l’impact environnemental du tennis français, la fédération peut cependant compter sur l’ingéniosité d’autres acteurs.

Des balles usagées au service des danseurs de ballet

Installé dans le Vaucluse, Loïc Durand a su mettre à profit les balles de tennis au service du confort et de la performance des danseurs de ballet. En 2001, cet ingénieur fonde son entreprise Spectat après avoir breveté son plancher de danse composé de balles jaunes qui équipe désormais plus de 250 salles en France et à l’étranger.

Jusqu’en 2022, l’entreprise produisait ses planchers de danse exclusivement à partir de balles neuves car “acheter toujours le même modèle, c’est avoir la garantie que tous les paramètres (la souplesse et l'amortissement) restent les mêmes” souligne son fils Arthur qui l'accompagne dans cette aventure familiale. Mais il y a un peu plus d’un an, le fournisseur de Spectat leur annonce une pénurie de balles, pandémie oblige.

S’ensuivront six mois de recherche et développement et plusieurs essais en partenariat avec le ballet de l’Opéra d’Avignon pour obtenir un plancher tout aussi confortable pour les danseurs, mais composé exclusivement de balles recyclées. “On est maintenant capable de recycler 30 000 balles usagées par an à la ligue de tennis de Provence”, assure Arthur Durand. Un chiffre qui ne représente pourtant pas plus de 10% des balles recyclées annuellement dans la région PACA.

"Multiplier la durée de vie des balles par trois"

Rendre le tennis plus écoresponsable n’implique pas seulement de mieux prendre en compte le recyclage des balles, mais aussi de trouver des solutions pour augmenter leur durée de vie et ainsi limiter la quantité de déchets. Un défi que se sont également lancé les fondateurs de Bounce.

Avec ses deux associés, Antoine Wouters et Maxime Sohet, Gregory Merguerian a fondé une entreprise reposant sur la création d’un tube muni d’une pompe qui permet de recréer un environnement pressurisé pour des balles qui ont déjà été utilisées. “Grâce à ce procédé, les balles gardent la pression bien plus longtemps. Ça permet de multiplier leur durée de vie par trois”, affirme Gregory Merguerian.

Une solution proposée aux particuliers mais également aux clubs désireux de réduire leur impact environnemental avec une version adaptée. “On a développé une cuve pouvant contenir jusqu’à 400 balles qui fonctionnent selon le même procédé. La seule différence c’est que la pompe manuelle est remplacée par un compresseur bien plus puissant” explique l'entrepreneur. Une solution écologique parmi d’autres pour les 7 000 clubs affiliés à la FFT.

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