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A quel prix Rio a obtenu les jeux Olympiques ?

Le 2 octobre 2009, Rio devenait la première ville d'Amérique du sud désignée hôte des JO d'été. Mais combien a coûté la victoire et le vote des membres du CIO ? Huit ans après, les flux d'argent et les courriels sont remontés à la surface, et il ne reste que de lourds soupçons de corruption.
Article rédigé par franceinfo
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Longtemps dans l'ombre, Papa Massata Diack est devenu un personnage incontournable des affaires qui secouent le sport depuis deux ans. Figure centrale du scandale de corruption à la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF), sur fond de coureurs russes dopés, le Sénégalais (52 ans) est aussi dans le viseur des justices française et brésilienne qui enquêtent sur l'attribution des jeux à la cité carioca. Avec une question: l'ancien consultant marketing de l'IAAF a-t-il usé de l'influence de son père, Lamine Diack, président de cette fédération et membre du Comité international olympique (CIO), pour s'enrichir ? L'opération anticorruption "Unfair play" conduite début septembre au Brésil, et les courriels saisis par les enquêteurs, dont l'AFP a eu connaissance, ont considérablement alourdi les soupçons.

Depuis plusieurs mois, la justice française, compétente parce que des fonds ont pu être blanchis sur son territoire, disposait d'indices. D'une part, les magistrats du parquet national financier (PNF) ont entendu aux Etats-Unis, en juin 2016, un ancien membre du Comité olympique brésilien (COB), Eric Walther Maleson. Ce dernier avait mis en cause le président du COB et patron du comité d'organisation des Jeux de Rio, Carlos Nuzman, en confiant avoir appris que des pots-de-vin avaient été versés pour toucher le graal olympique. Mais Maleson, qui a des comptes à régler avec Nuzman, "ne semble pas avoir connaissance des flux", nuance une source proche de l'enquête.

2 millions de dollars trois jours avant le vote

En revanche, la justice française avait mis la main sur deux virements, pour 2 millions de dollars, qui avaient atterri le 29 septembre 2009, soit trois jours avant le vote du CIO, sur des comptes de Papa Massata Diack ou d'une de ses sociétés, à Moscou et à Dakar. L'argent provenait de la société Matlock Capital, derrière laquelle se trouve un entrepreneur brésilien, Arthur Soares, dit le "Roi Arthur", connu comme un proche de l'ancien gouverneur de Rio Sergio Cabral, déjà condamné à 14 ans de prison pour corruption.

Pour quels services "PMD" a reçu deux millions de dollars de Matlock Capital ? Le Sénégalais, qui vit à Dakar, où il n'a jamais pu être interrogé par la justice française, n'a pas souhaité répondre à l'AFP. Seule certitude, avant et après le vote des membres du CIO, où la cité carioca avait battu Madrid au 3e tour (66 voix contre 32), Papa Massata Diack a bien eu des échanges avec l'équipe de Rio, selon plusieurs courriels saisis par les enquêteurs brésiliens. Parmi les destinataires des messages, dont certains figurent dans l'acte d'accusation du parquet de Rio, Carlos Nuzman et le directeur général des services marketing du COB, Leonardo Gryner.

Ainsi, Papa Massata Diack rappelle à plusieurs reprises qu'il attend des paiements, comme dans ce courriel du 19 décembre 2009 destiné au cabinet de la présidence du Comité olympique brésilien, où il évoque la somme de 450.000 euros. Deux jours plus tard, il s'adresse directement, en Anglais, à Carlos Nuzman, le "Mr JO" de Rio, pour lui demander son "aide". "Nous avons fait face à toute sorte de problèmes de la part de ceux qui nous ont donné leur engagement à Copenhague", où a eu lieu le vote, écrit-il.
Le 6 janvier, il se félicite de la réception de 50.000 et 60.000 dollars sur un compte à Dakar mais attend toujours un solde de 340.000 euros. "Transmettez au président que j'attends toujours la finalisation du processus car je reçois davantage de pressions de mes amis", insiste-t-il le 31 janvier 2010, avec Carloz Nuzman en copie.

Les Diack visés par l'acte d'accusation

Dans une audition citée par l'acte d'accusation brésilien, Leonardo Gryner a confié qu'à l'occasion des championnats du monde d'athlétisme à Berlin, en août 2009, Lamine Diack lui avait bien présenté son fils, en lui demandant de traiter avec lui pour parrainer des événements au Brésil. Une version qui semble accréditée par un courriel de Gryner à Papa Massata Diack le 10 septembre 2009: "nous sommes prêts à envoyer une lettre d'intention à l'IAAF, à propos des Relays Challenge IAAF 2010-2012". Gryner a ajouté qu'aucun événement de ce type n'a finalement été organisé. Les trois éditions des World Relays, nés en 2014, ont eu lieu aux Bahamas.

Au Brésil, Nuzman, Gryner et Cabral ont été inculpés pour leur participation au réseau de corruption, tandis que les Diack père et fils sont formellement visés par l'acte d'accusation. En France, l'affaire a rattrapé l'ancienne star namibienne du sprint Frankie Fredericks, mis en examen pour corruption passive. La justice a découvert qu'une société, Yemi Limited, derrière laquelle se trouve l'ancien athlète, a reçu le 2 octobre 2009 un virement de 299.300 dollars d'une société de PMD, Pamodzi Consulting. A Copenhague, Fredericks était scrutateur pour le CIO quand Rio a obtenu les jeux. Les investigations montrent aussi que ce jour-là, environ 130.000 dollars sont partis de Pamodzi vers des boutiques de joaillerie à Paris.

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