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Reportage JO 2022 : le dernier show de Shaun White

L’immense star du snowboard a terminé son aventure avec les Jeux sur une 4e place au halfpipe, vendredi. 

Article rédigé par Xavier Richard, franceinfo: sport - De notre envoyé spécial à Zhangjiakou
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Le triple champion olympique américain Shaun White a quitté les JO sur une 4e place au halfpipe, vendredi 11 février. (BEN STANSALL / AFP)

Le tube n’était pas à moitié vide ce vendredi 11 février. Il était même plutôt plein pour les adieux de Shaun White, star planétaire bien au-delà du milieu du snowboard. Une dernière sortie en mondovision tout en haut du Genting Snow Park. Au coeur de Jeux sans ébullition, l’occasion était trop belle pour prendre une grosse bouffée d’émotions. 

Depuis l’annonce de la participation du triple champion olympique américain, la finale du halfpipe avait été cochée sur le calendrier. "Je le place au même niveau que les Kelly Slater, Tony Hawk, Tiger Woods ou Michael Jordan", glisse Mathieu Crépel, snowboardeur professionnel et consultant pour France Télévisions. Entre White et le Pyrénéen, c’est une longue histoire. Des duels épiques au début de leur carrière avant l’envol de l’Américain à une altitude irréelle. "Je suis ému car on a commencé quasiment ensemble", reprend Mathieu Crépel. "On nous a beaucoup comparé car on s’est tiré la bourre chez les juniors. Lui était "drivé" par le fait de marquer l’histoire dans le halfpipe." 

Snow, skate et rock’n roll

L’empreinte qu’il laisse est unique : treize médailles d’or en snowboard aux Winter X Games (personne n'a fait mieux depuis), deux autres en skate aux Summer X Games et trois titres olympiques. Shaun White, qui dispose d’un jeu video à son nom, cumule les talents, et les surnoms : "Red Zepellin" (il est guitariste du groupe Bad Things avec qui il a joué dans le festival de Lollapalooza), "Flying Tomato" (tomate volante, en français). "Pourquoi on l’appelle comme ça ? ", demande Manon Petit-Lenoir, snowboardeuse française venue en spectatrice voir la légende tirer sa révérence. "C’est parce qu’il est roux", répond du tac au tac Loan Bozzolo, snowboard français incollable sur son idole. Elémentaire. Et accessoirement, Shaun White défie les lois de la gravité.

L'Américain Shaun White lors de son 3e run du halfpipe des JO de Pékin, vendredi 11 février. (TAKETO OISHI / YOMIURI)

Comme de nombreux athlètes et médias, Loan Bozzolo s’est levé tôt pour les trois derniers runs olympiques de Shaun White ce vendredi 11 février. "On est venu ici parce qu’on est passionné de snowboard depuis tout petit", explique le Haut-Savoyard. "C’est beau de voir l’évolution de notre sport. Shaun White nous a tous inspirés. Petit, j’étais allé aux X-Games de Tignes et j’avais fait un "check" à Shaun White. J’y ai souvent pensé dans ma vie. Ça m’a motivé à continuer le snow. Dans tout ce qu’il fait, c’est une machine. Il s’est donné les moyens pour arriver là où il est. C’est un monstre."

Une machine redevenue humaine

Un monstre de 35 ans qui vole encore - pour quelques minutes - la vedette à la jeune génération. Dans le halfpipe, c’est un âge canonique, surtout quand on a surmonté une rare malformation cardiaque congénitale qui a nécessité deux opérations à coeur ouvert avant l'âge d'un an et de multiples blessures pendant sa carrière. Le Californien en a encore les stigmates, comme les 62 points de suture qu'il porte au visage depuis une chute en octobre 2017.  Son dernier défi olympique est de loin le plus difficile. "Il a dû lutter pour se qualifier, ça l’a rendu beaucoup plus humain alors que pendant des années, c’était la machine Shaun White", approuve Mathieu Crépel qui nous décrit un athlète à contre-courant du milieu, trop tourné vers la victoire pour se faire des amis. 

Comme en qualifications, White doit sortir le grand jeu pour concurrencer le Japonais Ayumu Hirano et l’Australien Scotty James. L’ambiance monte d’un cran quand il s’élance pour son premier run sur un gros son de guitare. Quelques "ooooh" se font entendre dans le public mais ses cinq tricks ne sont crédités que d’un 72,00. Pourtant, il fait le show comme à la belle époque. Son deuxième run est le plus abouti (85,00) et le place en deuxième position provisoire avant les nouveaux cadors de la discipline. White ne fait plus sauter la banque mais en bas, c’est la course au "check" avec l’idole. Pour accrocher le podium, il faudrait tutoyer les 90. En est-il encore capable sur un troisième run ? "On va voir ce qu’il va nous réserver", s’impatiente Loan Bozzolo. "Ça va être compliqué. Déjà d’être dans les cinq c’est un truc de fou."

Tomate aux yeux rouges

Quand il s’élance une dernière fois, le public retient son souffle. Un court moment d’histoire à 1440 degrés. Trop court puisque le Californien tombe après deux tricks de haute volée. Avant le début du reste de sa vie, Shaun White retire son casque et descend le demi-tube sous l’ovation du public. Des applaudissements nourris et bientôt des larmes bien moins artificielles que la neige du Genting Park. La tomate a les yeux rouges. "Il y avait de l’émotion et énormément de respect de la part de tous les riders, des staffs", a savouré Crépel qui est tombé dans les bras de son pote en zone mixte. "Tout le monde avait les yeux qui brillaient. C’était un beau moment. "

Toutes les bonnes choses ont une fin, Shaun White, la légende américaine du snowboard a effectué son dernier run à Pékin dans un concours où il s'est classé au pied du podium. Une séquence émotion à ne pas manquer où l'Américain n'a pas pu retenir ses larmes.
Snowboard halfpipe (H) : la légende Shaun White en larme après son ultime run Toutes les bonnes choses ont une fin, Shaun White, la légende américaine du snowboard a effectué son dernier run à Pékin dans un concours où il s'est classé au pied du podium. Une séquence émotion à ne pas manquer où l'Américain n'a pas pu retenir ses larmes.

Avant sa tournée médiatique, White a vibré en suivant les trois derniers runs, célébrant les trois triple cork du Japonais Ayumu Hirano, son dauphin à PyeongChang et vainqueur du plus beau concours de l’histoire. "Trois sur cinq, ce n'est pas mal", a réagi l’Américain. "Ces jeunes riders ont été sur mes talons tout ce temps-là. Les voir enfin me surpasser c'est, je pense, ce que j'ai toujours voulu au fond de moi: être enfin battu pour pouvoir partir sans me dire 'j’aurais pu le faire'". Le dieu du snowboard s’en est allé. Un adieu de l’Olympe.

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