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Paris 2024 - Petites histoires des Jeux : Karoly Takacs, droitier et double champion olympique en tirant de la main gauche

Article rédigé par Julien Lamotte, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un portrait commémorant le titre olympique de Karoly Takacs aux JO de 1948 à Londres. (MICK BAKER / FLICKR)
À l'occasion des Jeux de Paris 2024, franceinfo : sport vous plonge dans ces petites histoires qui ont fait la grande histoire olympique. Privé de sa main droite après un accident, Karoly Takacs n'a pas tiré un trait sur ses rêves d'or.

Si, pour tout le monde, passer l'arme à gauche signifie mourir, pour Karoly Takacs il s'agirait plutôt d'une renaissance. Voici l'histoire extraordinaire d'un homme revenu de tout, de l'injustice du régime militaire, d'un terrible accident et d'une guerre mondiale, pour finalement décrocher deux médailles d'or olympiques au tir au pistolet... avec sa "mauvaise" main ! 

Karoly Takacs est né à Budapest en janvier 1910. Très vite le jeune homme se tourne vers l'armée où il se découvre un don rare dans l'exercice du tir. Il suscite rapidement l'admiration de ses camarades et de ses supérieurs, tous surpassés par la précision et la sûreté de son geste. Tout naturellement à l'époque, il est fortement pressenti pour représenter la Hongrie aux Jeux olympiques de 1936.

Mais il va se heurter à un obstacle contre lequel son talent ne peut rien : l’implacable hiérarchie des régimes militaires. Même si le sergent Takacs est le meilleur, et de loin, il doit laisser sa place à un plus haut gradé que lui pour participer aux JO de Berlin. Inutile de dire que le supérieur ne fit pas d'étincelles à cette occasion. 

Conscients de cette aberration, les dirigeants magyars suppriment cette disposition injuste et libèrent la voie à leur jeune sergent prodige en vue de la prochaine édition des JO qui doit se tenir à Tokyo en 1940. Hélas pour le tireur d'élite, ce dernier est victime d'un terrible accident lors d'un exercice militaire : une grenade défectueuse lui arrache littéralement la main droite ! S'il survit à ce coup du sort, c'en est évidemment fini de sa carrière sportive. Sauf que non. Karoly Takacs est aussi naturellement doué qu'il est obstiné : dans le plus grand secret, il apprend donc à tirer de la main gauche ! Et que pensez-vous qu'il soit advenu ? 

"L'homme à la main d'or"

Le génie ne s'arrête pas à une histoire de gauche ou de droite. Le génie n'a pas de sens, il n'a pas de préférence. Un an plus tard, en 1939, Takacs est champion national en individuel et champion du monde par équipes. Son heure olympique a enfin sonné... enfin, elle aurait dû. La Seconde Guerre mondiale en décide autrement.

Le Budapestois réussit peut-être l'exploit de sa vie : survivre à la plus grande boucherie de l'histoire de l'humanité et aux purges de l'armée hongroise. Ayant franchi tous ces obstacles à force de courage, Takacs peut enfin toucher son rêve du doigt. Douze ans après le premier rendez-vous olympique auquel il aurait dû participer, il représente enfin son pays aux JO de Londres en 1948. 

Ce qui se passe dans la capitale anglaise confirme ce que l'on pressentait : cet homme n'est pas comme les autres. Avec un pistolet à feu rapide et aux 25 mètres, sa discipline de prédilection, il pulvérise le record du monde de dix points ! À 38 ans, il vient de prendre une revanche éclatante sur le sort et l'injustice. Takacs, tellement au dessus du commun des mortels, parviendra même à conserver son titre quatre ans plus tard à Helsinki. De cette époque, il ne reste aujourd'hui que cette histoire digne des studios d'Hollywood et un surnom, éternel, pour rappeler qui était Karoly Takacs : "l'homme à la main d'or". 

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