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Portrait Mondiaux de paracyclisme : à 50 ans, l'inépuisable Riadh Tarsim remet son titre en jeu à Glasgow

Double champion du monde en titre de la course en ligne, le Français remet en jeu son maillot arc-en-ciel vendredi, lors des Mondiaux de para cyclisme à Glasgow. Franceinfo: sport l’a suivi dans sa préparation.
Article rédigé par Luc Sares
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
Riadh Tarsim lors de la première manche de Coupe de France à Longchamp, le 25 mars 2023. (Luc Sares / Franceinfo: sport)

Les mains sur le pédalier, Riadh Tarsim accélère son geste. Allongé sur son tricycle, cela fait une quarantaine de kilomètres qu’il appuie sur les pédales et la ligne d’arrivée se profile enfin. En cette fin du mois de mars, au bord de l’hippodrome de Longchamp, les supporters attendent avec impatience leur chouchou pour cette première manche de Coupe de France. Maillot arc-en-ciel sur le dos, le double champion du monde de handbike en catégorie H3 (paraplégie sans mobilité volontaire du tronc) apparaît enfin suivi par deux de ses concurrents. Comme souvent dans une arrivée au sprint, le coureur du Stade Français franchit la ligne en premier.

À quelques mètres de la ligne d’arrivée, Nelly Boitard, la vice-présidente du club francilien, qui le connaît depuis de nombreuses années, ne peut retenir son admiration. "Ce qui m’impressionne le plus chez lui c’est sa bonne humeur mais aussi sa hargne, il est sûr de lui et il donne la pêche." Un caractère qui attire la sympathie de la petite famille du handisport présente à cette course. Ici, tout le monde le connaît et il connaît tout le monde. Sur son fauteuil, le champion salue chaleureusement tous ses adversaires. Dans sa tête, il se projette déjà vers ses prochaines échéances : la course en ligne des Mondiaux de paracyclisme, vendredi 11 août, avant les Jeux paralympiques à domicile d'ici un an.

"Je dois d’abord garder mon titre de champion du monde en août et après je pourrai enfin dire : je vous attends à Paris."

Riadh Tarsim, double champion du monde de paracyclime en catégorie H3

à franceinfo: sport

Sa mère qui est venue le voir l’embrasse avec émotion. L’année prochaine, elle espère le voir lever les bras et remporter le dernier métal qui lui manque. L’or paralympique.

De boxeur à sprinteur

Dans un peu plus d’un an, le coureur du Stade Français abordera les Jeux paralympiques avec l’unique objectif de gagner. Considéré comme le meilleur sprinteur du monde, le Français a remporté les deux derniers championnats mondiaux. En 2021, il a battu le double champion du monde allemand Vico Merklein, grand favori de la course, avant de conserver son titre de champion du monde en catégorie H3 l’année suivante.

Son ami Pascal Auclair, président de la section handisport du Stade, le côtoie depuis plus d’une quinzaine d'années. "Il est très volontaire et très sûr de lui, il ne doute pas. C’est ça qui fait un champion." Un tempérament de vainqueur qui l’a toujours habité, mais qui, selon son frère aîné, s’est accentué depuis son accident. "Ce n’est pas parce qu’on est handicapé qu’on ne peut pas aller loin dans la vie. Mon frère a eu son accident tard, aujourd’hui il est champion du monde."

En 2000, le jeune homme de 23 ans ne fait pas encore du vélo mais de la boxe. Et du ski. En vacances à la montagne, il tombe sur le dos après un saut sur un Snow Park et se fracture la colonne vertébrale. "Je savais tout de suite que j’étais devenu paraplégique, ce qui m’a fait tout de suite penser à une amie qui avait eu un accident de voiture et était devenue elle aussi paraplégique. Je l’aidais, j’allais la voir à l’hôpital et puis je suis devenu comme elle. Ça m’a fait bizarre." Aujourd’hui, même s’il sait que c’est dur à entendre pour les autres personnes touchées par un handicap, il affirme que son accident est la meilleure chose qui lui soit arrivée. "D’une faiblesse, j’en ai fait une force", lâche-t-il.

Une médaille de consolation à Tokyo

Celui qui lui a permis d’exploiter cette force au cyclisme handbike, c’est son meilleur ami David Franek, décédé d'une crise cardiaque en 2018. "C’est lui qui lui a montré la voie", raconte Pascal Auclair. Alors joueur de basket fauteuil, Riadh Tarsim avait décidé de se tourner vers le cyclisme. "Je l’ai emmené au basket et il m’a emmené au vélo. J'ai préféré le vélo parce que tu es face à toi-même. Tu ne peux t’en prendre qu’à toi-même contrairement au basket. Il y a aussi la liberté d’aller où on veut. Pourtant, la première course que j’ai faite, j’ai fini dernier", se rappelle-t-il. Depuis, le cycliste a perdu du poids et a gagné en puissance.

Il y a deux ans aux Jeux de Tokyo le Français était arrivé en favori, mais le parcours accidenté de l’épreuve n'a pas souri à celui qui se régale sur un terrain plus plat. Après une décevante cinquième place en individuel, il a atteint son objectif : une médaille olympique, en argent, glanée à titre collectif avec le relais de l’équipe de France et dédiée à son mentor, David Franek.

Pour les Jeux de Paris 2024, le double champion du monde est ambitieux sur un parcours qui lui convient mieux sur le papier. S'il est sélectionné, le natif de Zarzis (Tunisie) espère y décrocher deux titres, en individuel et en relais, et un éventuel podium en contre-la-montre. Une nouvelle épreuve qu’il ne connaît pas encore et qu'il a décidé de tester cette année.

Paris 2024 envisagé comme une apothéose

"Il y a une règle chez moi, je ne m’arrête jamais. Même si je finis dernier, je finis la course". L’an passé, aux derniers championnats d’Europe, son excès d’entraînement lui a coûté le podium. Un coup dur pour le Français qui ne l'a pas ralenti dans son rythme de vie effréné. C'est simple, entre les entraînements, la préparation physique, les séances de kiné et le travail, il ne s'arrête jamais.

Son entreprise, spécialisée dans le bâtiment en transport et en levage, qu’il a créée en 1996, lui prend du temps, mais, surtout "lui donne à manger". "S’il fallait choisir entre le sport et le travail, je choisirais le travail. Demain, quand il n’y aura plus de sport, il restera mon travail." Demain, ce n’est a priori pas si loin pour celui qui soufflera ses 50 bougies à la fin de l’année. En cas d’échec aux Jeux, il devrait raccrocher sans se retourner. Mais pour l’instant, il n'y a que les Mondiaux de Glasgow qui comptent.

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