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Paris 2024 : la ministre Geneviève Darrieussecq veut que "la pratique sportive soit à disposition des personnes en situation de handicap partout sur le territoire"

À 500 jours du début des Jeux paralympiques de Paris, la ministre déléguée en charge des personnes handicapées a confié sa volonté de voir le sport se développer sur tous les terrains pour les personnes en situation de handicap.
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7 min
Geneviève Darrieussecq, la ministre déléguée auprès du ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées, chargée des Personnes handicapées, à Matignon le 2 décembre 2022. (BERTRAND GUAY / AFP)

Le rendez-vous avec Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée en charge des personnes handicapées, est fixé dans son bureau du ministère des Solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, dans le 7e arrondissement de la capitale. Depuis l'une des fenêtres de ses collaborateurs, on peut apercevoir la Tour Eiffel.

C'est ici, en plein cœur du Champ-de-Mars, qu'à partir du 30 août 2024, la foule se pressera pour assister au tournoi de cécifoot des Jeux paralympiques 2024. Cet événement planétaire doit renforcer la visibilité des personnes en situation de handicap. Dans le sillon de ce rendez-vous majeur, plusieurs problématiques du quotidien (accessibilité, inclusion, autonomie...) vont pouvoir être (re)mises sur la table. Une ambition partagée par la ministre qui, durant 30 minutes, a répondu aux questions de franceinfo: sport. Ce dimanche 16 avril marque les 500 jours jusqu'à l'ouverture des Jeux paralympiques de Paris.

franceinfo: sport : Que représente, pour vous, cette marque symbolique des 500 jours avant le début des Jeux paralympiques de Paris 2024 ?

Geneviève Darrieussecq : Déjà, nous mesurons que les choses arrivent vite ! Tous les acteurs mobilisés aujourd'hui dans la préparation de ce très grand événement international sur notre sol, le sont encore plus, on sent que les échéances arrivent. Nous restons vigilants concernant les infrastructures, l'accessibilité, l'héritage... mais il y a également en parallèle les athlètes qui se préparent. Je crois que c'est aussi important de les encourager et d'être avec eux.

Lors d'un récent point presse, vous évoquiez le fait que le sport participe à construire une société "qui se regarde différemment”. Selon vous, est-ce que ce regard de la société française sur le handicap peut véritablement être modifié grâce aux Jeux ?

Je le crois et j'y compte beaucoup. Je ne sais pas si c'est changer le regard ou combattre les préjugés, les idées reçues, et parfois combler l'ignorance autour du handicap. Car outre les handicaps visibles, moteurs, qui sont ceux majoritairement concernés par les Jeux paralympiques, j'espère que les Jeux seront l'opportunité de parler aussi de tous les handicaps dits invisibles, qu'ils soient cognitifs, intellectuels, psychiques... Je serai attentive à ce que les personnes en situation de handicap soient mises en avant comme expertes, dans les médias, et que des journalistes en situation de handicap soient invités à commenter les Jeux. C'est ce que j'attends de cet événement : cette connaissance pour certains, cette reconnaissance pour d'autres, et puis tout simplement la mise en avant de la diversité de notre société.

C'était également l'enjeu de la semaine olympique et paralympique (SOP) dans les écoles début avril...

En effet. Beaucoup de jeunes dans les écoles ou les collèges ont pu découvrir des parasports comme le basket ou le tennis fauteuil, entre autres. C'est un moment fort car cela permet aux jeunes de mieux comprendre le handicap, de s'acculturer. C'est par eux que la société va évoluer dans sa représentation du handicap, grâce à une école qui accueille tous les enfants.

Quels sont les principaux enjeux sociétaux qui peuvent être portés par ce faisceau de lumière des Jeux paralympiques ?

Il y a un enjeu qui est mis en avant, c'est l'accessibilité. Ce n'est pas forcément un domaine où nous sommes très en avance dans notre pays. On a une véritable ambition de rendre les espaces publics plus accessibles, de renforcer l'accessibilité des transports. Je pense à la ligne 14 du métro parisien, à tous les transports en commun parisiens de surface, les gares qui sont rendues accessibles, les aéroports qui travaillent sur ces sujets, les enceintes sportives, le Prisme (équipement dédié à la pratique universelle du sport en cours de création à Bobigny)... Je pense aussi au village des athlètes qui a été entièrement conçu en relation avec une équipe d'experts et d'architectes très mobilisés sur l'accessibilité pour laisser un héritage complet dans ce domaine. Nous franchissons déjà un palier. J'espère qu'après une pause due à la pandémie de Covid-19, qui a fait s'éloigner ces sujets d'accessibilité des priorités, nous pourrons remettre le focus dessus.

Le deuxième enjeu, c'est de montrer toutes les capacités des personnes en situation de handicap. Il y a les capacités physiques de nos athlètes, qui sont remarquables, mais aussi toutes celles des volontaires. Au moins 3 000 sur 45 000 d'entre eux seront des personnes en situation de handicap moteur ou intellectuel. La volonté est de mettre en avant une société où tout le monde compte.

>> À lire aussi : Paris 2024 : à deux ans des Jeux paralympiques, quels sont les défis à relever concernant l'accessibilité ?


En parlant d'accessibilité, l’association APF France Handicap a récemment expliqué dans un communiqué qu'elle s’inquiétait d’un “scénario noir” pour des milliers de spectateurs en situation de handicap durant les Jeux. Elle pointe notamment du doigt les problèmes de déplacement, d'hébergement et d'accueil. Qu'en est-il réellement ?
 

Les membres de cette association connaissent la difficulté quotidienne pour se déplacer, pour organiser un voyage, trouver un hébergement susceptible de vous accueillir, notamment pour les personnes en fauteuil. Nous leur avons répondu avec la ministre des Sports, des Jeux olympiques et paralympiques, Amélie Oudéa-Castera, le ministre délégué aux transports, Clément Beaune, et le président du Comité d'organisation, Tony Estanguet. Cette semaine - et c'était déjà prévu - nous avons installé avec Amélie Oudéa-Castera un groupe d'experts d'usage sur l'accessibilité au niveau de la Dijop (Délégation interministérielle aux Jeux olympiques et paralympiques), avec des membres de ces associations et une diversité dans les handicaps représentés. Nous avons aussi tenu compte de la diversité géographique lors des travaux, puisqu'il y a aussi des villes qui accueillent les Jeux en dehors de la région parisienne.

Cela veut-il dire qu'il n'y aura aucun trou dans la raquette ?

Nous sommes dans un moment où les grands opérateurs, qui travaillaient chacun de leur côté avec un cahier des charges d'accessibilité, doivent livrer leurs infrastructures et les relier. On est en train de reconstituer le puzzle, d'assembler tout cela et il ne faut pas qu'il y ait de faille. On sait que parfois, il peut y avoir un souci qui gâche la vie des personnes en situation de handicap. Nous allons travailler avec ce groupe pour vérifier justement que la majeure partie des trajets se font dans de bonnes conditions, avec le secteur de l'hôtellerie et du tourisme pour recenser les hébergements possibles et totalement accessibles sur une seule et même plateforme... Nous avons 500 jours pour être parfaitement efficaces dans ce domaine, et nous serons aidés par ce groupe d'experts.


La notion d'héritage revient souvent lorsqu'on évoque l'après Paris 2024. Qu'en sera-t-il au niveau de la place du sport pour les personnes en situation de handicap ?

Dès juillet dernier, le président de la République et la Première ministre ont fixé un cap sur le développement de la pratique sportive. Nous souhaitons mettre en œuvre une grande campagne de promotion du parasport avec le programme des clubs inclusifs, en partenariat avec le Comité paralympique et sportif français (CPSF). 1 000 sections para-accueillantes existent déjà et 3 000 de plus sont attendues d'ici 2024. L'objectif est simple : que la pratique sportive soit à disposition des personnes en situation de handicap partout sur le territoire français. Que ce soit à l'école, dans les établissements médico-sociaux, dans les clubs... Il faut que l'offre soit là, parce que la demande existe.

Début avril, un avis a été adopté par le Conseil économique, social et environnemental (CESE) sur le développement du parasport. Parmi les 20 points abordés, il préconise globalement une meilleure organisation locale et nationale pour favoriser la pratique et sa prise en charge. Est-ce que ces préconisations seront étudiées ?

Oui, je partage complètement cet avis. Beaucoup de ces préconisations vont être travaillées parce qu'elles relèvent du bon sens. Nous avons aujourd'hui des situations beaucoup trop disparates dans notre pays pour l'accès au sport. Il y a des départements où des clubs intègrent des activités sportives pour des personnes en situation de handicap, d'autres où ce sont surtout la Fédération française de sport adapté (FFSA) ou la Fédération française handisport (FFH) qui structurent l'accès au parasport... Et dans les établissements médico-sociaux, trop souvent encore, il n'y a pas assez. Il y a aussi des préconisations pour une meilleure compensation du handicap, afin que certaines personnes puissent avoir accès à l'équipement leur permettant de faire du sport : des lames, du matériel... Tout cela n'est peut-être pas suffisamment pris en compte en termes de renouvellement et de prise en charge. Je crois qu'il faut fluidifier tout cela.

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