: Reportage Paralympiques 2024 : avec le paracyclisme, les Jeux s'invitent enfin en banlieue
Il aura donc fallu attendre la deuxième semaine paralympique pour que la promesse des Jeux de Paris et de sa petite couronne soit enfin tenue. Hormis le Stade de France et le centre aquatique, tous deux situés à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), les Jeux paralympiques ne s'étaient pas encore aventurés dans le 93, et encore moins dans ses rues. C'est désormais chose faite avec les épreuves de paracyclisme sur route à Clichy-sous-Bois entre le mercredi 4 et le dimanche 8 septembre, en attendant le paramarathon, qui s'élancera de La Courneuve dimanche.
Autour du complexe sportif Henri-Barbusse, entouré d'un collège, d'une école primaire et d'une célèbre chaîne de fast-food, on était loin des cadres du Paris de carte postale. "C'est sûr que ça change de la Tour Eiffel et du Grand Palais", souriait ainsi Pedro, un photographe mexicain légèrement perdu à l'heure d'enchaîner RER E-Tramway T4 pour arriver au départ. Perdu, mais lucide : "Cela fait aussi plaisir de sortir du Paris cliché, et de découvrir la vraie vie autour."
Un point de vue partagé par beaucoup, y compris Marie Patouillet, à la descente de son vélo de contre-la-montre ce jeudi matin : "C'est hyper chouette que l'olympisme ait couru devant les monuments parisiens et devant tout le public parisien, que le triathlon et le paratriathlon aussi. Mais je trouve que c'est bien aussi que, nous, on soit là aujourd'hui pour faire découvrir le sport para à la banlieue parisienne."
Un succès populaire
Effectivement, pas besoin de grand monument historique pour faire d'un site un cadre parfait pour une épreuve des Jeux. Avec ses 15 km tracés dans les forêts de Bondy et de Bernouille, le parcours du paracyclisme sur route était une réussite. Et, à en juger par les clameurs qui s'élevaient le long des barrières et la foule amassée au pied du podium, la ferveur populaire était aussi au rendez-vous, quand bien même la vie quotidienne continuait aux alentours.
Les premiers coups de pédales à peine donnés au petit matin, une mère et son fils, cartable sur l'épaule, s'impatientaient ainsi à un point de passage du circuit. "On doit aller à l'école là, on va être en retard", lançait la mère à une bénévole québécoise, qui répondait : "Je sais madame, mais là une athlète va s'élancer, vous passerez après. Il y a eu beaucoup de communications de faites pour vous prévenir. Gardez le sourire, ce sont les Jeux !". Quelques secondes plus tard, l'écolier pouvait reprendre son chemin.
Dans la matinée, des élèves du collège Romain-Rolland, longé par la course, profitaient d'une pause pour assister au passage des coureurs. Malgré les trois jours de courses prévus, l'établissement restera bien ouvert jeudi et vendredi, assure la concierge. Avantage du mercredi : les collégiens étaient libérés dès midi.
Certains se dirigeaient vers le célèbre fast-food du trottoir d'en face mais, celui-ci étant pris d'assaut par journalistes, membres du staff et spectateurs, ils renonçaient à leur traditionnel burger du mercredi. A l'intérieur, Sarah, employée depuis 15 ans, écarquillait les yeux : "On est débordé, je n'ai jamais vu ça en 11 ans ! Et ça va durer jusqu’à samedi ?", s'inquiète la serveuse, en montrant du doigt une file interminable de spectateurs, pas venus pour goûter les frites, mais pour squatter les sanitaires.
"Faire découvrir le sport paralympique dans la banlieue"
Comparée à d'autres sites, l'aire de départ et d'arrivée de Clichy-sous-Bois a visiblement été moins bien soignée que d'autres. Ce site, un des deux exclusivement paralympiques de ses Jeux, dénote par son côté désordonné, avec des para-athlètes perdus dans les zones médias, et inversement, le tout centré autour de la tribune vétuste du stade Henri-Barbusse, qui donne au lieu des airs de kermesse. Etriquées, les installations provisoires ne sont pas à la hauteur de la ferveur qui règne autour des courses.
Car derrière les barrières, les para-athlètes découvrent une foule compacte, de tous âges. "Malgré l'heure matinale, j'ai vu des courageux et des courageuses. Il y en a qui se sont levés tôt pour venir ici", savourait ainsi Marie Patouillet. La championne paralympique de poursuite n'aurait d'ailleurs échangé pour rien au monde ce tracé à celui des Jeux olympiques, dans Montmartre : "Parce que je crois à l'héritage des Jeux. Parce que certes, c'est très beau de courir dans ces quartiers-là, mais ce sont des quartiers qui bénéficient quand même de certains privilèges et qui ont accès à beaucoup de choses, auxquelles d'autres quartiers n'ont pas accès."
"Je suis extrêmement fière de venir faire découvrir le sport paralympique dans la banlieue parisienne. Parce que ce ne sont pas eux qui ont accès aux structures qui peuvent prendre en charge des enfants handicapés ou même des adultes en situation de handicap."
Marie Patouilletà franceinfo: sport
"Et si, ne serait-ce que là, à leur fenêtre, à leur balcon ou sur le bord de la route, des parents ou des enfants se sont dit mais en fait ok, j'ai un handicap, mais je peux quand même aller faire du sport... En fait, je trouve ça génial", souriait Marie Patouillet, pourtant sans médaille autour du cou pour la première fois de ses Jeux. Mais qu'importe, l'essentiel était ailleurs avec un spectacle paralympique sorti de la capitale, et saupoudré d'une moisson de médailles françaises pour couronner le tout.
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