: Vidéo Notre-Dame : les métiers de la restauration du patrimoine manquent de bras
La France dispose-t-elle de suffisamment d'artisans pour tenter une reconstruction de Notre-Dame à l'aide des techniques d'origine ? La réponse est non. Avant même l'incendie de la cathédrale parisienne, les chantiers peinaient à trouver une main d'oeuvre qualifiée. Même les filières prestigieuses comme les Compagnons du Devoir rencontrent des difficultés pour susciter les vocations.
Une première évaluation estime à 550 le nombre d'artisans nécessaires au chantier de reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris, si le choix est finalement fait de rebâtir selon les techniques d'origine. Une centaine de maçons, autant de tailleurs de pierre, cent-cinquante charpentiers et deux cents couvreurs devaient y travailler plusieurs années. Sans préjuger de la pertinence du délai de cinq années annoncé par le président de la République, ce calcul se heurte à une réalité : tous ces métiers peinent à recruter. Avant même la catastrophe de l'île de la Cité, les chantiers du patrimoine souffraient d'un manque de professionnels maîtrisant ces savoir-faire.
Ce chantier est important parce que ça correspond à notre histoire, à notre patrimoine. Mais il y a d'autres chantiers, il ne faudrait pas les abandonner pour faire Notre-Dame. cela veut dire qu'il faudra répartir les salariés d'une façon harmonieuse pour qu'ils puissent travailler sur le territoire.
Patrick Liebus Président de la confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB)
Susciter des vocations
Les acteurs de cette profession entendent tirer parti du chantier à venir pour susciter des vocations chez les jeunes. Il s'agit de les intéresser à des métiers, ceux de la restauration de nos monuments historiques, auxquels ils ne penseraient pas de prime abord ou qui souffrent d'un déficit d'image positive.
Il faut mettre en place un chantier-école dans le domaine de la restauration avec des jeunes compétents ...Montrons cette vitrine des métiers au public
Frédéric Létoffé Président du groupement des entreprises de restauration de monuments historiques
Parmi les plus prestigieuses filières professionnelles de l'artisanat figure celle des Compagnons du Devoir. Formation traditionnelle, assortie du célèbre tour de France qui permet aux jeunes apprentis de se confronter à leur profession chez plusieurs artisans installés, elle aussi connaît des difficultés à recruter. Alors qu'autrefois, il n'y avait pas assez de place pour le nombre de postulants, les Compagnons du Devoir sont contraints de médiatiser leurs formations pour espérer attiser la curiosité de futurs apprentis.
On a du mal à trouver des jeunes pour la formation, on est obligé de faire des expositions, de faire de la pub, on a créé des comptes sur Facebook pour attirer ces jeunes dans les centres de formation. Sinon, on ne trouve plus d'apprentis.
Florian, couvreur, compagnon du Devoir depuis 6 ans
Les anciens contre les modernes
Cette réflexion autour des métiers traditionnels, tout comme les propositions faites par les forestiers d'offrir des chênes pour la reconstruction de la charpente de Notre-Dame, ne trouvera sa justification que si le choix est fait d'un chantier reprenant les techniques d'origine. Si le délai de cinq ans annoncé par le président de la République devient une obligation contractuelle, ce choix ne sera plus viable. Les matériaux et techniques à l'ancienne devraient alors laisser place à des entreprises du bâtiment qui utiliseront des process contemporains. De l'issue de cette nouvelle polémique opposant les anciens et les modernes dépend peut-être l'avenir des métiers de la restauration en France.
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