Victoires de la musique 2024 : "Je veux en finir avec l'entre-soi et le parisianisme", déclare Vincent Frèrebeau, leur président

Lundi, les Victoires de la musique ont à la fois annoncé les noms des artistes en lice pour la 39e cérémonie, et affiché leur volonté de réformer une institution parfois décriée. Explications avec leur nouveau président, Vincent Frèrebeau.
Article rédigé par Christophe Airaud
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4 min
Vincent Frèrebeau et sept des nommés pour les Victoires de la musique 2024 sur la scène de la Nouvelle Ève. (CHRISTOPHE AIRAUD)

La cérémonie des 39e Victoires de la musique sera retransmise le 9 février par France 2 en direct et en live depuis la Seine musicale, animée par Léa Salamé et Cyril Féraud. Lundi 8 janvier, ses organisateurs ont dévoilé le nom des artistes nommés – dominés par Zaho de Sagazan, en tête avec cinq nominations – et ont présenté par la même occasion une organisation nouvelle, réformée, de la compétition. Pour lutter contre ce qu'il appelle "une désagréable petite musique" accusant les Victoires d'entre-soi et de manque de diversité artistique, Vincent Frèrebeau, le nouveau président, a présenté avec humour son projet. Il faut, dit-il, en finir avec "l'entre-soi, le parisianisme et les petits arrangements entre amis". Franceinfo Culture l'a rencontré à l’issue de la présentation des artistes nommés.

Pourquoi tout reformer ?

Vincent Frèrebeau, fondateur du label Tôt ou tard, qui produit entre autres Vincent Delerm, Shaka Ponk, Vianney ou Clara Ysé, et qui a assumé cette charge déjà à deux reprises – entre 2005 et 2006 puis entre 2012 et 2013 – a d'abord dressé un bilan mitigé de l'image des Victoires. "C'est un moment que j'aime bien, mais j'entendais cette petite musique. Des critiques, certaines légitimes et donc j'ai pensé qu'il fallait s'attaquer à ça. (...) Nous avons une responsabilité, une inquiétude que le truc disparaisse, c'était le risque que je voyais poindre. J'étais inquiet de l'avenir des Victoires". Pour répondre donc à ces reproches venus du public, mais aussi des artistes, le monde du rap ayant fini par créer les Flammes (cérémonie parallèle, mais uniquement destinée à la production rap), cette année, le palmarès final est entre les mains d'un jury de 32 personnalités du monde de la musique.

Vincent Frèrebeau, président des Victoires de la musique. (FRANCE 2)

Pour éviter l'influence des gros producteurs de musique, les membres du jury sont donc à la fois des programmateurs de festivals, de radios, de plateformes, des artistes et des journalistes de presse écrite. "Ce sont des gens qui n'ont pas d'intérêt particulier à ce que tel ou tel artiste soit consacré, donc ce sont des gens qui votent avec leur cœur et pour éviter le tout Paris, ce sont aussi des programmateurs de festivals qui ont vu pratiquement tous les spectacles pour lesquels ils vont voter : les gens des festivals sont les mieux placés pour connaître l'ensemble de la scène musicale, tous genres confondus." La preuve, avec la présence parmi les artistes nommés, de Julien Granel : issu de la scène et avec ses 206 000 abonnés sur Instagram, il n'est pas encore connu du grand public. Mais son talent de performeur et sa capacité à renverser des salles de concert légitime sa place dans les révélations scènes.

Pourquoi supprimer l'album le plus streamé et le vote du public ?

Les années précédentes, pour redorer le blason des Victoires ont été inventées deux catégories : le vote du public et l'album le plus streamé. Une manière de se rapprocher de l'audience et du public. Pourtant, cette année, ces deux catégories ont disparu. Pour Vincent Frèrebeau, c'est encore une fois une manière de lutter contre tout type d'influences. "Le public ou les albums les plus streamés sont des données où plus qu'ailleurs, l'influence est forte parce qu'on va avoir un artiste qui est très fort sur les réseaux sociaux qui va écrabouiller ni plus ni moins les autres artistes."

Pour l'album le plus streamé, l'argument est aussi un autre : "Les Victoires, ce n'est pas le triomphe du streaming, et les artistes de cette Victoire n'ont pas aimé ça. Ils trouvaient – les rappeurs, car c'était effectivement en majorité des rappeurs – qu'ils n'étaient pas considérés comme des artistes comme les autres. La Victoire de l'album le plus streamé en faisait un ghetto. Je préfère que ces artistes soient dans toutes les catégories, chanson, révélation ou artistes de l'année."

Quels effets sur le choix des nommés de cette année ?

Cette année, donc, ils seront 25 à concourir le 9 février pour une Victoire. Zaho de Sagazan avec ses cinq nominations domine la compétition. Au côté d'Etienne Daho ou de Véronique Sanson qui font figure de parrain et marraine de la chanson, des nouveaux noms et une certaine diversité en effet apparaissent. Serait-ce l'effet réforme ? "Pour moi et pour l'académie, c'est une réussite, car on a dans de nombreuses catégories, un ou une artiste issue du monde du rap. On a Meryl, Aya Nakamura, Damso, Gazo, SDM et Josman. On a cette diversité et c'est une fierté. Dans les nominés, cohabitent les trois générations : les plus anciens, avec les Daho et Sanson, les intermédiaires, avec Vianney et Juliette Armanet, et les jeunes générations avec une belle découverte dont je suis producteur, Clara Yse. C'est un nom qui pour l'instant ne dit pas grand-chose au plus grand public."

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