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Sept raisons de ne pas écouter le nouvel album de Lady Gaga

Après Katy Perry et juste avant Britney Spears, la chanteuse sort lundi un album intitulé "ARTPOP", après des semaines de promotion ampoulée. Beaucoup de bruit pour rien ? Francetv info vous donne son sentiment.

Article rédigé par Elodie Drouard
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7 min
La pochette du quatrième album de Lady Gaga, "ARTPOP", réalisée par l'artiste Jeff Koons. (JEFF KOONS)

On aurait dû se méfier de ce quatrième album en lettres capitales : ARTPOP. Comme si Lady Gaga nous hurlait dans les oreilles le titre de son nouveau disque qui sort lundi 11 novembre, après avoir fuité sur internet une semaine plus tôt.

Francetv info vous dit pourquoi vous devriez vous en passer.

Parce qu’elle se prend pour l'anti-Andy Warhol

Mars 2010. Publiée sur le compte YouTube de la chanteuse, la vidéo de Telephone est visionnée plus de 14 millions de fois en trois jours. On reste scotché devant l’esthétique criarde du clip, qui convoque en un peu plus de neuf minutes un concentré de pop culture, de Tarantino aux jeux vidéo. Le monde entier applaudit enfin Lady Gaga, qui réussit pour la première fois de sa carrière à séduire les plus sceptiques.

L’Américaine, qui s’apprête alors à fêter ses 24 ans, intrigue et séduit. Les jaloux évoquent Madonna tandis que d’autres, admiratifs, citent Andy Warhol et son influence majeure dans la pop culture, comme sur Slate. Mais voilà, la promesse n’a pas été tenue.

En 2013 et après un troisième album décevant, Lady Gaga cherche à se débarrasser de cet héritage visiblement trop lourd à porter. Dans une interview donnée au Daily Mail britannique, l’excentrique diva déclare que pour son nouveau disque, elle a voulu "injecter de l’artistique dans la pop, à l’inverse de Warhol (…), c’est-à-dire mettre de l’art dans la boîte de soupe". Et à l’écoute d'ARTPOP (art pop/pop art, vous l'avez ?), on se dit que l’analogie culinaire n’a jamais été aussi juste. 

Parce qu'il ne suffit pas que Jeff Koons réalise la pochette pour faire de l'album une œuvre d'art

Pour bien souligner son ancrage arty, Lady Gaga a fait appel à l’artiste Jeff Koons pour réaliser la pochette d'ARTPOP. Après avoir pompé allègrement les métamorphoses corporelles de l’artiste française Orlan (avec laquelle elle est en procès, note Le Monde) (article abonnés) et pris des cours de "performance" avec la très controversée Marina Abramović, Gaga se paie donc Koons. Les œuvres de l'Américain, chantre du kitsch et du néo-pop, se vendent plusieurs dizaines de millions de dollars aux enchères.

La pochette du quatrième album de Lady Gaga, "ARTPOP", réalisée par l'artiste Jeff Koons. (JEFF KOONS)

Après avoir statufié Michael Jackson ou la pornstar Cicciolina (son ex-épouse), l'artiste s’est donc attaqué à Lady Gaga. La sculpture en plastique affichée sur la pochette d'ARTPOP sera dévoilée au public le 10 novembre, la veille de la sortie de l’album. En 1967, Andy Warhol apposait, dans l’indifférence générale, une banane sur la couverture du premier album d’un groupe encore inconnu, The Velvet Underground. Quarante-six ans plus tard, l’album et sa pochette sont au panthéon du rock 'n' roll. Pas sûr qu'ARTPOP connaisse la même trajectoire.

Parce qu'elle continue à pomper Madonna

Depuis que "Lady Gaga" est née (en 2008), on ne cesse de la comparer à Madonna. Ce qui a le don de l’agacer, en témoigne son récent tweet après une interview donnée par la Madone. "Madonna déteste Gaga. Je n'ai besoin de la permission de personne pour qu'on se souvienne de moi."

Lady Gaga a pourtant du mal à se défaire de cette influence imposante. Alors que Born This Way avait été moqué tant sa ressemblance avec Express Yourself de Madonna semblait évidente (cette dernière s'en amuse d’ailleurs lors de ses concerts), on peut prédire le même avenir à certains morceaux d'ARTPOP. Ainsi, Fashion! évoque un mash-up dopé entre Holiday (pour la ligne de basse) et Material Girl (pour les paroles). "I feel alive when I transform/But this love's not ma-teri-aaal !" Coïncidence, le morceau a été écrit par un des producteurs déjà responsables de… Born This Way, souligne le magazine américain Slant.

Parce qu'elle ressuscite R. Kelly

"R. qui ?", se demande probablement la génération Y. Il faut dire qu’à 46 ans, l’interprète du tube aussi planétaire que sirupeux I Believe I Can Fly (1996) n’a pas été très actif ces dernières années. Qu'importe, le voici ressuscité par Lady Gaga sur Do What U Want, le deuxième single extrait d'ARTPOP. Bizarre de déterrer ainsi une vieille gloire du hip-hop qui n'a plus (vraiment) fait parler de lui depuis plus de dix ans.

Quitte à s’acheter une crédibilité dans le monde du rap ou du R'n'B, autant convoquer des pointures, comme elle tente malgré tout de le faire sur Jewels N' Drugs en s’entourant des jeunes rappeurs T.I., Too $hort et Twista. Mais pourquoi avoir choisi R. Kelly ? Le mystère demeure. A l'écoute de Do What U Want, on se dit que le featuring du crooner à la voix doucereuse sert surtout à apaiser les oreilles de l’auditeur, tant Lady Gaga s'époumone. On pense alors à Christina Aguilera – ce qui n’est pas forcément une bonne chose.

Malgré tout, la chanson et ses paroles vengeresses "You can't stop my voice/You don't own my life/But you can do what you want with my body" (Tu ne peux pas m'empêcher de chanter, ma vie ne t'appartient pas, mais fais ce que tu veux de mon corps) est une des meilleures de l’album.

 Parce qu'elle est devenue plus prévisible que Miley Cyrus

Plus que sa musique, ce sont d'abord ses apparitions publiques et ses tenues excentriques qui ont contribué à la renommée de Lady Gaga. Mais après avoir repoussé les limites de l'exercice (son apparition couverte de viande aux MTV Music Awards date déjà de 2010), la chanteuse semble épuisée. Apparue sans maquillage au début de la promotion de l’album, elle semble peiner à se montrer au naturel. Début septembre, elle déclarait au Guardian (en anglais) : "Pour ARTPOP, je me suis plantée devant un miroir, j’ai enlevé ma perruque et mon maquillage, j’ai enfilé un body et un bonnet noirs et j'ai dit : 'OK, maintenant tu vas devoir leur montrer que tu peux être brillante sans tout ça.'"

Résultat, plus personne ne guette les apparitions de Lady Gaga. Pire, lors des derniers MTV Video Music Awards, elle s'est fait voler la vedette par Miley Cyrus et son twerk, et personne ne se souvient de sa performance. Plus récemment, Lady Gaga a fondu en larmes en interprétant Dope, nouvel extrait d'ARTPOP, aux YouTube Music Awards. Résultat : en trois minutes, près de 4 000 internautes se sont déconnectés de la retransmission live de la cérémonie, avance le Los Angeles Times (en anglais).

Parce qu'elle a écrit les paroles de l'album en dix minutes

"Je sais que papa et maman pensent que je suis foutue, mais c’est pas grave, car je suis putain de riche", chante Lady Gaga dans Mary Jane Holland. Un exemple parmi tant d’autres, mais l'album sidère par la vacuité de ses textes. Comme le souligne le Huffington Post anglais, "Uranus" rythme certes avec "famous", mais doit-on en faire une chanson pour autant ? "Si Lady Gaga veut vraiment qu'on la prenne au sérieux en tant qu'artiste, elle doit passer plus de cinq minutes à griffonner les premiers couplets qui riment et qui lui viennent à l'esprit", ajoute le site.

ARTPOP parle principalement de sexe, de gloire et dévoile un ego de plus en plus surdimensionné. Si les précédents albums de la chanteuse étaient principalement une ode à la différence et à l’affirmation de soi, celui-ci se distingue comme un disque absurde et vulgaire à la fois.

Parce que vous ne pourrez même pas le critiquer

ARTPOP n’est pas un mauvais disque de pop. Simplement, il n'est pas à la hauteur de l’attente suscitée, des discours mégalomanes de Lady Gaga – et de ses indéniables talents. Mais à aucun moment il ne tutoie le brio des tubes précédents, comme Bad Romance ou Paparazzi.

Par ailleurs, il est devenu compliqué de critiquer la chanteuse, tant le rouleau-compresseur marketing mis en place depuis des années par Lady Gaga est efficace. Aujourd’hui, la jeune femme dispose d'une armée de fans, ses "little monsters" (petits monstres) sur lesquels elle règne, tel un gourou. Prêts à tout pour défendre leur idole, ils sont aujourd’hui son meilleur attaché de presse.

La journaliste Angela Cheng en a récemment fait les frais, après avoir écrit sur le site américain Examiner qu'ARTPOP était "un des pires désastres de l'histoire de la pop". Dans les commentaires de l'article (en anglais), des fans menaçaient de décapiter sa fille, violer sa mère ou souhaitaient que toute sa famille ait péri dans le bombardement d’Hiroshima. Dans ces conditions, on imagine que si Lady Gaga reprenait Tata Yoyo avec Doc Gynéco, ses "petits monstres" crieraient au génie. En attendant, on ne saurait trop vous conseiller de réécouter Poker Face. Ou Holiday.

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