Rock en Seine 2022 : entre folk et électro-pop cosmique, la fée Aurora ensorcellera les planches françaises
Après s'être produite au Cabaret Vert, la chanteuse norvégienne à la voix enchanteresse, Aurora, sera en concert à Rock en Seine ce dimanche, puis au Trianon lundi. Oisillon devenu aigle, l’artiste envoûte tant par ses mélodies électro-pop que ses paroles engagées.
Bizarre. C'est l'un des qualificatifs que l'on utiliserait pour évoquer cet étonnant phénomène musical électro-pop qui envoûtera (sans aucun doute) Rock en Seine dimanche 28 août. Bizarre, donc. Le terme est d'ailleurs utilisé par la soeur d'Aurora, Viktoria Aksnes, pour décrire sa cadette lorsqu'elle était enfant. À 26 ans, l'artiste l'est toujours un peu. Elle est du côté de l’étrange, de l’unique, probablement du génie. La déesse scandinave aux cheveux blonds ne s’envisage d’ailleurs que comme la courroie de transmission d’une force supérieure, la musique (ou autre ?). Comme équipée d’antennes, elle capte l’essence de ce qui l’entoure et l’injecte dans ses créations. À commencer par Bergen, sa ville natale, à laquelle elle rend hommage dans son tout premier clip Runaway sorti en 2015, à ses 18 ans.
La vidéo cumule aujourd'hui les 452 millions de vues sur YouTube et a fait fureur sur Tik Tok, six ans après sa sortie. C’est là une parfaite introduction à son univers : une voix enchanteresse, des sonorités électro-folk, un cri d’oiseau et de la neige à foison. "Il faisait très froid le jour du tournage. On a filmé à l’extérieur pendant des heures", se souvient-elle dans une vidéo publiée par le média britannique NME. Les paroles - écrites alors qu’elle n’a que 11 ans - racontent le besoin de rentrer chez soi. "Plus je grandis et plus elles prennent du sens", confie-t-elle.
Aurora aime être chez elle, seule. Petite, sa chambre est son havre de paix. Elle ne s'en extirpe que pour échapper à la trop forte odeur de peinture fraîche. Celle qu’elle utilise pour le dessin, passion qu’elle partage avec son père. "Nous venons d’une famille créative avec beaucoup d’artistes, dont un bâtisseur de bateaux, nous relate sa sœur Viktoria. Nos parents ont toujours voulu que nous puissions faire ce qui nous plaisait". Résultat, les trois filles de la famille s’épanouissent toutes dans un métier artistique : les deux plus grandes, Viktoria et Miranda, sont respectivement styliste et maquilleuse pour Aurora.
C’est grâce à Miranda que la jeune Norvégienne découvre la puissance de la musique : elle déniche le vieux clavier de sa sœur dans le grenier familial à l’âge de 6 ans. Elle se met alors à composer ses premières mélodies, puis trois ans plus tard ses chansons. Assise face à son piano, l’artiste en herbe oublie le temps qui passe. "De mon enfance, je me souviens d’une perspective de la temporalité totalement différente. Quand vous êtes petit, vous ne pensez pas à l’heure qui suit", lance-t-elle lors d’une interview pour le média britannique Spindle.
Mère Nature
Son imagination entraîne l’enfant dans un univers rempli de magie. "Je prenais beaucoup de plaisir à rendre le monde plus excitant, je me disais que le vent était une femme, que les arbres pouvaient parler", se remémore-t-elle pour B-Sides. Elle apprécie le silence et l’espace qu’offrent les forêts de son fjord norvégien. Le calme du lieu lui permet de plonger dans sa propre intériorité. Là seulement, elle se sent vraiment exister. Ses balades enchantées développent chez elle une affection particulière pour "Mère Nature" qu’elle considère comme l’une de ses plus grandes sources d’inspiration… devant Léonard Cohen et Enya !
Plusieurs de ses chansons rendent hommage à la nature comme The Seed, issue de son second album, A Different Kind Of Humain - Step 2 (2019). Pour le refrain, l'artiste s’inspire d’un proverbe indien : "Quand le dernier arbre aura été abattu, le dernier poisson pêché, la dernière rivière empoisonnée, seulement là, nous réaliserons que l’argent ne se mange pas." En 2021, Aurora participe à la COP 26 de Glasgow en tant que chanteuse. Les dons recueillis lors de sa performance sont reversés à l'organisation caritative EarthPercent. Lors de l'événement, elle rêve alors de croiser Greta Thunberg. L’adolescente la fascine, notamment par sa manière de monter sur scène, de se métamorphoser pour un combat qui la dépasse.
Un début de carrière fulgurant
Aurora s’est elle aussi transformée. Retour en 2014, lors de sa toute première performance pour la fête de son lycée. Elle joue l’une de ses créations intitulée I had a dream, guitare en main. Une amie l’enregistre et poste la vidéo sur Internet. La jeune fille est rapidement repérée et signe avec Made Management puis le label Glassnote et Decca. "Ma mère disait qu’Aurora ne pouvait pas garder sa musique pour elle, qu’elle pouvait aider des gens", se rappelle sa sœur Viktoria. Alors elle se lance et sort son premier album All My Demons Greeting Me As A Friend en 2016. Son début de carrière est fulgurant. L’artiste fait même palpiter le cœur de la célébrissime Katy Perry, qui partage son enthousiasme sur Twitter.
Finally. New music that makes my ❤️a flutter. Check this 17 yr old angel @AURORAmusic RUNAWAY https://t.co/KLZRLeSiVk pic.twitter.com/scJvDfDgSU
— KATY PERRY (@katyperry) March 4, 2015
"C’est grâce au tweet de Katy Perry que j’ai découvert la musique d’Aurora. Je suis devenue fan instantanément", glisse Maeva Damas, l’une des plus grandes admiratrices françaises de la chanteuse et responsable de comptes Twitter, Facebook et Instagram dédiés à l’artiste. Elle assiste à l’un de ses premiers concerts en France aux Vieilles Charrues et rencontre Aurora après son spectacle. "On avait parlé sur les réseaux avant le festival. Lorsqu’on s’est vues en vrai, on s’est mises à courir l’une vers l’autre. On s’est fait un câlin puis on a discuté quelques minutes. C’était une rencontre très douce."
Depuis, elle a assisté à tous les concerts donnés en France par la Norvégienne et a pu observer son évolution. Au départ, la célébrité oppresse Aurora. Si sa rencontre avec Maeva s’est bien passée, découvrir en chair et en os des fans transis est difficile pour l’éternelle solitaire. "Elle ne voulait pas de cette carrière, elle voulait juste faire de la musique. À un moment, elle s’est même demandé si elle ne pourrait pas juste écrire les chansons et que quelqu’un d’autre les chante à sa place", narre sa grande sœur, Viktoria.
Emancipation
Sur scène, la chanteuse a du mal à se détendre, agrippe ses vêtements, reste statique. "Elle était timide, elle dansait mais n’osait pas aller trop loin, commente Maeva Damas. La fan constate une réelle différence lors d’une performance à La Cigale en 2018. "Elle venait de sortir son clip Queendom et elle avait des danseuses avec elle sur scène. C’était impressionnant. Aujourd’hui, elle danse comme elle le sent, comme elle interprète le sens de ses chansons." Dans Queendom, chanson libératrice, elle s’adresse à tous les introvertis. Elle, à l’inverse, a gagné en confiance et s’impose comme la reine de son propre royaume.
Dans le clip, l’un de ses hauts blancs et poilus - dont la laine est issue d’un mouton broutant sur l'île de Osterøy - est l’une des créations de sa sœur Viktoria. Peu à peu, Aurora se crée un style bien à elle. "Plus jeune, elle était embarrassée à l’idée d’être sexy, de montrer sa peau, énonce Viktoria. Avec l’âge, elle est plus à l’aise avec cette idée. Son style est aujourd'hui très féminin. Elle porte de longues robes fluides ainsi que les corsets soulignant la taille". Chacun de ses albums possède une palette de style différente. "Les couleurs sont liées aux paroles de ses chansons."
Les tenues qu'elle porte pour les clips de son deuxième album - A Different Kind of Human (2018) - et son troisième - The Gods We Can Touch (2022) - sont bien plus joyeuses, à l’image de ses couplets. Moins sombres que All My Demons Greeting Me As A Friend (2016), ils traitent d'émancipation, de féminisme, et de la société dans laquelle nous vivons. Elle se penche sur les minorités et prend davantage la parole pour les droits de la communauté LGBTQIA+.
Son dernier album The Gods We Can Touch (2022), enregistré dans un château norvégien dont l’un des plafonds est entièrement tapissé de micros, est plus dansant. Aurora partage l’un des titres - Everything Matters - avec Pomme, chanteuse française. Sur une musique rythmée, leurs voix fluettes s’entremêlent dans des aigus angéliques. Enregistré à distance, leur duo s'est reformé le temps d’une vidéo pour le magazine Modzik. Aurora y apparaît toute de rouge vêtue. "Une couleur qu’elle ne portait pas auparavant", commente sa sœur Viktoria. Celle d'une passionnée. "Elle parle avec tant d'ardeur, même lorsqu'il s'agit de politique, d’environnement. En deux mots, une femme puissante."
AURORA est en concert dimanche 28 août sur la Grande Scène de Rock en Seine à 17h30, au Domaine national de Saint-Cloud, avec une sélection de (re)diffusions de concerts sur la plateforme france.tv avec Culturebox à cette adresse. Elle se produira aussi au Trianon, le lundi 29 août, à 20h.
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