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#FreeBritney : on vous explique l'affaire de la tutelle de Britney Spears qui demande sa levée devant la justice

La chanteuse de 39 ans doit consulter son père pour l'essentiel de ses décisions. Sous pression des fans et des médias, ce dernier a pour la première fois envisagé de passer la main.

Article rédigé par franceinfo
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Des activistes du mouvement #FreeBritney protestent devant le tribunal de Los Angeles, pendant une audience concernant la tutelle de la chanteuse Britney Spears, le 27 avril 2021. (MATT WINKELMEYER / GETTY IMAGES)

"Je veux juste qu'on me rende ma vie. Cela fait 13 ans et ça suffit !" S'adressant à un tribunal de Los Angeles le 23 juin, la popstar américaine Britney Spears avait livré un plaidoyer virulent contre la tutelle juridique exercée sur elle par son père, qu'elle juge "abusive". Un large public a alors découvert l'ampleur du contrôle exercé sur ses finances, sa carrière et sa vie personnelle par James Spears depuis 2008, quand la star faisait face à une dépression très commentée. Ils ont repris le mot d'ordre #FreeBritney ("Libérez Britney"), déjà porté par ses fans les plus ardents.

Depuis, la chanteuse a remporté plusieurs victoires. Son père a pour la première fois ouvert la porte à un retrait de la tutelle de sa fille, dans des documents de justice dévoilés par le site TMZ jeudi 12 août. Franceinfo vous raconte la bataille en justice qui a abouti à cette avancée.

Une trajectoire stoppée par la maladie

Replongeons-nous 23 ans en arrière. La France gagne la Coupe du monde et vote les 35 heures, Gerhard Schröder devient chancelier en Allemagne et l'affaire Monica Lewinsky secoue les Etats-Unis. C'est bon, vous situez ? A la radio, le tube du moment est chanté par une ado de 16 ans originaire du Mississippi.

Le monde découvre Britney Spears qui devient numéro 1 des ventes avec Baby One More Time et enchaîne les tubes : Oops!... I Did It Again, Crazy, I'm a Slave 4 U, Toxic ou encore Everytime. Au total, pendant ses cinq premières années de carrière, la chanteuse vend plus de 60 millions d'albums.

La vie de la superstar dont le style d'écolière a conquis le monde alimente aussi la presse people : rupture avec Justin Timberlake, baiser langoureux avec Madonna aux MTV Music Awards, mariage express de 55 heures avec un ami d'enfance… Fin 2004, elle épouse le danseur Kevin Federline. Ensemble, ils ont deux enfants, avant de se séparer trois ans plus tard. La carrière musicale de Britney Spears marque une pause.

En février 2007, Britney Spears entre dans un salon de coiffure, s'empare d'une tondeuse et se rase le crâne, sous l'objectif des paparazzi qui la traquent sans répit. A la sortie, elle frappe les photographes à coups de parapluie. Elle est alors en plein divorce et Kevin Federline obtient la garde de leurs enfants. La chanteuse souffre de dépression et finit par suivre un traitement.

Hospitalisée en janvier 2008, après avoir refusé de laisser ses enfants à son ex-mari, Britney Spears est placée sous la tutelle de son père, James Spears, dans des conditions strictes. Son tuteur est chargé de contrôler à la fois les finances de sa fille, mais aussi l'ensemble des décisions de sa vie personnelle. Depuis treize ans, la star ne dispose donc d'aucune autonomie. La tutelle a d'ailleurs été à plusieurs reprises prorogée par les tribunaux, sans que les raisons n'aient été rendues publiques, relève la BBC (en anglais).

Le mouvement #FreeBritney prend de l'ampleur

Depuis quelques années, des fans de la chanteuse la soutiennent, dans un mouvement baptisé #FreeBritney (#LibérezBritney en français). Convaincus qu'elle est maintenue sous tutelle contre son gré et qu'elle envoie des appels à l'aide codés sur Instagram, ils organisent des manifestations pour demander la levée de cette tutelle. D'abord limité à ses plus fervents admirateurs, le mouvement a gagné en popularité en février, à la faveur du documentaire Framing Britney Spears, diffusé en France sur Amazon Prime.

La réalisatrice Samantha Stark y revient sur la carrière de la chanteuse, sa dépression, puis son placement sous tutelle. Déjà en 2016, le New York Times (en anglais) avait évoqué la radicalité de cette tutelle : "Ses achats les plus communs, comme une boisson chez Starbucks ou une chanson sur une plateforme de streaming sont consignés dans des documents judiciaires, dans le cadre du plan de sauvegarde de la fortune qu'elle a gagnée mais ne contrôle pas."

Des manifestants du mouvement #FreeBritney devant le tribunal de Los Angeles (Etats-Unis), le 23 juin 2021. (RICH FURY / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

En 2019, James Spears perd néanmoins une partie de sa tutelle sur sa fille dont il devient le "cotuteur". Il renonce aux responsabilités concernant les décisions de la vie quotidienne de Britney Spears, mais reste responsable de sa fortune, estimée à 60 millions de dollars (un peu plus de 50 millions d'euros), selon Forbes. Une tutrice professionnelle est désignée pour gérer les décisions "personnelles" de la star.

Elle dit être empêchée d'avoir un enfant

En avril 2021, les avocats de la chanteuse demandent à ce qu'elle puisse s'adresser directement à la juge en charge de son dossier. Une audience est fixée au 23 juin. Devant le tribunal de Los Angeles, la chanteuse a enfin une tribune pour détailler les raisons pour lesquelles elle considère cette mesure "oppressive". Le New York Times (article payant) et la BBC font état des révélations glaçantes de Britney Spears qui explique que son père doit valider aussi bien l'identité des hommes avec lesquels elle peut avoir des rendez-vous que la couleur des placards de sa cuisine.

Le magazine Variety (en anglais) a pu se procurer une partie des déclarations de la chanteuse. Elle évoque notamment la période où elle était en résidence à Las Vegas pour assurer des concerts : "Je travaillais sept jours sur sept, sans jour de repos. Si je n'allais pas à mes rendez-vous de 8 heures à 18 heures, je ne pouvais pas voir mes enfants ou mon compagnon", a-t-elle raconté. C'est la première fois que Britney Spears tient des propos aussi virulents en public sur sa situation.

"Je ne suis pas heureuse, je ne peux pas dormir. Je suis tellement en colère."

Britney Spears

au tribunal de Los Angeles

La chanteuse assure par ailleurs qu'on ne l'autorise pas à retirer son stérilet, rapporte le New York Times (article en anglais). En couple depuis près de cinq avec le danseur Sam Ashgari, elle a évoqué sa vie privée à l'audience : "Je veux pouvoir me marier et avoir un enfant", a-t-elle clamé, assurant "pleurer tous les jours". Dans une brève déclaration lue devant le tribunal, James Spears dit être "désolé de la voir dans une telle souffrance", mais n'envisage pas d'évolution de la situation.

Enfin autorisée à choisir son avocat

Pourtant, le vent commence à tourner pour Britney Spears. Certes, le 30 juin, un tribunal rejette une première demande, antérieure à son témoignage, de retirer sa tutelle à son père pour la confier à une entreprise spécialisée, Bessemer Trust. Mais, alors que, l'attention médiatique sur sa situation se fait plus grande, plusieurs acteurs se mettent en retrait : Larry Rudolph, le manager qui gérait sa carrière de longue date, jette l'éponge, et Larry Ingham, l'avocat commis d'office attribué à Britney Spears depuis 2007, demande à être démis de ses fonctions. S'il s'était récemment fait plus critique de la tutelle, il est une figure honnie des fans, qui doutent qu'il défende efficacement les intérêts de sa cliente. Dans son audience en juin, la chanteuse a notamment expliqué qu'elle ignorait qu'il était possible de demander la levée de sa tutelle, plutôt qu'un simple changement de gestionnaire.

Le 14 juillet, Britney Spears obtient pour la première fois de la justice le droit de choisir son propre avocat. Cette possibilité lui était jusqu'alors refusée au nom de sa tutelle, qui stipule aussi que c'est la chanteuse qui paye les avocats chargés de défendre ses tuteurs, et donc de s'opposer à ses propres demandes. Sur Instagram, elle célèbre en faisant la roue la désignation de Matthew Rosengart, avocat de stars comme Sean Penn et Steven Spielberg. Moins de deux semaines plus tard, celui-ci dépose une nouvelle demande pour que la tutelle soit retirée à James Spears et confiée à un comptable qui ne se chargerait que de ses finances.

C'est dans ce contexte que le site people TMZ (article en anglais) a révélé jeudi le revirement du père de la chanteuse. Dans des documents juridiques, il assure avoir l'intention de "travailler avec la cour et le nouvel avocat de sa fille pour préparer une transition en douceur vers un nouveau tuteur" et vouloir mettre fin à la "bataille publique" sur le sort de Britney Spears. Cependant, dans ces mêmes documents, James Spears défend toujours son action, juge "hautement discutable" le bien-fondé de son remplacement à la tête de la tutelle, et n'envisage un retrait qu'après avoir résolu "des questions en attente", notamment autour d'un rapport comptable sur les finances de l'artiste. De son côté, Matthew Rosengart assure qu'il reste déterminé à enquêter sur le comportement du père de sa cliente, notamment l'utilisation de sa fortune.

Les fans peuvent ainsi espérer un succès du mouvement #FreeBritney. Le retour de leur idole sur scène est en revanche plus incertain. Le 17 juillet, sur Instagram, Britney Spears avait affirmé arrêter sa carrière, du moins "tant que [s]on père décide ce qu'[elle doit] porter, dire, faire, et penser".

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