Le jeu vidéo bac-à-sable "Roblox" dépasse les 100 millions d'utilisateurs
Son succès se fonde notamment sur la création du contenu vidéo-ludique par la communauté.
Jouer gratuitement en multijoueurs mais également construire ses propres mini-jeux, en ciblant enfants et adolescents. C'est le cocktail à succès que propose Roblox, la plateforme de jeux vidéo qui vient de franchir les 100 millions d'utilisateurs, dépassant une référence du genre, Minecraft.
En annonçant début août avoir franchi cette barre symbolique, Roblox confirme son succès dans le sillage de Fortnite ou du petit dernier d'Electronics Art, Apex Legends, sur un modèle sensiblement identique : gratuit d'accès mais incitant à la dépense pour obtenir des accessoires dans les jeux.
Courses, évasions, plongeons, attractions
Jusqu'ici principalement américains ou asiatiques, désormais également européens, les utilisateurs de Roblox, le plus souvent des enfants ou adolescents dont la majorité a entre 9 et 12 ans, se précipitent sur l'application mobile ou sur ordinateur après l'école. Leur objectif : participer à des courses semées d'embûches, s'échapper d'une prison, plonger à la recherche de trésors enfouis ou construire leur propre parc d'aventures.
L'esthétique du jeu se caractérise par son simplisme et un aspect cartoon assumé. Les jeux en 3D sur Roblox ont la particularité d'être entièrement conçus par des jeunes utilisateurs - généralement ceux âgés de plus de 16 ans - au sein d'un univers qui leur fournit les outils pour coder. "Ce n'est pas un jeu, c'est une plateforme pour créer et jouer", expliquait à l'AFP Chris Misner, président de Roblox International en début d'année.
Pas un sou de publicité
Une stratégie judicieuse, pour Laurent Michaud, directeur d'étude au centre de réflexion Idate : "On sous-estime beaucoup la manière dont la production de contenus par les utilisateurs génère de l'engagement de l'audience", a-t-il estimé mardi.
Un engagement qui a une conséquence selon Chris Misner : Roblox ne dépense pas un sou en publicité, se fondant uniquement sur le bouche-à-oreille auprès de sa principale cible, les 6-12 ans. "Nous avons des flux de trésorerie positifs", a assuré le président, dont l'entreprise revendique désormais une valorisation de 2,5 milliards d'euros, après sa dernière levée de fonds en septembre dernier.
"Ils sont partis de rien, sans communauté ni licence connue. Mais désormais la communauté est solide, le jeu est bon, il est appelé à s'installer durablement dans cette tranche de population", prédit Laurent Michaud.
Jouer d'abord, payer après
Roblox tire ses revenus des dépenses des utilisateurs, et entre dans la case des jeux "free-to-play". Si jouer est gratuit, il faut se procurer des "Robux", une monnaie virtuelle, pour réaliser des achats dans le jeu, personnaliser son personnage ou avancer plus rapidement.
Des revenus partagés avec les créateurs de mini-jeux, qui se partageront 100 millions de dollars en 2019, certains touchant même beaucoup : après avoir donné naissance à plusieurs mini-jeux, un jeune Américain de 19 ans a récolté plus d'un million d'euros grâce au succès de son Jailbreak ("Évasion"), lancé en avril 2017. Mais la majorité des 56 millions de jeux disponibles ne suscite pas de réel engouement et ne profitera jamais à leurs créateurs.
"L'année dernière je jouais à "Blocks Bird" avec des amis. Il faut avoir un métier, tu peux fabriquer des maisons et aller dans la maison de tes amis pour faire une fête, raconte Edouard Chatelain-Moor, un habitant de Washington de 11 ans. Maintenant je joue rarement. Il y a beaucoup de jeux très bien, mais au bout d'un moment on se lasse un peu, parce que les mises à jour sont rares."
10 ans pour décoller
Lancé en 2006 sur PC, Roblox a décollé dix ans plus tard. La plateforme est aujourd'hui disponible sur la plupart des supports, des consoles aux casques de réalité virtuelle, et elle organise des colonies thématiques pour apprendre aux enfants à coder des jeux.
Quelque 700 modérateurs surveillent la plateforme, ce qui n'empêche pas les incidents : en juin 2018, une petite fille américaine de 7 ans a ainsi montré à sa maman la tablette où son avatar était en train d'être agressé par deux autres avatars masculins. Une scène que la mère, Amber Petersen, a décrite comme un "viol en réunion".
"Nous étions bouleversés que quelqu'un ait enfreint le code de conduite de cette façon, réagit Chris Misner. C'était un incident très spécifique. Nous avons pu le maîtriser rapidement et mettre en place des protections", affirme-t-il. Un incident sans conséquence cependant, puisque deux mois plus tard, le bac à sable des jeux vidéo réalisait une nouvelle levée de fonds.
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