César 2020 : face à "une escalade de propos déplacés", l'ensemble de l'équipe du film "J'accuse" ne sera pas présente à la cérémonie

"Il aura fallu 120 ans pour qu'un film français soit consacré à l'Affaire Dreyfus. J'accuse rend hommage à un héros oublié, le colonel Picquart, grâce à qui l'innocence de Dreyfus a pu être révélée. Nous sommes fiers de l'avoir fait", déclare Alain Goldman, le producteur du film réalisé par Roman Polanski, en préambule à une déclaration transmise à l'AFP et relayée sur Twitter à quelques heures du coup d'envoi de la 45e cérémonie des César. Déclaration dans laquelle il explique les raisons de sa décision.

Déclaration intégrale de Alain #GOLDMAN, producteur de #JAccuse le film de Roman #Polanski (#AFP) #cesars2020 pic.twitter.com/0BdAZ1GB9t

— Jean-François Guyot (@JFGuyot) February 28, 2020

Jeudi, Roman Polanski, accusé d'agressions sexuelles par plusieurs femmes, avait annoncé qu'il ne serait pas présent vendredi soir à la salle Pleyel où la cérémonie doit se tenir.

Dans son communiqué, Alain Goldman, producteur de J'accuse explique d'abord le contexte qui a motivé sa décision de se retirer à son tour de la cérémonie : "Malgré les 12 nominations du film pour les César 2020, nous avons constaté une escalade de propos et de comportements déplacés et violents. Le ministre de la Culture lui-même, représentant l'autorité de l'Etat, s'est autorisé une déclaration condamnant par avance et sans le connaître le résultat d'un vote professionnel, indépendant et secret." Il faisait allusion aux propos de Franck Riester qui, vendredi matin sur franceinfo, avait estimé qu'attribuer le César du meilleur réalisateur à Roman Polanski contituerait un "symbole mauvais par rapport à la nécessaire prise de conscience que nous devons tous avoir dans la lutte contre les violences sexuelles et sexistes".

"Nous ne pouvons accepter que le vote démocratique des 4.313 membres de l'Académie soit remis en cause par un tribunal d'opinion", souligne Alain Goldman, soulignant que "la France est un État de droit".

"Pour toutes ces raisons, nous avons donc décidé de ne pas être présents à la cérémonie des César 2020", dit-il, sans préciser qui était inclus dans ce "nous". Il a précisé un peu plus tard auprès de l'AFP : "L'ensemble des nommés pour le film ne sera pas présent à la cérémonie."

Jean Dujardin affiche sa déception

Sur son compte Instagram, l'acteur oscarisé de The Artist Jean Dujardin a publié pour sa part des photos du journal L'Aurore en train de brûler, avec à la Une l'article d'Emile Zola "J'accuse" sur l'Affaire Dreyfus. "Je voudrais simplement rappeler que J'accuse est le titre d'un article assez célèbre d'Emile Zola, j'espère que cela ne gêne personne ? Bonne soirée !"

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Je voudrais simplement rappeler que J'accuse est le titre d'un article assez célèbre d'Emile Zola, j'espère que cela ne gêne personne ? Bonne soirée ! Photos du tournage @guyferrandis

Une publication partagée par Jean Dujardin (@jeandujardin) le 28 Févr. 2020 à 6 :27 PST

Dans le film de Polanski, Dujardin incarne le lieutenant-colonel Picquart, chef des services de renseignement qui avait diffusé les preuves permettant d'innocenter le capitaine Dreyfus.

Des manifestations attendues aux abords de la salle Pleyel

Roman Polanski avait annoncé jeudi à l'AFP qu'il ne se rendrait pas à la cérémonie vendredi soir, alors que des féministes ont prévu de manifester contre les 12 nominations de son thriller historique sur l'Affaire Dreyfus. "Des activistes me menacent déjà d'un lynchage public", avait-il notamment déploré.

La 45e cérémonie des César se tient vendredi soir sous haute tension, sur fond de réformes attendues - notamment sur la parité - et de vives protestations contre les nominations de J'accuse de Roman Polanski. La grand-messe annuelle du cinéma français doit être précédée dès 18H00 par un rassemblement à l'appel d'associations féministes, dont #NousToutes et Osez le féminisme. Ces associations refusent que des "honneurs" soient accordés au cinéaste visé par plusieurs accusations de viol et toujours poursuivi par la justice américaine pour relations sexuelles illégales avec une mineure en 1977.