Exposition à Angoulême : "De Popeye à Persépolis", comment BD et dessin animé sont devenus des "vecteurs majeurs" de la culture de masse
Cette exposition, présentée à Angoulême (Charente), montre comment BD et cinéma d'animation sont intimement liés et leur rôle majeur dans la diffusion de la culture populaire dans le monde.
L'exposition De Popeye à Persepolis : bande dessinée et cinéma d'animation a ouvert ses portes au public le 26 janvier, en avant-goût du festival international de la bande dessinée d'Angoulême, reporté en mars pour raisons sanitaires. Cette riche exposition propose au visiteur de découvrir les relations entre la bande dessinée et le cinéma d'animation, dont les histoires sont depuis toujours entremêlées.
Dans un espace de 400 m2, le visiteur peut découvrir plusieurs centaines de pièces, des planches, des dessins, des documents, mais aussi des appareils de projection, des films d'archives ou encore des installations contemporaines. L'exposition est à voir jusqu'au 6 novembre 2022.
Culture de masse
Cette exposition s'attache à montrer comment bande dessinée et dessin animé ont servi de support à la diffusion d'une culture de masse, jouant un rôle majeur dans la construction de nos civilisations contemporaines, dont l'image est devenue l'une des pièces maîtresses. "Les veines les plus productives et les plus intéressantes de la culture populaire sont la BD et le cinéma d'animation, et aussi la musique", souligne Anne Hélène Hoog, directrice du musée de la cité internationale de la bande dessinée d'Angoulême, et co-commissaire de l'exposition.
L'exposition montre comment 7e et 9e art ont grandi ensemble, se déployant dans le monde entier, leurs histoires respectives génétiquement liées au développement industriel, à l'émergence de savoirs techniques. Des innovations technologiques dont ce sont emparés ses créateurs, de manière expérimentale au début, pour prendre ensuite rapidement une forme hyper industrialisée, avec des modèles de reproduction et de diffusion de masse.
Pantomimes lumineuses
L'histoire nous est racontée de manière chronologique. La première partie de l'exposition s'attache à montrer la naissance fin 19e début 20e des "attractions visuelles", qui trouvent auprès d'un large public un succès immédiat. A l'époque, la bande dessinée ne s'appelle pas encore bande dessinée mais "littérature en estampes", et le dessin animé est alors connu sous le nom de "pantomimes lumineuses".
C'est le début du dessin en mouvement, projeté sur écran. Ces attractions visuelles profitent du développement industriel, et s'emparent de toutes les nouvelles technologies : électricité, imprimerie, cinéma… Elles donnent aussi naissance à "un nouveau langage, en images, universellement compréhensible par tous", souligne Anne Hélène Hoog.
"Le monde est en train de changer, et la bande dessinée et le dessin animé vont constituer des vecteurs essentiels de ce changement, des vecteurs essentiels dans la diffusion de la culture de masse", ajoute Pascal Vimenet, expert en cinéma d'animation, co-commissaire de l'exposition.
On découvre ainsi dans ce premier espace de l'exposition, comme un cabinet de curiosité avec lumière tamisée, cette effervescence. Y sont exposés les pionniers, de Töpffer à Reynaud, en passant par Emile Cohl ou Winsor McCay. Parmi les pépites, Pauvre Pierrot (1892), d'Emile Reynaud, considéré comme le premier dessin animé de l'histoire.
On y découvre aussi les premiers projecteurs "Pathé kid", qui amenaient les dessins animés jusque dans les salons des foyers, mais aussi des anecdotes amusantes : "les films étaient projetés dans les foires, les forains achetaient la pellicule au mètre et recollaient les morceaux au hasard et projetait ça au public, qui voyait ainsi un patchwork de films mélangeant actualités, scènes de cinéma, ou de dessins animés", raconte Pascal Vimenet.
Popeye, Mickey, Betty Boop Superman et les autres
Cette culture de l'image s'est aussi propagée à travers les héros dessinés, des figures cultes, des stars, que l'exposition met en avant dans un espace dédié, tout en longueur, donnant l'impression d'entrer dans leur monde merveilleux. Mickey, Bécassine, Betty Boop… "Ces figures deviennent vite des objets commerciaux, déclinés sous toutes les formes, figurines, jouets, on les retrouve au cinéma, dans les magazines, dans les publicités, ils entrent littéralement dans les foyers", assure Anne Hélène Hoog.
L'exposition montre également l'émergence d'une contre-culture, à laquelle participent une fois encore ces deux médias, à travers des figures de super héros comme Superman ou Mister Magoo, qui figurent pour l'un la puissance protectrice de l'Amérique, pour l'autre sa face moins glorieuse, mercantile et consumériste.
A l'autre bout du monde, le phénomène du manga synthétise au Japon cette relation fusionnelle entre bande dessinée et cinéma d'animation.
"Silicone vallée"
Un dernier espace propose au visiteur de montrer comment, de Popeye à Persépolis, en passant par Murakami ou Winshluss, ces images produites par la BD ou le cinéma d'animation "bouleversent une certaine vision du monde".
"On comprend mieux pourquoi on attache beaucoup d'importance au cinéma d'animation, ou à la bande dessinée, qui sont une manière d'être et de partager ensemble les mêmes références culturelles", conclut Anne Hélène Hoog, qui ne manque pas de rappeler comment la ville d'Angoulême est devenue, à sa manière, la "Silicone Valley" à la française de ces deux disciplines.
"De Popeye à Persépolis", jusqu'au 6 novembre 2022 au musée de la Cité internationale de la bande dessinée d'Angoulême
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