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Tour de France 2021 : Arkea-Samsic et B&B Hôtels, deux équipes bretonnes qui ont la cote

Comme l'an passé, deux équipes bretonnes sont engagées sur le Tour de France qui s’élance samedi de... Bretagne. Tout sauf un hasard. 

France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7 min
Warren Barguil et Clément Russo avant la première étape du Critérium du Dauphiné, le 30 mai 2021.  (ALAIN JOCARD / AFP)

Pour la deuxième année consécutive, deux équipes bretonnes prennent le départ de la Grande Boucle, samedi 26 juin : Arkea-Samsic et B&B Hotels p/b KTM. En d'autres mots, un tiers des équipes françaises engagées sur ce Tour 2021 sont basées au pays des galettes-saucisses, du loup, du renard et de la belette, région souvent présentée comme la "fille aînée du cyclisme". "Ça valide la place du vélo en Bretagne, et la place de la Bretagne dans le vélo", résume, avec le sens de la formule, le coureur breton Franck Bonnamour, passé par Arkea-Samsic (basé à Bruz, en Ille-et-Vilaine) avant de rejoindre B&B Hotels à Theix, dans le Morbihan.

"C'est merveilleux d'être invités une nouvelle fois, surtout avec ce grand départ chez nous, en Bretagne", savoure Jérôme Pineau, manager général de B&B, qui compte notamment Pierre Rolland, Quentin Pacher ou Bryan Coquard dans ses rangs. Même joie pour la star armoricaine, Warren Barguil, qui pédale aux côtés de Nairo Quintana et Nacer Bouhanni : "Ça aurait été dur pour B&B ou nous [Arkea-Samsic] de ne pas prendre ce départ à la maison. On aura une motivation supplémentaire, parce qu'on roule à domicile." Deux invitations tout sauf illogiques pour les deux formations bretonnes vu l'amour de la péninsule pour la pédale.

La Bretagne adoube la Petite Reine

Ce n'est plus à prouver, la Bretagne est une terre de vélo qui célèbre la Petite Reine. Fondateur du site Sportbreizh, dédié à l'actualité cycliste bretonne – et preuve en soi de la passion des locaux pour le vélo –, Gurvan Musset dresse le tableau : "Il y a une ferveur ici qu'on ne retrouve qu'en montagne et en Vendée. Tout l'hiver, la grosse inquiétude des gens, ça a été de savoir comment faire pour contourner un éventuel huis clos et voir le Tour cet été." Fierté régionale au même titre que les dolmens et le beurre demi-sel, Warren Barguil ajoute : "Le cyclisme fait partie de l'ADN breton, comme le foot. C'est comme ça." Et cela depuis toujours, dans une région assez agricole fertile en champions : Bernard Hinault, Louison Bobet, Jean Robic hier, David Gaudu, Warren Barguil ou Valentin Madouas aujourd'hui.

"En Bretagne, le cyclisme alimente notre petit chauvinisme. C'est un sport avec ce supplément d'âme qu'on apprécie, ça contribue au sentiment d'appartenance des Bretons."

Gurvan Musset

à franceinfo: sport

Longtemps, la Petite Reine a d'ailleurs été vecteur d'ascensions sociales pour des coureurs issus de milieux populaires, comme Bernard Hinault, fils de paysan, et Louison Bobet, fils de boulanger. "C'est un sport qui porte des valeurs chères au territoire comme l'abnégation, le courage, la simplicité, la popularité. La Bretagne a ça dans le sang, c'est un territoire où chaque village a sa côte mythique, son champion", ajoute Jérôme Pineau, le manager général de B&B Hotels, pour expliquer cette romance bretonne.

Dans la pratique, cet engouement se traduit dès les catégories de jeunes, où la Bretagne fait figure de référence avec ses multiples courses chaque week-end, là où il faut parfois parcourir plusieurs centaines de kilomètres ailleurs dans l'Hexagone pour prendre un départ. "C'est une région très concurrentielle, c'est beaucoup plus difficile de réaliser des performances mais ça nous pousse à être plus fort, et ça fait de plus belles courses", se souvient Warren Barguil.

Et cela forme aussi une redoutable sélection de Bretagne aux championnats de France : "Gagner sa place en équipe de Bretagne, c'est déjà énorme, la concurrence est redoutable parce que le niveau est très élevé. Le niveau du championnat de Bretagne est impressionnant. Quand tu performes sur la Bretagne, généralement tu joues la médaille au championnat de France", analyse Gurvan Musset.

Le "Breizh'il" du cyclisme français

Le débouché logique de cet entonnoir, ce sont les deux équipes professionnelles engagées sur le Tour de France 2021 : Arkea-Samsic, et B&B Hotels p/b KTM de Jérôme Pineau, qui ajoute : "À mon époque, on me disait d'aller courir en Bretagne pour jauger mon niveau. On a un vivier incroyable sous la main, mais c'est à nous d'animer ce réseau aussi." Ajoutez à cela un terrain escarpé, qui offre des routes diverses et variées de la plaine aux bosses, le tout baigné par un doux soleil parfois refroidi par un vent capricieux, et vous obtenez un terrain d'entraînement que beaucoup résument en un mot : "idéal".

"Le terreau est fertile. On a beaucoup d'équipes, beaucoup de courses professionnelles aussi. Il faut aussi saluer l'écoute des pouvoirs publics qui savent qu'avoir une équipe de vélo sur le territoire, c'est vecteur d'images."

Gurvan Musset

à franceinfo: sport

C'est d'ailleurs cette culture cycliste qui a attiré le Normand Jérôme Pineau en Bretagne, lorsqu'il a créé son équipe en 2018 : "Le vélo est une religion ici, ça collait avec notre projet qui vise à reprendre le cyclisme sur une idée de formation, de défense du territoire. C'est pour ça qu'on a beaucoup de partenaires bretons. Et puis, disons-le, c'est aussi sûrement plus facile de monter une équipe ici entre les épreuves cyclistes professionnelles, le vivier de clubs et le tissu associatif."

Jens Debusschere et Bryan Coquard avant le Tour des Flandres, le 4 avril 2021. (LAURENT LAIRYS / LAURENT LAIRYS)

Et pour garnir les rangs de ces équipes, il n'y a pas à chercher bien loin, puisque les petites et petits bretons montent vite en selle. Passé par trois équipes locales, Franck Bonnamour n'imagine pas quitter sa chère Bretagne armoricaine, sa femme, son fils et son domaine : "Pour l'instant, je ne pense pas partir. Il y a deux belles équipes en Bretagne, ça attire. Personnellement, je suis assez fier d'être breton, je le revendique, donc être dans une équipe bretonne, c'est un plus."

Un point de vue partagé par Warren Barguil, parti un an à Nice au début de sa carrière, avant de vite revenir chez lui : "J'étais déprimé à Nice, j'avais besoin de revenir ici, de retrouver ma famille, mes amis, ma vie bretonne." A tel point que Wawa a même quitté une équipe World Tour en 2017 (Sunweb) pour rejoindre Fortuneo-Samsic (devenu Arkea-Samsic) en Continental Pro, l'échelon du dessous, équipe basée à une heure de chez lui.

Beaucoup n'ont pas compris mon choix à l'époque, mais c'était motivé par l'amour de la Bretagne et le projet sportif. J'avais envie de rouler pour une équipe bretonne, de recourir à la maison, c'est très valorisant.

Warren Barguil

à franceinfo: sport

Une tradition toujours d'actualité, un terrain de jeu varié, des collectivités et partenaires locaux investis, une ferveur, des coureurs locaux… Autant de raisons qui expliquent que la Bretagne soit la région française la mieux représentée sur ce Tour 2021. Et cerise sur le kouign amann : ce départ sera donné de Brest, avant d'arpenter l'Armorique de long en large pendant quatre étapes.

"Petite rivalité, forcément"

"C'était spécial de préparer cette première semaine, surtout pour moi avec un départ juste à côté de la maison, à Perros-Guirec. Le Tour passera chez moi à Lannion, c'est rare de passer par Lannion...", s'amuse Franck Bonnamour. Breton, amoureux de vélo mais aussi directeur en chef de France Bleu Breizh, Gurvan Musset ajoute : "Depuis des mois, on sent vraiment l'engouement chez tout le monde. On voit déjà des gens qui roulent tous les jours sur les lieux d'arrivées."

"Il y a une effervescence encore plus importante que lors du dernier départ de Brest en 2008, peut-être parce qu'il y a plus de coureurs bretons que la dernière fois. Si un Breton gagne un étape du Tour en Bretagne, il aura une statue. Surtout si c'est avec une équipe bretonne."

Gurvan Musset

à franceinfo: sport

Reste à savoir laquelle : Arkea ou B&B ? "Il y a une petite rivalité, forcément, mais qui est très saine. Ce n'est pas parce qu'une équipe court dans une échappée que l'autre va rouler à fond derrière. Arkea et B&B ont des objectifs différents sur une course comme le Tour", assure Franck Bonnamour, qui ajoute toutefois : "Affronter l'autre équipe bretonne, ça peut être une petite motivation supplémentaire". Mais son manager Jérôme Pineau conclut : "C'est seulement sportif, la cohabitation se passe très bien. Il y a largement la place pour nos deux équipes en Bretagne". Et sur le Tour de France.

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