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Marin Cilic, du paria au héros

A 20 jours de son 26e anniversaire, Marin Cilic s'est offert un énorme cadeau en remportant l'US Open, aux dépens de Kei Nishikori. Et le Croate, coaché par Goran Ivanisevic, revient de très loin. Voici un an, il était en-dehors du circuit, pour avoir été contrôlé positif à un stimulant. Condamné à 9 mois de suspension, sa peine avait été réduite à quatre. Rapidement présenté comme un possible successeur à Ivanisevic au palmarès d'un tournoi du Grand Chelem, il a dû patienter pour atteindre le sommet.
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5min
 

"Je  suis sur le toit du monde." Marin Cilic n'en revient pas. Quatre ans après avoir atteint pour la première fois de sa carrière une demi-finale en Grand Chelem, à Melbourne, quatre ans après être entré dans le Top 10 à seulement 21 ans, le voilà enfin avec un titre du Grand Chelem à son actif. "Je suis plus fort mentalement, je suis plus exigeant, j'attends plus de choses de moi quand je suis sur le court et quand je m'entraîne. Je prends  aussi plus de plaisir aussi que ces dernières années", avoue-t-il pour expliquer son évolution. A force d'attendre, on l'avait presque mis de côté dans les listes de prétendants. Il a fallu un US Open à rebondissements, marqué par l'absence de Rafael Nadal, pour que le Croate revienne dans la lumière. "Cela me paraît irréel d'être présenté comme un vainqueur d'un  Grand Chelem, j'en ai rêvé toute ma vie et tout a changé lors des quatre-cinq  derniers jours", raconte-t-il.

Et il sait parfaitement à quoi a tenu son succès à New York. "Depuis le 5e set contre (Gilles) Simon (en 8e de finale), j'ai  joué incroyablement bien et j'ai enchaîné ces victoires contre des joueurs de  top-niveau." Le Français était sa bête noire. Quatre matches, quatre défaites. Et un cinquième set n'était pas une garantie de succès sur un Français plutôt résistant en général. Mais le 12e mondial a renversé sa "petite montagne" avant de gravir une plus grande, en battant Kei Nishikori en finale. Ces deux victoires, sans oublier celle contre Roger Federer en demi-finale, ne sont pas le fruit du hasard: "Depuis que j'ai réussi de  bons résultats en 2010, les résultats ne venaient plus vraiment, je ne m'amusais plus autant. Maintenant, je suis plus relax, j'apprécie chaque moment. Ce  plaisir retrouvé, c'est Goran qui me l'a apporté."

Goran Ivanisevic, celui à qui il vient de succéder au palmarès d'un Grand Chelem pour le Croatie, voilà la source de sa transformation. "Avec Goran, on a travaillé très dur dès le premier jour. C'était  quelqu'un de très athlétique quand il jouait, on a beaucoup travaillé sur cela, cela m'a permis d'apporter une dimension supplémentaire à mon jeu, j'ai  progressé à tous les niveaux. Lorsqu'il jouait, c'était quelqu'un de très  émotionnel. Mais comme entraîneur, il est différent: il m'a apporté son savoir  du tennis et le plaisir. Il m'a dit qu'il fallait que je sois  agressif, que je passais trop de temps à penser à la tactique et pas assez à  mon jeu. Il a fallu changer mon approche et mon état d'esprit, il a fallu  cinq-six mois pour que j'intègre cela."  Cet état d'esprit nouveau s'est reflété en fin de tournoi: "Contre les trois-quatre derniers joueurs que j'ai affrontés, j'avais un bilan négatif. J'ai abordé chacun de ces matches avec  comme seule ambition, gagner. Quand j'y pense, c'est une sorte de miracle"

La galère de la suspension

Il y a Goran Ivanisevic, mais il y a aussi une histoire, de celle qui rend les gens plus forts ou au contraire les abat. En 2013, au début du mois de mai, au tournoi de Munich, Marin Cilic subit un contrôle antidopage, qui se révèle positif, à la nicéthamide, un stimulant cardiovasculaire. Son explication ? Avoir consommé des tablettes de glucose sans savoir qu'elles contenaient ce produit. Cela ne convainc que modérément les juges qui le condamnent à neuf mois de suspension, à compter du 1er mai. C'est pour cela, et non à cause d'une blessure comme prétextée alors, qu'il se retire de Wimbledon juste avant d'affronter Kenny De Schepper, au 2e tour. Il engage alors un combat pour se disculper. Le Tribunal arbitral du sport (TAS) finit par lui donner raison, en réduisant sa peine de 9 à 4 mois. Et c'est donc à Bercy, fin octobre, qu'il reprend le cours de sa carrière. Tout ce temps-là lui a servi: "J'ai regardé beaucoup de matches, pour essayer de voir des choses, j'ai  trouvé que Rafa avait joué très bien et que Wawrinka avait réussi à se révéler.  Je m'entraînais physiquement et je jouais au tennis, je voulais juste revenir  sur le circuit, j'attendais ce moment avec impatience".

Incontestablement doué, joueur offensif s'appuyant sur un énorme service qui tombe du haut de son mètre quatre-vingt-dix-huit, Marin Cilic est passé tout près d'un beau gâchis. Cette prise de conscience l'a sans nul doute aidé à remporter l'US Open 2014. 

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