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Roland-Garros : Rafael Nadal est-il (enfin) prenable ?

L'octuple vainqueur de Roland-Garros ne nous avait pas habitué à enchaîner les défaites sur terre battue avant son tournoi fétiche, comme c'est le cas ces dernières semaines. 

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Rafael Nadal fête sa victoire en demi-finale du tournoi de Rome, contre le Bulgare Grigor Dimitrov, le 17 mai 2014.  (TIZIANA FABI / AFP)

"Ce n'est pas possible de gagner facilement pendant dix ans", reconnaît Rafael Nadal. Le tennisman espagnol suscite l'interrogation après avoir perdu trois matchs en quelques semaines sur terre battue. Contre Novak Djokovic en finale du tournoi de Rome, dimanche 18 mai, passe encore. Mais contre ses compatriotes Nicolas Almagro et David Ferrer, qui ne lui avaient pratiquement jamais pris un set, cela est plus étrange. Alors que Roland-Garros commence dimanche 25 mai, faut-il miser un billet sur Novak Djokovic, ou encore Stanislas Wawrinka ? 

Oui, Djokovic a trouvé la clé

La rivalité entre Rafael Nadal et Roger Federer continue d'attiser les passions entre les fans, mais le vrai affrontement au sommet du tennis mondial se passe entre l'Espagnol et Novak Djokovic. Les bookmakers ne s'y trompent pas : les deux joueurs, qui ne pourront se rencontrer qu'en finale de ce Roland-Garros, ont la faveur des pronostics. Djokovic est le seul joueur à avoir battu régulièrement Nadal, d'abord en 2011 avec une série de sept victoires de rang, et depuis 2013, avec quatre victoires d'affilée. Aussi fort athlétiquement que Nadal, le Serbe est le seul joueur qui parvient à ne pas être mis sur la défensive par le jeu de l'Espagnol. 

Oui, son genou constitue son point faible

Il y a eu le talon d'Achille, la "keuïïïïsse" de Zidane chantée par la marionnette de Francis Lalanne aux "Guignols", et le genou de Rafael Nadal. Cette articulation est mise à rude épreuve par le jeu tout en puissance de l'Espagnol, comme le détaille l'infographie du New York Times. Rafael Nadal a mis sept mois à se remettre de sa précédente blessure, contractée après Wimbledon 2012. "On ne sait pas exactement à quel point il a des problèmes avec ses appuis, pour savoir où mettre le poids du corps", explique au New York Times (en anglais) son ancien entraîneur Emilio Sanchez.

Rafael Nadal retourne la balle lors d'un match contre l'Ukrainien Alexandr Dolgopolov, lors du tournoi de Rio de Janeiro (Brésil), le 23 février 2014.  (PILAR OLIVARES / REUTERS)

Oui, il commence à vieillir

L'un des deux titres décrochés par Rafael Nadal depuis le début de la saison doit beaucoup à l'abandon du Japonais Kei Nishikori en finale des masters de Madrid, qui l'avait promené sur le court. Oui, Rafael Nadal est tout sauf souverain : il lui a fallu plus de trois heures pour se débarrasser du Français Gilles Simon, au 2e tour du tournoi de Rome. Nadal a mis cela sur le compte de l'âge : "Vous n'êtes pas habitués à me voir souffrir lors des premiers tours ? Il va falloir vous y faire. Les années passent, ça fait partie de la carrière de tous les joueurs." Même s'il n'a que 27 ans, l'Espagnol tourne depuis déjà 10 ans au plus haut niveau, sans parler de ses années chez les juniors. Sa mère a pensé un temps le retirer à son oncle Toni, qui lui faisait subir des entraînements trop durs. "J'en revenais en pleurant", raconte Nadal dans son autobiographie (en anglais). A son âge, Björn Borg, l'ex-détenteur du record du nombre de victoires porte d'Auteuil, était déjà à la retraite.

Oui et non, il fait toujours mal sur terre battue

Le jeu de Rafael Nadal a beaucoup évolué depuis le début de sa carrière. D'abord pur terrien, il est devenu un joueur complet, capable de battre Federer dans son jardin de Wimbledon. "Il a tellement modifié son jeu sur dur que ça a modifié son jeu sur terre", explique l'ancien joueur Sébastien Grosjean dans L'Equipe (article abonnés). En témoignent ses débuts poussifs lors des derniers Roland-Garros.

Pourtant, quand Rafael Nadal évoque sur ESPN le jeu idéal sur terre battue, il n'est pas loin de se décrire : "Jouer au tennis sur terre battue nécessite d'avoir la vitesse d'un sprinter qui décolle des starting-blocks et l'endurance d'un marathonien. Tu t'arrêtes, tu redémarres, tu stoppes, tu repars. Et il faut faire ça deux, trois, parfois quatre heures." Malgré son changement de jeu, il n'en demeure pas loin...

Non, les matchs se jouent en cinq sets à Roland-Garros

"Sur terre battue, on peut survivre à un mauvais jour", a dit un jour Rafael Nadal, cité par Tennis.com. C'est d'autant plus vrai à Roland-Garros. Le format des matchs, en cinq sets, permet d'avoir du temps pour se reprendre après un départ raté. Sans parler du fait que Rafael Nadal n'a pas son pareil pour punir physiquement un outsider après une entame ratée. "Dans un match de cinq ou six heures, ses déplacements sont les mêmes de la première à la dernière minute", relève Ivan Ljubicic dans le documentaire Rafael Nadal, les secrets d'un géant. Magnus Norman, ancien joueur devenu coach de Stanislas Wawrinka, interrogé dans ce même documentaire, acquiesce : "Toutes les balles reviennent. C'est fatigant !"

Non, les autres favoris se cherchent aussi

Si on s'interroge légitimement sur Nadal, que dire de l'état de forme des autres favoris ? Novak Djokovic a certes gagné Rome, mais avait déclaré forfait à Madrid en raison d'un poignet douloureux. Comment mieux raviver la blessure qu'en enchaînant des marathons en cinq sets ? Roger Federer n'a pas perdu tout espoir de décrocher un deuxième Roland-Garros, contrairement à ses fansStanislas Wawrinka peut-il créer la surprise une deuxième fois de suite, après sa victoire à l'open d'Australie en janvier ? Andy Murray parviendra-t-il à dépasser ses limites sur la terre battue ? Sans parler du fait qu'aucun autre joueur n'approche les 93% de victoires sur terre battue de Rafael Nadal (le taux était à 96% jusqu'à début avril, note FiveThirtyEight).

"La seule chose qui change pour Roland-Garros, c'est qu'après dix ans, les gens ne vont pas se dire que je suis le grand favori, estime un Nadal bien content de pouvoir jouer l'outsider, sur ESPN. Mais mon attitude reste la même." Novak, Andy, Stan et Roger, vous êtes prévenus. 

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