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Quelques conseils à Roger Federer pour réussir sa sortie

Éliminé en demi-finale du Masters de Londres, Roger Federer a annoncé qu'il continuerait de jouer l'an prochain. Attention à ne pas faire l'année de trop...

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Le tennisman suisse Roger Federer salue le public du Masters de Londres (Royaume-Uni) après sa victoire sur l'Argentin Juan Martin Del Potro, le 9 novembre 2013.  (CLIVE BRUNSKILL / GETTY IMAGES)

On le surnomme toujours le "Roi Roger" ou le "Maestro", mais cela fait quelques années que Roger Federer ne règne plus sur la planète tennis. Relégué à la sixième place mondiale, battu dimanche 10 novembre par Nadal en indoor, une première, la question de sa retraite se pose de plus en plus souvent. Il a pourtant indiqué qu'il continuait l'an prochain. Peut-être même jusqu'aux Jeux olympiques de Rio (Brésil), en 2016. Si jamais le joueur suisse changeait d'avis l'année prochaine, voilà quelques conseils pour qu'il réussisse sa retraite comme il a réussi sa carrière.

S'arrêter sur une victoire, comme Pete Sampras

Pete Sampras embrasse le trophée de l'US Open, dernier tournoi de sa carrière, le 8 septembre 2002 à New York (Etats-Unis).  (MANNY MILAN / SPORTS ILLUSTRATED / GETTY IMAGES)

Parmi les joueurs qui ont au moins gagné sept Grands Chelem, c'est Pete Sampras qui a réussi cette performance en étant le moins bien classé. Alors 17e mondial, il sort de deux saisons décevantes quand il se présente à New York. Son ancien entraîneur, Paul Annacone, a vu tout de suite dans les yeux marrons du joueur américain que le grand Pete était de retour, raconte-t-il à ESPN (en anglais). En finale, Sampras domine son rival de toujours, Andre Agassi. Après ce succès, il déclare à Sports Illutrated (en anglais) : "Battre Andre en finale, c'est la fin idéale pour mon histoire. Mais j'ai encore envie de jouer." Au fond de lui, il sait déjà. Pendant un an, il s'entraîne quelques jours, puis s'arrête, en disant qu'il n'a plus envie de jouer. Il officialise sa retraite juste avant le début de l'US Open de l'année suivante. "Il avait besoin d'être sûr", explique Paul Annacone.

Toute ressemblance avec la fin de carrière dont rêve Federer - sur un succès à Wimbledon, son jardin ? - ne serait pas purement fortuite. Surtout quand on entend Sampras dire : "Je ne pouvais plus faire un pas sans entendre quelqu'un dire 'tu n'es plus aussi dominateur que par le passé, quand vas-tu raccrocher ?' Après un an, je me demandais si je n'étais pas idiot, je commençais à croire ce qu'ils me disaient." Comparez maintenant avec les propos de Roger Federer : "En 2009 et en 2010, les gens disaient déjà : 'il a tout gagné, maintenant, il est fini'."

S'arrêter avant que le corps lâche, pas comme Andre Agassi

Andre Agassi fait ses adieux au public de l'US Open lors de sa défaite au 3e tour contre Benjamin Becker, qui met fin à sa carrière, le 3 septembre 2006 à New York (Etats-Unis). (MIKE EHRMANN / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

Première page du livre d'Andre Agassi, Open. Le joueur américain raconte le moment où il ouvre l'œil le matin de son premier tour de l'US Open 2006, le dernier tournoi de sa carrière : "Mon dos est bloqué. J'ai l'impression que quelqu'un s'est glissé en douce jusqu'à moi pendant la nuit et m'a attaché la colonne vertébrale avec une de ces barres antivol qu'on fixe sur le volant. Comment pourrais-je jouer l'US Open avec le dos cadenassé ? Vais-je devoir déclarer forfait pour le dernier match de ma carrière ? (...) Mon corps ne veut pas que je prenne ma retraite, en fait, depuis janvier, il l'a déjà prise." Le joueur américain remporte pourtant son premier tour contre le géant chypriote Marcos Baghadatis... et les deux joueurs, perclus de crampes, se retrouvent après le match à l'infirmerie du tournoi pour se faire soigner. Agassi échouera au troisième tour.

Pas d'inquiétude en vue pour Federer, dont l'hygiène de vie est autrement plus raisonnable que celle du fantasque Agassi. Sa préparation, de longues plages de repos intercalées entre les séries de tournoi, détaille Rue89, est taillée pour lui permettre de durer. Jusqu'à quand ?

Ne pas faire douze saisons de trop, comme Jimmy Connors

Jimmy Connors lors de son épopée à l'US Open, en 1991, à New York (Etats-Unis).  (BERMAN NINA/SIPA)

Le plus dur, au tennis, c'est de s'arrêter. En moyenne, note le Wall Street Journal (en anglais), les vainqueurs de tournoi du Grand Chelem frisant la trentaine ont tenté leur chance pendant cinq ans après leur dernier titre. Roger Federer a remporté son dernier Grand Chelem à Wimbledon, en juillet 2012. Il pourrait donc s'entêter à cavaler sur les courts jusqu'en 2017. "Parfois vous êtes juste heureux de jouer, déclare Roger Federer en 2012. Certains ne comprennent pas, et pensent toujours qu’il faut tout gagner, que ça doit toujours être une success story."

Jimmy Connors lui aussi adorait jouer. Il dispute sa dernière finale de Grand Chelem en 1984. Suivent quelques bonnes années (1985 et 87) et de plus en plus de vaches maigres. En 1991, à 39 ans, classé 194e mondial, il se hisse tout de même en demi-finale de l'US Open. "Les onze meilleurs jours de ma vie", confie-t-il plus tard à Sports Illustrated. Il quitte le circuit mondial en 1996, à 44 ans, mais n'a jamais annoncé officiellement sa retraite. "La grande tournée d'adieu à la con, ça ne m'intéressait pas, confie-t-il au New York Times (en anglais). Quand j'y repense, j'aurais pu me faire une petite fortune avec ça. Mais j'ai distrait le public en jouant du bon tennis pendant des années. Si les gens se souviennent de moi pour ça, ça me va."

Éviter de faire un come-back ridicule, comme Björn Borg

Björn Borg lors de son retour à la compétition, en 1991, au tournoi de Monte-Carlo (Monaco).  (VANESSA TIPPETT / GETTY IMAGES EUROPE)

Avant de donner son nom à une marque de sous-vêtements masculins, le Suédois Björn Borg a régné sur le tennis mondial entre 1974 et 1981, en conservant cinq ans de suite Wimbledon, puis quatre ans le trophée de Roland-Garros. Ne s'estimant plus qu'à 80% de ses capacités, il prend sa retraite au sommet de son art, en 1981. Il n'a que 25 ans. Dix ans plus tard, le revoilà sur le circuit, avec sa vieille raquette en bois et les services d'un gourou du shiatsu tout neuf. Fiasco total : la légende du tennis se fait balader à chaque match et on parle plus de ses divorces à répétition que de son jeu. "Être si parfait dans mon tennis, et en tant que personne d'une certaine façon, était quelque chose de difficile à vivre", se souvient-il, cité par le Guardian (en anglais). Pour son come-back, Borg explique candidement "avoir débarqué sur les tournois sans [s']être entraîné". "J'avais juste envie de jouer." Son image ne s'en remettra jamais.

Le démon de la perfection menace aussi Roger Federer, qui explique au New Yorker (en anglais) : "C'est l'histoire de ma vie : quand je perds, les gens sont choqués de me voir mal jouer, quand je gagne, c'est une chose normale. Mais parfois, ça ne se passe pas comme je veux."

S'arrêter pour voir grandir ses enfants... comme Roger Federer ?

"Tant que mon corps et mon esprit sont prêts à voyager, je suis heureux de faire ce que je fais. Je vais encore jouer un moment", a déclaré Roger Federer en octobre. Oui, mais quand ses jumelles vont aller à l'école et qu'elles ne pourront plus le suivre ? C'est l'avis de l'ancien joueur canadien Greg Ruzedski sur le site The Tennis Space (en anglais) : "Je ne vois pas trop Roger dire à ses enfants : 'Papa va jouer un tournoi aujourd'hui, il sera de retour dans trois semaines !'".

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