Masters 1000 Madrid : Après trois ans d'absence, que vaut Federer sur terre?
"Je dois dire que je ne suis pas très confiant au moment d'aborder la saison sur terre...Je ne sais même plus glisser !" La déclaration de Roger Federer à l'AFP à quelques jours du début du Masters de Madrid avait de quoi surprendre. Il y avait certainement un brin d'humour et de bluff dans le constat du Suisse. On n'oublie pas comment glisser quand on a cinq finales de Roland-Garros à son actif. Mais ces propos traduisent certainement l'appréhension de Federer en cette période.
La mise en route sera dure
Trois ans, c'est long. "Pour être honnête, je n'ai pas joué un match, pas même un coup, sur terre battue, l'an dernier" a-t-il avoué. Et en 2017, pendant que Rafael Nadal remportait Monte-Carlo, Barcelone, Madrid et son dixième Roland Garros? "Deux jours" d'entraînement. En 2016, il jouait cinq matches en compétition et déclarait forfait pour Roland-Garros, le début d'une longue période de disette sur ocre. Son dernier match en compétition officielle remonte donc au 12 mai 2016 quand Dominic Thiem l'expédiait en deux sets 7-6 6-4 lors du Masters 1000 de Rome. En trois ans, seulement quelques heures de pratique sur une surface si particulière et exigeante que la terre battue ? L'homme a beau détenir le palmarès le plus fourni de l'histoire de son sport, il n'est pas au-dessus des lois les plus élémentaires. Pour bien jouer, il faut de la pratique.
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Seulement 60% de victoires sur terre entre 2014 et 2016
Certes, on dit toujours qu’il a été le meilleur joueur de terre battue des années 2000 derrière Nadal. C’est vrai. Personne ne s’est approché si souvent que lui des standards de l'Espagnol pendant cette période, avant l’avènement de Novak Djokovic. Ses résultats sur les autres surfaces, stratosphériques, ont eu tendance à faire de l’ombre à ses performances terriennes. Oui, on l’a sous-estimé sur une surface sur laquelle, il le répète à l’envi, il a grandi. Mais le fait est que hormis l’année 2011 et sa sublime demi-finale face à Djokovic, la terre battue ne lui réussit plus vraiment. C’est simple, depuis 2010, il n'a dépassé les quarts à Roland-Garros qu'à deux reprises. Loin, par exemple, des performances d’un Novak Djokovic (six fois depuis 2010), d’un Rafael Nadal évidemment, et même d’un Stan Wawrinka (3) ou d’un Dominic Thiem (3).
Entre 2014 et 2016, soit ses trois dernières saisons actives sur terre battue, il a participé à dix tournois. Son bilan ? 60% de victoires, contre 87% pour Novak Djokovic, 80% pour Rafael Nadal, ou même 68% pour Dominic Thiem et Stan Wawrinka. Roger Federer s’est banalisé sur terre, bien plus qu’ailleurs. C’est logique. Son jeu offensif s’y exprime moins bien, et son physique, bien qu’exceptionnel pour son âge, lorgne de plus en plus sur l’explosivité et le panache que sur l’endurance et la résistance. Or, pour l’emporter à Roland, il faut savoir tenir les échanges, et ce pendant des matches de cinq sets maximum et plus de trois heures.
Une brèche inédite cette année ?
Il n'empêche, comme il le dit lui-même souvent, s'il vient, ce n'est pas pour faire de la figuration. Quand on a un tel palmarès, on se doit de le faire respecter, quelle que soit la surface. "Roger a toujours très faim, a confié Ivan Ljubicic à nos confrères de Sky Sports Italia. Et il s'est habitué au jeu sur terre plutôt rapidement." S'il avait annoncé sa participation à Roland-Garros en amont, le Suisse a dû trouver une motivation supplémentaire dans les semaines qui ont suivi. A Monte-Carlo puis à Barcelone, Novak Djokovic et Rafael Nadal ont montré qu'ils n'étaient pas encore prêts. L'Espagnol semble toujours traîner les séquelles mentales de sa dernière blessure. Djokovic, lui, n'apparaît pas aussi investi qu'il a pu l'être la saison passée. Et leurs résultats s'en ressentent.
De quoi laisser une ouverture pour Federer ? Rien n'est moins sûr. Dominic Thiem, le troisième homme sur terre ces dernières années, a le couteau entre les dents cette année (titré à Indian Wells - face à Federer - et Barcelone). D'autres jeunes joueurs peuvent réaliser des coups d'éclat, comme le Russe Daniil Medvedev (demi-finale à Monte-Carlo, finale à Barcelone). Le titre à Roland, impensable il y a quelques mois, demeure a priori hors d'atteinte. Mais Federer reste Federer. Le Suisse, d'ordinaire plutôt discret sur les réseaux sociaux, s'est beaucoup montré ces dernières semaines à l'entraînement. La terre battue toujours bien en évidence, comme un enfant heureux d'exhiber au monde son dernier cadeau trouvé sous le sapin.
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Selon le site Tennisactu, il a enchaîné les blocs d'entraînements sur terre avec le jeune Miomir Kecmanovic et Dan Evans dans les semaines qui ont précédé son arrivée à Madrid. Le tournoi espagnol est l'endroit idéal pour une reprise en douceur, puisque l'altitude convient mieux à son tennis d'attaque, et qu'il y a eu ses meilleurs résultats sur terre ces dernières années (titres en 2009 et 2012, finale en 2010). Au classement, il n'a aucun point à défendre. Il s'est constitué une bonne réserve de confiance et de points ATP après un début de saison canon (deux titres à Dubaï et à Miami, finale à Indian Wells). Il arrive à Madrid l'esprit léger, alors que, peut-être pour la première fois de sa carrière, personne ne l'attend vraiment jouer les tout premiers rôles. Comme si chacun voulait juste profiter de le revoir frapper la balle sur terre, alors qu'il y a encore six mois on pensait ne jamais l'y revoir. Y a-t-il meilleure occasion d'écrire une nouvelle page de sa légende ?
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