Six nations 2024 : Antoine Dupont, Damian Penaud, Grégory Alldritt… Ces cadres qui se sont révélés grâce aux doublons pendant le Tournoi

Pendant le Tournoi des six nations, beaucoup de clubs sont obligés de faire appel à leurs jeunes en Top 14 pour compenser l'absence des internationaux. Des décisions qui ont parfois amené à la découverte de talents plus ou moins insoupçonnés.
Article rédigé par Clément Garioud
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7 min
Le demi de mêlée du XV de France Antoine Dupont et son coéquipier Grégory Alldritt lors de la victoire des Bleus contre l'Australie, le 27 août 2023. (JEAN CATUFFE / AFP)

Chaque année, c’est une période que redoutent les staffs et les présidents des plus grands clubs de France : les doublons. Ces journées de championnat placées en même temps que des fenêtres internationales, où les meilleures équipes doivent composer sans leurs internationaux. Didier Lacroix, président du Stade toulousain, expliquait dans les colonnes de L’Equipe que "dans ce Top 14 très serré, très compétitif, aucun club ne lâche les matchs en période de doublons. Le côté positif, c’est de devoir lancer de jeunes joueurs dans le grand bain".

Des jeunes qui saisissent crânement leur chance, on en voit tous les ans, à la manière de Guillaume Cramont qui a brillé en février lors des absences de Peato Mauvaka et Julien Marchand à Toulouse. "En période de Tournoi, beaucoup de jeunes rejoignent le groupe, ça permet d'amener un cycle où ces jeunes doivent montrer qu'ils ont les qualités du haut niveau", explique l'arrière de Bordeaux-Bègles Nans Ducuing.

Et parfois, il arrive qu’au milieu d’une foule de nouveaux, une étoile apparaisse. Celle qui brille plus fort que les autres, et qui n’attendait que cette opportunité pour se montrer. Retour sur les ascensions hivernales fulgurantes de certains cadres des Bleus.

2015 : Antoine Dupont, l’enfant prodige

Nous sommes en 2015, et le XV de France traverse les heures les plus sombres de son histoire moderne. Défaits deux fois par l'Italie lors des trois dernières années, les hommes de Philippe Saint-André n'arrivent pas à trouver de la continuité, principalement au niveau de la charnière, qui est en constant changement. Dernier arrivé en date, Rory Kockott est propulsé titulaire à la mêlée des Bleus, ce qui laisse un grand vide à Castres, le finaliste en titre du Top 14.

En effet, les seules assurances au poste sont l'expérimenté Cédric Garcia, récemment arrivé au club après cinq saisons du côté de Bayonne, et le jeune Antoine Dupont, qui n'avait eu en tout et pour tout que 27 minutes de jeu en professionnel. Pas un problème pour l'explosif numéro 9 formé à Auch. "Avec nous, il a rapidement montré ses atouts : puissance physique, vitesse et lecture du jeu. Il était mature pour son âge, il prenait le jeu à son compte", expliquait Mathieu Bonello à Ouest-France en 2022.

S'il est d'abord testé en Coupe d'Europe, Antoine Dupont fait vite ses premiers pas en Top 14, à seulement 17 ans, et franchit les paliers grâce à son travail, dans l'ombre de Cédric Garcia et Rory Kockott. "A Castres, il n’est pas arrivé avec l’étiquette de star, mais de jeune espoir. Il était respectueux de ses coéquipiers et n’avait pas un mot plus haut que l’autre. Il ne cherchait pas la lumière et est resté très humble", poursuit l'ancien talonneur du Castres olympique.

Antoine Dupont lors de la victoire du Castres Olympique contre Pau, le 30 avril 2016. (REMY GABALDA / AFP)

Si les résultats du CO sont inhabituels pour une équipe de sa stature (12e de Top 14 et maintenu à deux journées de la fin), Antoine Dupont a néanmoins frappé un grand coup dans les esprits. Le premier d'une longue série dans sa carrière.

2017 : Damian Penaud, l’héritier au parcours chaotique

Lyon, puis Brive, puis finalement Clermont. Le parcours de Damian Penaud à travers les centres de formation n'a pas été parsemé de pétales de roses. Après des débuts difficiles dans le monde de l'Ovalie, le deuxième meilleur marqueur de l'histoire des Bleus atterrit à Clermont, où il termine sa formation. Son ancien éducateur à Brive, Thierry Maurin, expliquait pour Le Quotidien du sport "qu’il avait quelque chose en plus. On avait récupéré un gamin très tonique, avide de progresser. C’est un garçon qui était vivant, très agréable, il aimait mettre l’ambiance et avait du mal à rester en place."

S'il a pu montrer des bribes de son talent lors de la première période de doublons, au mois de novembre 2016, c'est à l'hiver 2017 que Damian Penaud fait exploser le Top 14. Profitant des départs avec le XV de France de Rémi Lamerat et Wesley Fofana, puis de la lourde blessure au pied de ce dernier, il fait éclater tous les rideaux défensifs du championnat par sa vitesse et son sens du jeu. "Il a souvent le geste juste. Quand il franchit, il ne fait pas le geste de trop, il regarde toujours s’il peut faire vivre le ballon et il est très collectif", développe Thierry Maurin. Le fils de l'ancien ouvreur international Alain Penaud devient en quelques rencontres un indiscutable titulaire au centre aux côtés d'Aurélien Rougerie, de seize ans son aîné.

Le jeune Damian Penaud, titulaire au centre lors de la victoire de l'ASM Clermont contre Bayonne, le 18 février 2017. (THIERRY ZOCCOLAN / AFP)

Il termine la saison avec neuf essais inscrits toutes compétitions confondues et porte l'ASM vers une deuxième place de la saison régulière, avant d'aller décrocher le titre de champion de France, le premier depuis 2010. Des performances assez remarquables qui lui ouvrent les portes du XV de France pour une tournée en Afrique du Sud, où il marquera dès sa première cape. 

2018 : Grégory Alldritt, l’inattendu

A un an de la Coupe du monde 2019 au Japon, une tête fait son apparition au centre d'entraînement de La Rochelle : Grégory Alldritt. "Lui et Pierre [Bourgarit] arrivaient d'Auch, donc formés en dehors du monde professionnel, on ne les attendait pas tellement dès leurs débuts, commente l'ancien troisième ligne Kevin Gourdon auprès de franceinfo: sport. Ils ont profité du système de Jiff [Joueurs issus de la formation française] pour se lancer." L'ancien troisième ligne rochelais a pu constater de près l'explosion de son jeune coéquipier, puisque c'est sa participation au Tournoi 2018 qui a donné l'opportunité à Alldritt d'apparaître sur le devant de la scène.

Rapidement, Grégory Alldritt fait comprendre par son intensité et son talent qu'il n'est pas un jeune espoir parmi tant d'autres, et qu'il a des qualités sans commune mesure à son poste. D'abord lancé comme troisième ligne aile, il apportait son explosivité en sortie du banc, dans une fin de saison difficile pour les Rochelais qui ont échoué aux portes des barrages en Top 14. "Il avait un leadership réel, il voulait toujours bien faire et mettre l'équipe entière dans l'avancée, explique l'ancien troisième ligne international, il demandait tous les ballons, il était toujours au soutien. S'il avait pu se démultiplier, il l'aurait fait."

Le troisième ligne rochelais Grégory Alldritt lors de la rencontre entre La Rochelle et Lyon, le 17 mars 2018. (XAVIER LEOTY / AFP)

Un an et 25 matchs seulement après ses débuts en professionnel, il revêt le maillot des Bleus en ouverture du Tournoi 2019 et participe aux cinq rencontres, comme un symbole de son ascension fulgurante. "Ça fait un peu vieux con de dire ça, mais il est arrivé avec une génération qui était plus professionnelle dans son attitude que nous au même âge. C'est ce qui a permis cette progression vraiment rapide", développe Kevin Gourdon. Du petit gars d'Auch arrivé sur la grande scène au capitaine du XV de France six ans plus tard, Grégory Alldritt a passé les étapes à la vitesse grand V.

2022 : Louis Bielle-Biarrey, le phénomène

Federico Mori, international italien, laisse une place vacante dans la ligne arrière bordelaise lors du Tournoi 2022. Il n'en fallait pas beaucoup plus à Louis Bielle-Biarrey pour exploser. "Dès les premiers entraînements, on a vite compris qu'on avait affaire à un phénomène, il avait déjà les aptitudes physiques et techniques pour le très haut niveau", décrit l'arrière de l'UBB Nans Ducuing à franceinfo: sport. Laissé à disposition de l'équipe espoirs en début de saison, "il pouvait mettre quatre ou cinq essais en un match, et tout le monde comprenait que le garçon était une bombe à retardement".

Malgré les résultats collectifs en demi-teinte de l'UBB, Louis Bielle-Biarrey s'illustre en participant à toutes les rencontres du club en championnat. "Il fait l'unanimité dans le vestiaire très vite, il joue sur cette insouciance, que ce soit sur ou en dehors du terrain, et c'est ce qui le rend si apprécié dans le groupe, comme par les supporters", constate l'ancien arrière du XV de France. Des prestations qui lui ont permis de découvrir le groupe France, puis de participer au Mondial 2023 à domicile.

L'ailier de l'Union Bordeaux-Bègles Louis Bielle-Biarrey lors de la rencontre entre Bordeaux et Toulon, le 30 octobre 2022. (ROMAIN PERROCHEAU / AFP)

Cette année, plusieurs jeunes joueurs comme Maël Moustin (20 ans, Bordeaux-Bègles), Karl Sorin (20 ans, La Rochelle) ou Ugo Vignolles (21 ans, Lyon) ont eu l'opportunité de briller et de découvrir le monde professionnel. Qui sera le prochain à saisir sa chance ?

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