Six nations 2023 : Capuozzo, la nouvelle gueule d'Ange du rugby italien
Quand La Marseillaise retentira dans le Stade olympique de Rome, dimanche 5 février, le cœur d'Ange Capuozzo risque de se serrer. Paré de son maillot ciel de la Squadra Azzurra, l'arrière de 23 ans, natif de Grenoble, sera transpercé par des émotions fortes avant d'affronter l'équipe de France pour la première fois de sa carrière, lors de la première journée du Tournoi des six nations.
La suite logique d'une année 2022 traversée en fanfare par cette bouille d'ange aux cheveux bruns, née d'un père originaire de Naples et d'une mère franco-malgache : première sélection nationale avec l'Italie, première titularisation, signature au Stade toulousain avant d'être nommé révélation de l'année par World Rugby.
Une relance folle en guise d'acte de naissance
Inconnu du grand public, Ange Capuozzo est entré sur le devant de la scène le 19 mars 2022. Au Principality Stadium de Cardiff, le Transalpin est l'auteur d'une relance folle, qui permet à Edoardo Padovani d'aplatir et à l'Italie de mettre fin à une série de 36 défaites consécutives dans le Tournoi. "C'est allé très vite et je dirais que c'est un coup d'adrénaline fou !, rejouait-il dans les colonnes de L'Equipe. C'est le moment le plus important de ma carrière."
Il avait déjà marqué les esprits une semaine plus tôt en Ecosse (défaite 33-22), avec deux essais inscrits après être entré en jeu peu après la mi-temps pour sa première sélection. "Il a redonné confiance à tout le monde, ce sont les prémices de la victoire au pays de Galles, se souvient son ami Vincent Clerc, avec qui il partage un parcours commun autour de Grenoble. Marquer un doublé pour sa première sélection, c'est extraordinaire."
S'il était "tellement content qu'un gamin de Pont-de-Claix" explose aux yeux du monde, Pierre Eymeri, son premier entraîneur, a reconnu les qualités d'Ange Capuozzo, décelées dès son premier coup d'œil. "C'était un enfant virevoltant qui jouait dans les espaces libres. Il puait le rugby", se souvient celui qui l'a vu faire ses premiers pas rugbystiques avec l'équipe des moins de sept ans à l'US 2 Ponts, le club de sa commune.
A 11 ans, il file dans le grand club isérois, le FC Grenoble, pour franchir un palier avant d'intégrer le centre de formation et progressivement l'équipe première, entraînée alors par Stéphane Glas. "Quand je l'ai vu la première fois, je me suis dit : 'Il va se faire mal, il est tout mince', rigole ce dernier. C'est un très, très petit gabarit mais il n'est pas fébrile au contact, il arrive toujours à se sortir des plaquages."
Après ses débuts professionnels en 2019, à Pau, alors que le FCG lutte pour se maintenir en Top 14, le destin d'Ange Capuozzo bascule lors de la préparation estivale. Troisième demi de mêlée dans la hiérarchie, le Grenoblois joue quelques minutes à l'arrière en amical. "On le met en 15 pour le récompenser, il ne s'était même pas entraîné à ce poste, raconte Stéphane Glas. Sur la demi-heure, il se révèle. Je me dis que ce gamin a du talent, qu'il sent le rugby."
Meilleur marqueur de Pro D2 à 22 ans
Au lendemain d'une saison interrompue par le Covid, il finit meilleur marqueur du championnat (10 essais en 21 matchs) à seulement 22 ans. "Je suis beaucoup le FCG et en regardant les résumés de match, j'ai commencé à voir ses essais, ses fulgurances hebdomadaires", se rappelle Vincent Clerc, également né et formé à Grenoble, qui a inspiré le Franco-Italien lorsqu'il était plus jeune.
Si sa carrière a basculé grâce à la Nazionale, l'histoire avec l'équipe d'Italie s'est enclenchée par un coup d'audace, autant que par "son amour de l'Italie" (Pierre Eymeri), même s'il ne parle pas encore couramment la langue de Dante. Après un match amical entre Grenoble et les moins de 20 ans italiens, Ange Capuozzo se présente au staff transalpin pour leur apprendre qu'il est sélectionnable. Sa témérité est récompensée puisque, dans la foulée, il joue le Mondial U20 en 2019, treize ans après avoir paradé avec le maillot de football de l'Italie sur les quais de l'Isère, lors de la victoire en finale du Mondial... contre la France.
Symbole du renouveau du rugby italien
Cette saison, le "gringalet" (1,77 m, 82 kg) a découvert un autre monde : le Stade toulousain, ses 21 Boucliers de Brennus et ses 5 coupes d'Europe. "Pour la première fois, j’ai dû sortir de mon confort et déménager de la ville dans laquelle je suis né", expliquait-il en conférence de presse, le 22 septembre.
La concurrence à son poste des internationaux français Thomas Ramos et Melvyn Jaminet l'a obligé à jouer le plus souvent à l'aile. "Sa première partie de saison a été un peu gâchée par sa blessure au poignet, mais il a su saisir les chances qu’on lui a données", analyse le consultant de France Télévisions, Vincent Clerc, à l'image de son essai dès sa première titularisation à Ernest-Wallon.
Dimanche, face au XV de France et ses nombreux coéquipiers toulousains, Ange Capuozzo se présentera avec une équipe italienne prometteuse, tombeuse de l'Australie (28-27) en novembre pour la première fois de son histoire.
"Il est porteur d'une magnifique génération avec de jeunes joueurs, il a un bon état d'esprit et une bonne gueule qui peuvent redorer l'image de l'Italie."
Vincent Clercà franceinfo: sport
"C'est un match que j'ai coché parce que c'est une date spéciale pour moi, a glissé avec malice l'arrière italien en conférence de presse, dimanche dernier. C'est tous mes copains, mais j'espère qu'on va leur tendre un beau piège." Le XV de France est prévenu. Il devra se méfier d'Ange Capuozzo en espérant qu'il ne se transforme pas en démon.
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