6 Nations : France - Angleterre, match vital pour le futur
"L'Angleterre contre la France, ce sont toujours de gros matches. Cela s'appelle le Crunch, et il y a des raisons pour cela. Il existe de grandes histoires de rivalité entre les deux formations." Eddie Jones, le sélectionneur de l'Angleterre, sait les défis qui attendent son équipe dimanche au Stade de France. Dans l'histoire, ce match a régulièrement été le théâtre de mouvements somptueux, de coups bas, de chocs rugueux, d'intox (à découvrir dans le long format "Crunch, une guerre de plus de 100 ans"). Il sait aussi que le résultat de cet affrontement peut le placer sur une voie idéale.
L'Angleterre, un blason à redorer
En effet, le titre de vice-champion du monde ramené du Japon en novembre dernier et qui aurait fait les beaux jours des Bleus, a eu des conséquences négatives outre-Manche. Outre la claque face aux Sud-Africains après avoir fait tomber les double champions du monde néo-zélandais, il y a eu aussi le comportement de certains joueurs qui ont refusé de porter à leur cou la médaille offerte. Cette semaine, les Anglais ont souvent été questionnés au sujet de cette compétition, Owen Farrell devant balayer cela d'un "La Coupe du monde, c'est fini." Retrouver une dynamique positive dès l'entame du Tournoi, se placer sur une trajectoire d'une troisième victoire sur les cinq dernières éditions, est forcément l'objectif d'un groupe composé par 22 "mondialistes" sur les 34 retenus. Sans oublier que l'affaire des Saracens (le club qui emploie bon nombre d'internationaux a été reconnu coupable d'avoir dépassé volontairement le salary cap et a donc été rétrogradé en 2e division à l'issue de la saison) a terni l'image du rugby anglais.
En plus de tout cela, Eddie Jones se souvient sans nul doute des titres de la presse anglaise au lendemain de la dernière défaite de son équipe à Paris, en 2018 (22-16) : "écrasés", "émasculés", "désastre". Pour éviter de revivre pareille expérience, l'Australien a donc fait confiance à un groupe puissant et rugueux dans les contacts - à l'image du centre Manu Tuilagui (110kg), de Courtney Lawes dont les 2m et 115kg ont été décalés de la 2e ligne à la 3e ligne - mais également très expérimenté, qui culmine à une moyenne de 45 sélections par joueur (contre moins de 14 à la France). Le tout avec deux maîtres à jouer (l'ouvreur George Ford et le centre et buteur Owen Farrell) dont l'un des rôles sera de mettre une grosse pression au pied par du jeu de déplacement ou des chandelles piégeuses, surtout avec un ballon rendu glissant par la pluie.
C'est pour toutes ces raisons que l'expérimenté coach du XV de la Rose a fait monter la pression cette semaine autour du manque d'expérience de l'équipe française, et autour d'une violence physique que son collectif va imposer dans cette rencontre.
La France, une confiance à construire
Si certains n'ont plus suivi le rugby depuis sa place de finaliste de la Coupe du monde 2011, l'équipe de France possède une statistique qui parle d'elle-même : hors année de Coupe du monde, elle n'a fini la saison avec une balance victoires/défaites positive qu'une seule fois, en 2012. Une pelletée de joueurs tricolores a donc plus perdu que gagné en Bleu. C'est contre cette spirale négative que le nouvel encadrement se bat, en redonnant au jeu tricolore ce qui faisait son sel, sa force : de la vitesse, des initiatives.
Le groupe de Fabien Galthié a été construit pour faire face à ses enjeux. Des entraînements à haute intensité, des joueurs coureurs plus que lourds, la tactique est décidée, connue. Et si près de 60% des 42 joueurs appelés le 8 janvier avaient moins de cinq sélections au compteur (dont 18 néophytes), ce n'était pas un hasard. Pour connaître un nouveau souffle, pour se lancer sur de bonnes bases vers une Coupe du monde 2023 à domicile, la France a besoin de changer. En s'appuyant sur une jeunesse talentueuse, incarnée par les -20 ans, sacrés champions du monde en 2018 et 2019 et dont sont issus Romain Ntamack, Demba Bamba ou encore Louis Carbonel. La conséquence, c'est que les Bleus manquent cruellement d'expérience : un seul joueur à plus de 40 sélections (Gaël Fickou, 51), et une moyenne qui a chuté avec le forfait samedi de Damian Penaud, un cadre à 16 capes, pour tomber à 13.8 sélections par joueur.
Ces changements nécessitent des résultats rapides. Gagner à domicile, battre les vice-champions du monde en titre, c'est le cocktail parfait pour apporter du crédit à une stratégie, à une préparation, et de la confiance aux joueurs. "A l'heure actuelle, l'équipe de France est 7e donc évidemment on ne va pas clamer haut et fort que nous avons trouvé les ressources nécessaires pour les battre, mais il n'est pas interdit d'être ambitieux", a glissé Raphaël Ibanez, le manageur des Bleus, à la veille du match.
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