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Pro D2 : L'AS Béziers, une institution en plein divorce avec ses supporters

Alors que l’heure est au rachat du club par des investisseurs émiratis, l’ASBH fait face à un conflit en interne avec l’association de supporters Rugbiterre. Sous la menace d’une action en justice, l’association a décidé de cesser toutes ses activités. Une situation inédite.
Article rédigé par Jules Boscherini
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
 

Tout est parti de propos relayés sur les réseaux sociaux. Et l’association Rugbiterre, fidèle depuis 11 ans à l’ASBH, a décidé sa mise en sommeil. L’histoire semble surréaliste mais est pourtant bien réelle... Jeudi dernier,  l’association qui compte parmi les plus importantes du rugby français avec plus de 700 adhérents, recevait un mail de la direction du club, lui faisant savoir que "des poursuites seront faites concernant les 'attaques personnelles' dont sont victimes les dirigeants et les salariés de l’AS Béziers Hérault".

Pour cette association de supporters, le coup est violent. "Ce choix est rude pour nous après tant d’années d’investissement et très difficile à vous annoncer, tant vous, les adhérents, nous avez soutenu durant toutes ces années. Aujourd’hui, si nous prenons ce choix radical, c’est dans l’intérêt supérieur du club", explique l’association dans un communiqué.

"On en veut aux dirigeants qui nous ont asséné un coup de poignard dans le dos !"

Cette situation, Sébastien Arnault, président de l’association, ne l’explique pas. "Ça nous est tombé dessus ! Que son propre club aille jusque là, c’est impensable surtout d’une manière si soudaine et brutale. C’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase des mauvaises tensions que nous avions depuis quelques années. Notre réaction a été directe : le club se fout de nous, on arrête tout ! Nous avons donc décidé notre mise en sommeil pour deux raisons : la première c’est que nous avons voulu alerter tout le monde car il est inadmissible de se faire traiter de la sorte ! La deuxième c’est que nous nous sommes construis par nous-mêmes. Nous avons pu nous constituer une trésorerie et préférons éviter le terrain judiciaire. Il vaut mieux soutenir notre club qu’aller dépenser du pognon dans des procédures judiciaires que nos propres dirigeants auront mis en place contre nous." À titre d’exemple, l’association dépense jusqu’à 3000€ par saison pour permettre à ses adhérents et même aux non adhérents de bénéficier de prix lors des déplacements. Pas d’amortissement des frais, mais des pertes sciemment voulues pour permettre à tout le monde d'en profiter.

Ce qui a mis le feu aux poudres ce sont des commentaires injurieux à l’égard des dirigeants du club. Des propos attribués à l’association. "Nous n’avions pas voulu prendre parti quant au possible rachat par des Émiratis et une minorité nous l’a reproché. On a quand même relayé certains articles de presse et certains dirigeants se sont fait attaquer dans les commentaires. À notre échelle, il nous est difficile de modérer tous ces propos et nous avons tenté de régler cette problématique qui nous a été signalée. Malgré cela nous avons reçu un mail 48 heures après nous menaçant d’actions en justice", poursuit Sébastien Arnault. La mise en sommeil est donc apparue comme la solution la plus éclairée pour l’association qui souhaite voir un changement de direction, seule issue possible à un retour. "On n’en veut pas aux sportifs ni à notre club mais bien à ses dirigeants qui nous ont assénés un coup de poignard dans le dos ! Nous n’en sommes plus à vouloir l’apaisement, aujourd’hui nous ne reviendrons que lorsqu’il y aura un changement à la tête du club !"

Un changement de direction à venir...

Le club de Béziers n’a pas répondu à nos sollicitations. Le torchon continue donc de brûler entre les fans et son club. Une situation que Robert Ménard, maire de Béziers tente d’apaiser, malgré des difficultés liées au statut privé du club. "Je peux avoir mon mot à dire dans la mesure où la ville subventionne le club et l’accueil au stade Raoul-Barrière mais j’essaye d’entendre les uns et les autres et de faire en sorte que ça se calme." Une situation tendue qui ne date pas d’hier… Il y a bientôt un an, le maire de Béziers avait déjà rencontré les dirigeants de Rugbiterre qui avaient alors fait part de leur sentiment d’être délaissés et méprisés par l’ASBH. L'édile convient que les rapports n'ont depuis cessé de se détériorer. "C’est une situation que je déplore car un club ne peut pas se passer de ses supporters. Ce n’est pas possible ! En l’occurrence, cette histoire de propos injurieux n’est qu’un mauvais procès et Rugbiterre ne peut pas en être tenu pour responsable."

Malgré tout, le maire qui évoque des changements à la tête du club reste optimiste. "Je ne suis pas inquiet pour l’avenir des supporters... C’est un rapport de force qui s’est établi et j’ai demandé à Sébastien Arnault de ne pas déserter le club et de ne pas arrêter tout le travail formidable qu’ils font ! Il va y avoir des changements dans la gouvernance et la direction du club qui devraient faire que la situation s’apaise", conclue Robert Ménard.

La rupture entre les dirigeants actuels du club et ses supporters semble donc consommée. Mais pour le moment, les fameux tifos qui ont fait la renommée de Rugbiterre dans les gradins du stade Raoul Barrière sont rangés dans un placard, crise du coronavirus ou non. Cette situation est d'autant plus problématique qu'elle vient s’ajouter aux incertitudes liées à "l’affaire Dominici" et le possible rachat du club par des investisseurs extérieurs.

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