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Cruden-Parra, symboles de l'ouverture forcée

Pour la première fois en Coupe du monde, les ouvreurs titulaires des deux équipes ne seront pas sur le pré pour la finale. Du côté néo-zélandais, les blessures successives de Carter et Slade ont poussé Aaron Cruden au premier plan. Côté français, les performances peu satisfaisantes de Terinh-Duc et la blessure de Skrela ont déplacé Morgan Parra du N.9 à N.10. Invités surprises, les deux hommes jouent dans un registres par moments similaire.
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 3 min
Duel d'ouvreurs entre Aaron Cruden et Morgan Parra

Comment prendre les clés du camion lorsqu'on est invité de dernière minute ? Voilà bien le dilemme qu'ont dû régler Morgan Parra et Aaron Cruden pour trouver leur place et mener leur équipe en finale. Et ce n'était pas évident de prendre la succession de François Trinh-Duc, ouvreur titulaire depuis pratiquement trois ans et demi en équipe de France, et de Dan Carter, meilleur ouvreur du monde.

Certains joueurs talentueux n'ont jamais eu la chance ou ne l'ont jamais saisie lorsqu'elle s'est présentée. Les deux hommes l'ont fait, au moment le plus important dans une carrière: en pleine Coupe du monde. Au coeur d'un jeu balbutié par l'équipe de France, le Clermontois a apporté la lumière et des solutions d'abord comme remplaçant, puis comme titulaire. Juste après le traumatisme presque national lié au forfait sur blessure de Carter, le futur joueur des Waikato Chiefs a rassuré son monde en remplaçant Colin Slade contre les Argentins en quarts de finale, ce que le remplaçant attitré n'avait pas su faire. Avec leurs performances, ils ont "forcé la main" de leur sélectionneur, apportant comme une évidence à un problème qui semblait insoluble.

La simplicité au service du jeu

A respectivement 22 et 23 ans, Aaron Cruden et Morgan Parra auraient pu exploser en vol, face à la pression, face à un poste qu'ils n'avaient jamais vraiment occupé à ce niveau. Le premier ne comptait que 6 sélections avec les All Blacks, le second n'avait plus porté le N.10, son poste de formation, depuis avril 2009 avec Bourgoin. Il n'en a rien été. Ils se sont tous deux appliqués à faire jouer leurs coéquipiers, à apporter de la simplicité à la ligne d'attaque, sans jamais beaucoup utiliser leur jeu au pied. Pour éviter que la tension ne les fasse déjouer, ils ont d'ailleurs été soustraits du rôle de buteur, pris en main par leurs demi de mêlée respectifs, Dimitri Yachvili et Piri Weepu. En délaissant quelque peu l'occupation du terrain par un jeu au pied qui confine parfois au stéréotype chez certains, ils ont placé le jeu à la main au premier rang des ambitions collectives, faisant briller des trois-quarts qui n'en demandaient pas tant. Sans oublier pour autant de tenter quelques échappées au coeur de la défense, lorsque celle-ci anticipe un peu trop sur les extérieurs. Un signe d'intelligence et de confiance.

Psychologiquement, ils ont aussi indirectement resserré les hommes qui les entourent, et notamment leur troisième ligne. Comme souvent les expérimentés et les "gros" ont fait corps pour les placer dans les meilleures conditions, et éviter que les 3e lignes adverses ne viennent les déstabiliser avec une pression irrespirable. Déjà impressionnant, le trio Kaino-McCaw-Read a haussé un peu plus son niveau, comme lors de la demi-finale contres les Wallabies, alors que l'expérimentée alliance Dusautoir-Bonnaire-Harinordoquy a retrouvé le plus haut niveau tant dans l'investissement défensif qu'offensif. En acceptant de livrer parfois leur corps en pâture aux offensives adverses, Cruden et Parra ont attiré les louanges et surtout le respect de leurs coéquipiers, qui en font peut-être un peu plus qu'ils ne feraient avec un autre.

Avec Fox, Lynagh, Larkham, Wilkinson...

Spectateur avisé de cette montée en puissance, Dan Carter a distribué les bons points. A Morgan Parra, il reconnait qu'il "n'y a pas beaucoup de défauts dans son jeu. Il a beaucoup de sang-froid, il n'a pas souvent joué à ce poste mais il a été au niveau en phase finale, c'est un joueur fiable et constant. Il a apporté à l'équipe de France." A Aaron Cruden, qu'il conseille et encourage, il livre toute son admiration: "Il m'a vraiment impressionné. On dirait qu'il a été dans l'équipe durant toute la saison."

Dimanche, l'un d'eux rejoindra la cohorte de légendes du poste d'ouvreur, sacrés champions du monde: Grant Fox, Michael Lynagh, Joel Stransky, Stephen Larkham, Jonny Wilkinson et Butch James, ce dernier étant le seul avec son compatriote Stransky à avoir été éphémère dans le concert international des demi-d'ouverture. Morgan Parra et Aaron Cruden ont encore la jeunesse pour se construire un avenir de rêve avec le N.10 dans le dos.

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