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Portrait La lente réhabilitation de Mike Tyson, le boxeur "le plus méchant du monde" qui remonte sur le ring ce soir, à 54 ans

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 17 min
Les mille et une vies de Mike Tyson (visuel d'illustration). (JESSICA KOMGUEN / FRANCEINFO)

"Tout le monde a un plan, jusqu'à ce qu'il se prenne un pain dans la gueule." C'est l'une des devises de la légende de la boxe, qui s'apprête à remonter sur le ring à 54 ans, samedi soir. Et elle résume bien sa carrière chaotique.

Fin 1986, le tout jeune Mike Tyson s'apprête à disputer un combat pour le titre de champion du monde. Il est l'invité de l'émission "Nightlife"*, en compagnie du légendaire boxeur Jake LaMotta, incarné au cinéma six ans plus tôt par Robert De Niro dans Raging Bull de Martin Scorsese. Le présentateur prend à témoin le glorieux ancien, et lui demande s'il a un conseil à donner au jeunot : "Le meilleur conseil que je peux lui donner, c'est de rester concentré sur la boxe et d'éviter le grabuge. Il y a beaucoup de grabuge, là dehors. Malheureusement, les types comme lui et moi, on attire les ennuis." Bien vu.

"Iron Mike", qui remonte à 54 ans sur le ring samedi 28 novembre face à Roy Jones Jr., n'a pas assez écouté les sages paroles de son aîné. Il en a d'ailleurs tiré une de ses devises : "Tout le monde a un plan, jusqu'à ce qu'il se prenne un pain dans la gueule." Lui, ne s'en est pas pris qu'un seul. 

"Brut de décoffrage"

"Mike Tyson, c'est le produit caractéristique des années 1980 : l'immédiateté, la vulgarité, le côté clipesque, soupire Frédéric Roux, ancien boxeur devenu écrivain, qui lui a consacré un livre sobrement intitulé Mike Tyson (Grasset, 1999). Comme Mohammed Ali ou Joe Louis avant lui, le champion du monde des lourds, c'est quelqu'un qui porte les valeurs de l'époque. Tyson les a cristallisées jusque dans sa façon de boxer." Pendant les premières années de sa carrière, rares étaient les combats où l'adversaire tenait encore debout sur ses deux jambes après trois rounds. "Imaginez un cube de béton, un tour de cou de 54 centimètres, décrit le journaliste Jean-Philippe Lustyk, auteur du Grand livre de la boxe (Marabout, 2019), qui a presque assisté à tous les combats de Tyson entre 1986 et 2006. Pas de chaussettes. Pas de peignoir. Pas de musique d'entrée sur le ring. Brut de décoffrage."

"Il gagnait souvent le combat avant d'avoir asséné le premier coup de poing. Son adversaire changeait de couleur entre le vestiaire et le ring."

Jean-Philippe Lustyk, journaliste spécialisé

dans le "Grand livre de la boxe" (Marabout, 2019)

Souvent, ça marche. "Quand je bossais avec Mike, c'était moi qui me chargeait d'aller dans le vestiaire adverse au moment où on bandait les mains de l'autre boxeur avant de lui enfiler les gants, raconte Matt Baranski, membre de son équipe, dans le livre The Last Great Fight*. L'adversaire du soir s'appelle Michael Spinks. Sur le papier, les spécialistes pensent que son style peut contrarier Tyson, ce 27 juin 1988. Sur le papier seulement. "Je n'ai vu que de la terreur dans ses yeux." L'impression se confirme quand, une fois sur le ring, il enlève son peignoir. Pas une goutte de sueur, alors qu'en face Tyson a l'air de sortir de la douche. Spinks n'avait tout simplement pas pu s'échauffer. 

Mike Tyson, pris en photo avant un de ses combats en 1986, à New York (Etats-Unis). (BETTMANN / GETTY IMAGES)

Mais quand Tyson tombe sur un adversaire hermétique à sa guerre psychologique, les choses se gâtent. C'est ce qu'il s'est passé le 11 février 1990, à Tokyo. Personne ne voyait pourtant James "Buster" Douglas capable d'inquiéter le champion du monde des lourds. Pas même la propre mère de "Buster", qui l'appelle en pleine nuit, terrifiée par sa lecture d'une biographie de Tyson intitulée Fire and Fear (le feu et la peur). "Maman, ne t'inquiète pas, je le sens bien", la rassure le fiston. Avant le combat, "ses mains n'étaient pas moites au moment de les bander", se souvient un membre de son staff dans The Last Great Fight.

Chute sportive et chute libre

James Douglas, qui gagnera son surnom ce soir-là, résiste au premier round. Au second. Puis au troisième. Commence à croire en ses chances. Et au cinquième round, décoche un coup qui fait enfler l'œil de Tyson. Panique chez les deux nouveaux entraîneurs du champion : personne n'a pensé à prendre de la glace, une bourde gravissime à ce niveau. Les coaches improvisent avec un gant en latex rempli d'eau du robinet. Malgré cela, Tyson parvient à envoyer son adversaire au tapis. L'arbitre met 14 secondes à compter jusqu'à dix, et Douglas parvient à se relever. Au dixième round, c'est lui qui allonge Tyson. Pour de bon, cette fois. A quelques secondes près, la carrière de Mike Tyson vient de basculer.

Le boxeur américain James "Buster" Douglas envoie au tapis son adversaire Mike Tyson, lors du championnat du monde des lourds, organisé à Tokyo (Japon) le 11 février 1990. (TSUGUFUMI MATSUMOTO/AP/SIPA / SIPA)

De nombreux signaux auraient dû mettre en alerte son clan. Le boxeur, arrivé tôt au Japon, n'est pas sorti de son hôtel pendant un mois. La seule fois où il a mis le nez dehors, il s'est retrouvé face à 200 photographes qui voulaient immortaliser son jogging. Trop lourd sur la balance, il s'est contenté de boire du bouillon de légumes pour retrouver un poids de forme juste avant le combat. Son promoteur, Don King, n'a d'yeux que pour le combat d'après, contre Evander Holyfield.

Son mariage avec l'actrice Robin Givens s'autodétruit à vitesse grand V, la rapacité de sa promise et de sa mère n'étant pas pour rien dans ses problèmes conjugaux. Elles iront – selon les dires de Tyson relatés par Matt Baranski dans son livre – jusqu'à lui faire ingérer des tranquillisants avant une émission de télé (sur la chaîne nationale NBC) pour que Givens puisse l'accuser de tous les maux en face de lui, en mondovision, sans qu'il puisse vraiment se défendre. A son équipe historique a succédé un entourage surtout intéressé par les revenus qu'il peut tirer de la star. Donald Trump, qui organise beaucoup de combats dans son casino d'Atlantic City, n'est pas en reste : sa société facturera même 2 millions de dollars au boxeur pour des "conseils".

1990, année de la chute sportive, 1991 année de la chute tout court. Fin décembre, Tyson se voit accusé de viol par la jeune Desiree Washington. Elle, jeune femme pieuse du fin fond du Rhode Island venue à Indianapolis participer au concours de Miss Black America ; lui, membre du jury, qui n'aura de cesse de harceler candidates et personnel féminin du concours. Le procès se tient l'année suivante. Après avoir échoué à acheter le silence de la jeune fille contre un chèque à sept chiffres, et sur les conseils de Don King, qui a imposé son avocat d'affaires à Tyson plutôt qu'un pénaliste rompu à ce genre de dossiers, la défense joue la carte raciale. On vend des t-shirts représentant Tyson les yeux bandés avec écrit : "Est-ce que Mike a droit à un procès juste ?"

Le boxeur Mike Tyson fait étalage de sa fortune au Trump Plaza d'Atlantic City (Etats-Unis), le 21 juillet 1989 en marge d'un combat contre Carl Williams. (RON GALELLA, LTD. / RON GALELLA COLLECTION / GETTY IMAGES)

King et Tyson font aussi un don très médiatique de 17 000 dollars pour offrir une dinde aux nécessiteux noirs pour Thanksgiving. "Les conseillers de Tyson cherchaient à le dépeindre comme une victime, la victime d'un procureur blanc, d'une justice blanche et d'une 'chercheuse d'or' noire. Je sentais qu'ils cherchaient à en faire aussi le procès d'Indianapolis et du Midwest blanc", écrit dans son livre Heavy Justice le procureur Gregory Garrison. Cette stratégie se solde par un échec : Tyson est condamné à un minimum de trois ans de prison. Seule réaction du boxeur à l'annonce du jugement : défaire sa Rolex de son poignet et la confier à son avocat.

Taillé pour le rôle du méchant

"Iron Mike" se refera paradoxalement une santé derrière les barreaux. "Je ne sais pas si la prison était une bénédiction déguisée, je l’ai pris comme telle", dira-t-il au magazine musical The Source. Au programme : conversion à l'islam, footing et entraînements quotidiens, des célébrités au parloir et des livres, d'Alexandre Dumas à Voltaire en passant par Hemingway. Le boxeur fera envoyer 20 cartons à bananes bourrés de livres issus de la bibliothèque de la prison chez lui. "La veille de ma libération [le 27 mars 1995], je n'ai pas pu dormir, écrit Tyson dans son autobiographie La vérité et rien d'autre (Les Arènes, 2013). A quatre heures du matin, j'ai entendu les hélicoptères qui vrombissaient dans le ciel. C'était les stations de radio qui préparaient leur direct. En face, une foule immense s'était réunie dans un champ de maïs, en pleine nuit, dans l'espoir de m'apercevoir." 

C'est peu dire que le retour sur le ring du champion est attendu. Le choix de son promoteur se porte sur un de ces "journeymen", ces boxeurs qui remplissent le frigo en servant de chair à canon aux vedettes. Et parfois de chair à canon tout court. Peter McNeeley venait de boxer pour 200 dollars dans l'Arkansas quand il se présente face à un Mike Tyson en opération reconquête. Expédié en un round. Six mois plus tard, le champion du monde Frank Bruno n'en tiendra que deux de plus, terrassé par la peur. "Au lieu de son short, il aurait dû mettre des couches", commente son entraîneur. L'opération reconquête est finalement mise KO net par Evander Holyfield fin 1996. Une revanche est organisée l'année suivante. 

C'est ce soir du 28 juin 1997 que tout bascule, au troisième round, quand Tyson arrache un bout de l'oreille de son adversaire avec ses dents. L'arbitre le disqualifie, le ring est envahi, un mouvement de panique éclate. Bilan : 40 blessés et la réputation de Tyson en lambeaux, tout comme l'oreille d'Holyfield. "Il y avait de quoi péter les plombs, le défend Frédéric Roux, notre écrivain de la boxe dont le dernier ouvrage s'intitule Comptés debout. Les spécialistes auront remarqué qu'Holyfield avec son corps taillé aux stéroïdes n'arrêtait pas de lui donner des coups de boule en douce. Pas aussi voyants que ceux que Gérard Depardieu apprend à faire à Pierre Richard dans Les Compères, mais du travail de professionnel. Holyfield aurait dû être disqualifié." Qu'importe pour cette Amérique qui avait déjà du mal à pardonner celui qui n'a jamais eu un mot envers Desiree Washington. Le rôle du méchant lui collait à la peau. "D'autant qu'en face, Holyfield étalait sa foi et boxait avec un verset de la Bible inscrit sur son short."

"Je lui imaginais un destin tragique"

Tyson enchaînera ensuite les combats de trop, surtout pour apaiser ses créanciers. "Tout le monde disait qu'il était fini. Je peux vous assurer qu'il avait encore de beaux restes, nuance l'ancien boxeur danois Brian Nielsen, qui s'est reconverti dans le golf. Dans une salle de Copenhague pleine à craquer et chauffée à blanc pour l'enfant du pays, "Iron Mike" frappe le plomb dès la première reprise. Le début d'un calvaire pour Nielsen : "Il m'a collé une série de cinq ou six coups en pleine poire, je n'y voyais plus et j'ai dû renoncer au sixième round."

Vous aurez peut-être aussi la vue qui se trouble quand vous saurez que Tyson a dilapidé 400 millions de dollars lors de ses vingt ans de carrière, et ce ne sont pas les 8 000 dollars mensuels que lui coûtent ses tigres de compagnie qui expliquent à eux seuls ce chiffre. "Je suis à sec depuis 1998", reconnaîtra-t-il lors une audition judiciaire publiée dans le New York Times* en 2003. Ça se sentait déjà un peu quand Hacine Chérifi cherchait une salle pour s'entraîner, avant un combat pour le titre de champion du monde à Las Vegas, en 2001. "Il était propriétaire d'une des salles les plus pourries de Las Vegas, sourit le boxeur français. Je venais de visiter la salle de Sugar Ray Leonard [un des boxeurs les plus en vue des années 1980], tout était nickel, ça manquait même un peu d'âme, on aurait dit que personne ne boxait dedans. Et là, j'arrive dans celle de Tyson. On aurait dit qu'elle avait un siècle. On sentait la transpiration, les sacs ne brillaient pas... Le ring n'était pas sale, mais on sentait qu'il avait vécu." A l'image de son propriétaire, en quelque sorte.

Le triste épilogue se déroule à Washington, face à l'obscur Kevin McBride, qui combat pour 150 000 billets verts quand Tyson s'est vu promettre trente fois plus. Le mythe fonctionne encore. "La salle était pleine de gens qui venaient voir Tyson combattre, pas attirés par l'idée de sa retraite", se souvient Jean-Philippe Lustyk, témoin avec les 15 000 spectateurs, dont Mohammed Ali, d'un Tyson dans les cordes, assis par terre, incapable de se relever au 6e round. Rideau. McBride racontera après le combat : "Il a voulu m'arracher le téton, et s'il n'y avait pas eu son protège-dents, il y serait arrivé." Ce n'est pas le plus important. Tyson, 50 victoires (dont 44 avant la limite) en 58 combats, n'a plus de métier, plus de défi, plus d'avenir. Beaucoup pensent qu'il ne passera pas l'hiver. "Je lui imaginais un destin tragique, reconnaît Jean-Philippe Lustyk. Il a su me faire mentir."

L'ancien boxeur Mike Tyson embrasse un pigeon lors d'une visite à Walsall, en Angleterre, le 18 novembre 2005. (GETTY IMAGES EUROPE)

C'est sur ses deux jambes, mais un peu KO debout, que Tyson commence son après-carrière quelques mois plus tard. "Je me souviens d'un combat dans une salle de Las Vegas, en 2006, auquel Tyson avait assisté, raconte l'ex-champion du monde des super-coqs Mahyar Monshipour. Quand il est apparu sur l'écran géant, la foule n'a pas réagi, pas d'applaudissements, juste un murmure désapprobateur. L'Amérique n'avait pas encore pardonné. Il a assisté au combat dans le carré VIP, mais il est sorti de la salle dans les derniers, avec les loubards qui avaient payé les tickets les moins chers." Une métaphore, en accéléré, de sa carrière sportive. La veille, le boxeur français, qu'on surnommait en son temps "Little Tyson" – car Tyson avait un style qui rappelait beaucoup celui des poids légers – recevait le prix du combat de l'année de l'Association des journalistes américains. Tyson n'était pas convié. "Je me serais forcément rappelé de sa présence." 

Mike Tyson 2.0

Le ripolinage de la "marque" Tyson s'effectue par petites touches. "Pour moi, le documentaire Tysonde 2008, réalisé par James Toback, est la clé de sa réhabilitation, avance l'universitaire Kristen Fuhs, autrice d'un essai sur les documentaires consacrés à "Iron Mike"*. Le film a reçu un excellent accueil critique, a été présenté à Cannes et a été largement diffusé en salle aux Etats-Unis. Ça a beaucoup fait pour l'image de Tyson, qui est enfin apparu comme quelqu'un ayant réfléchi sur son passé et ses erreurs. C'est ce qu'attendent les amateurs de sport de leurs héros." Tyson dira du film : "C'est comme une tragédie grecque, sauf que c'est moi qui en suis le sujet." 

Ni une, ni deux, ses équipes s'emploient à capitaliser sur le courant de sympathie pour l'ex-"Baddest man on the planet" (l'un de ses surnoms de la grande époque). "Une vraie offensive multimédia, sourit Kristen Fuhs, avec des caméos comme dans Very Bad Trip [mais aussi quelques séries à succès], une télé-réalité 'Being Mike Tyson', un dessin animé ('Mike Tyson Mysteries') et son livre, La vérité et rien d'autre, qui a été adapté en one-man-show puis en documentaire. Tout ça a fini par le transformer en un personnage drôle, capable de se moquer de lui-même." Le tout en l'espace de cinq ans, et sous l'impulsion, dans l'ombre, de sa troisième épouse, l'influente Lahika Spencer, dite "Kiki". Il a beau glisser ici* et * qu'il a fait "bien pire" que ce qu'on connaît de sa biographie, on n'en saura pas plus : "J'aurais vraiment des problèmes." 

Oublié le boxeur violent, l'ex-taulard condamné pour viol, Mike Tyson est devenu une icône de la pop culture, en plus d'un cultivateur (légal) de cannabis et d'un fumeur de venin de crapaud*. Et il en joue : sur ses onze rôles au cinéma recensés à ce jour, il joue huit fois son personnage, soit plus qu'un David Hasselhoff, autre icône des années 1980 devenue un mème (phénomène internet). Dans la filmographie de Tyson, quelques ovnis comme le film vietnamien Những cô gái và găng tơ ou le long-métrage algérien Les Portes du soleil. Le passé de champion d'arts martiaux du réalisateur, Jean-Marc Minéo, a permis d'ouvrir quelques portes. "On s'est très vite très bien entendus, il a adoré le scénario. En trois semaines, c'était réglé. Mais comme souvent avec les acteurs américains, c'est facile humainement, et très compliqué administrativement", raconte le réalisateur.

Oubliez vos clichés sur les acteurs ou les boxeurs traînant derrière eux une armée mexicaine, "Iron Mike" voyage léger et débarque avec une demi-douzaine de personnes à Oran. Sa venue déclenche des mouvements de foule digne d'un chef d'Etat.

"Le premier soir, avec le décalage horaire, il n'arrivait pas à dormir. Il m'a demandé s'il pouvait rester travailler avec moi. Et après le boulot, on s'est promenés dans les rues d'Oran. A un moment, je me suis retourné : il y avait deux cents personnes qui nous suivaient, sans un bruit. J'y vois une grande marque de respect."

Jean-Marc Minéo, réalisateur

à franceinfo

Jean-Marc Minéo n'est pas au bout de ses peines. Il a fallu trouver à "Iron Mike" un colombophile pour qu'il puisse parler pigeons, une de ses grandes passions. "Et le vendredi, il a voulu prier à la mosquée de quartier", un bâtiment pas vraiment dimensionné face à l'engouement des locaux pour la star. "Il a fallu qu'on fasse intervenir les forces de l'ordre."

Un accueil digne d'un chef d'Etat

Les autorités algériennes mettent, elles aussi, les petits plats dans les grands. "Ils avaient déjà reçu ainsi Schwarzenegger dans un cadre officiel. Mais pour Tyson, c'était dans un cadre privé, décrit Zakaria Ramdane, le premier rôle et producteur du film, qui a mis en chantier la suite, avec une nouvelle star hollywoodienne. L'Etat algérien a mis les moyens. C'était comme une visite d'Etat. A Oran, on fermait des routes ou des quartiers pour nous. Quand on a ramené Mike à l'aéroport, il a eu accès au salon d'honneur, réservé au président ou aux ministres."

Mais sur un plateau, Mike Tyson est un acteur plutôt malléable. "Ça n'a rien à voir avec certaines vedettes qui interdisent que vous les regardiez dans les yeux !" Le texte est su à la perfection, les chorégraphies répétées au millimètre, et les figurants, des anciens boxeurs qui savent faire semblant d'encaisser. "J'ai juste dû lui demander d'aller moins vite, de rallonger ses crochets. Il les faisait comme s'il était sur un ring. C'était trop rapide pour la caméra", sourit Jean-Marc Minéo. En trois prises, le tour est joué. Tyson ajoutera un petit message vidéo, filmé avec son téléphone, diffusé en introduction du film, où il réaffirme tout le plaisir qu'il a eu à jouer dans le film : "Ça me rappelle Ali, quand il était venu en Afrique [pour le "combat du siècle" au Zaïre contre George Foreman]. Mike est quelqu'un qui vient de la rue. Il se retrouve dans ces pays qui connaissent une forte pauvreté. Je pense qu'il a voulu signifier son attachement à ses gens." 

Si le nom de Mike Tyson continue de parler autant aux jeunes générations, c'est donc désormais pour ses performances sur grand écran. L'intéressé en a fait l'expérience en se rendant dans un lycée, en 2016. "Il y avait peut-être mille gamins dans la salle. On leur projette sur grand écran des extraits de mes combats, car ils ne savaient pas qui j'étais, raconte Tyson à Sports Illustrated*. Ils pensaient juste que j'étais un acteur qui avait joué dans Very Bad Trip. Un petit Mexicain m'a dit : 'je crois que mon grand-père m'a parlé de vous'. Ça calme, hein ? " Le combat face à Roy Jones Jr., qui n'a que trois ans de moins que Tyson, va peut-être leur permettre d'appréhender sur le tard l'entièreté du personnage. Les plus anciens ont déjà mis leur réveil : "Quelques minutes avant le match Wilder-Fury [le 22 février dernier], plusieurs glorieux anciens ont été présentés au public de Las Vegas, raconte Jean-Philippe Lustyk. Lennox Lewis a été acclamé. Pour Evander Holyfield, les applaudissements ont retenti. Mais pour Mike Tyson, c'était encore une autre dimension." 

* Les liens marqués d'un astérisque renvoient vers des articles et vidéos en anglais.

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