"On peut être sportif et sédentaire", indique la médecin Martine Duclos
Moins d’un mois après le début du déconfinement en France, nous commençons à évaluer les premières conséquences de cette période sur nos vies et nos pratiques. De nombreuses études sur l’activité physique des Français sont actuellement menées et certaines ont déjà été publiées. Parmi elles, l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité (Onaps) a rendu publique une de ses études "Confinement, activité physique et sédentarité : de quoi parle-t-on ?".
Basée sur un questionnaire lancé dès le début du confinement et ayant reçu plus de 24 000 réponses, cette étude s’intéresse à la fois au niveau d’activité physique des Français, qui a diminué, mais aussi à la sédentarité, qui a elle augmenté de 60% pendant le confinement. "Ce qui est intéressant, relève Martine Duclos, cheffe du service de médecine du sport au CHU de Clermont-Ferrand et directrice de l’Onaps, c’est que l’activité physique a diminué surtout chez les adultes qui étaient les plus actifs avant le confinement. Autrement dit, chez ceux qui respectaient les recommandations d’activités physiques (environ 2h30 par semaine), 47% ont diminué leur pratique physique pendant le confinement et 14% l’ont augmentée. Et inversement, parmi ceux qui avaient une pratique inférieure aux recommandations avant le 17 mars, 71% l’ont augmentée et 25% l’ont diminuée."
Pour l’heure, il est encore trop tôt pour affirmer que la majorité des Français ont diminué leur activité physique pendant le confinement. De plus, cette étude est basée sur un questionnaire et non sur un sondage représentatif de la population française. "Ces résultats ont été envoyés par des volontaires qui étaient intéressés par l’activité physique. Ainsi, je pense que la réalité est probablement pire", s’inquiète Martine Duclos.
Des changements de comportements
Alors comment s’explique un tel changement de comportement ? En fait, explique Martine Duclos, les Français qui avaient l’habitude de pratiquer une activité physique n’étaient pas intéressés d’aller faire du sport dans le rayon d’1 km autorisé autour de chez eux pendant une heure maximum. Comme ils ne pouvaient pas pratiquer leur activité habituelle, ils ont été nombreux à arrêter le sport pendant le confinement.
A l’inverse, ceux qui pratiquaient peu d’activité physique se sont tournés vers les programmes gratuits proposés en masse sur internet et les réseaux sociaux. "Ils se sont mis à pratiquer une activité, qui leur était accessible et qui était réalisable à domicile. Voyant qu'ils avaient du temps pour le faire, ils ont pris cette habitude". Ce constat correspond d’ailleurs à l’engouement provoqué ces derniers mois pour la musculation, le fitness et les exercices d’assouplissement et de renforcement musculaire, au détriment des activités d’endurance comme le vélo ou la course à pied.
"Il ne faudrait pas passer plus de 6 ou 7 heures assis par jour"
Malgré cette bonne dynamique retrouvée, ou simplement découverte pour certain pendant le confinement, cela ne les protège toutefois pas des effets néfastes provoqués par la sédentarité. "Ce n’est pas parce qu’on fait une activité physique régulière qu’on est protégé de l’effet du temps passé assis sur la santé", alerte la présidente de l'Onaps. En effet, les recommandations édictées par les différents organismes de santé préconisent d’effectuer une activité physique régulière tout en ayant un temps passé assis limité et qu’il ne soit pas prolongé. "Il n’y a pas de temps limite mais on considère qu’il ne faudrait pas passer, en temps cumulé, plus de 6 ou 7 heures assis par jour", ajoute Martine Duclos.
Une recommandation pas toujours évidente à respecter avec le télétravail généralisé sur le territoire pendant la crise du covid, et encore largement utilisé aujourd’hui par les entreprises. Pour couper ce temps prolongé assis, Martine Duclos conseille donc de "se lever toutes les 30 minutes-1 heure, et bouger pendant une minute. Il ne s’agit pas d’avoir une activité intense pendant cette minute mais plutôt de déambuler, de bouger, de ranger un objet par exemple etc." Pour la médecin, il faut bien comprendre "qu’on peut être sportif et sédentaire".
La sédentarité augmente la mortalité précoce
Et l’enjeu est de taille. Car être trop sédentaire augmente la mortalité précoce, et ce même si l’on pratique une activité physique régulière. "La sédentarité augmente de deux fois plus le risque d'avoir des maladies cardiovasculaires, de deux fois plus d'avoir un diabète de type 2, de deux fois plus le risque d'avoir de l’obésité, et augmente aussi le risque d'avoir un cancer colon ou de l’utérus", indique Martine Duclos, cheffe du service de médecine du sport au CHU de Clermont-Ferrand.
Alors que le déconfinement se poursuit mais que le télétravail est toujours la règle pour une grande partie des Français, Martine Duclos espère que ceux ayant essayé le sport ces derniers mois garderont le même rythme. "Le télétravail et la limitation des sorties ont aussi fait prendre conscience aux Français qu’ils passaient trop de temps assis quotidiennement, affirme Martine Duclos. D’ailleurs, on le voit, les Français sortent et bougent les week-ends, ils sont actifs. Nous espérons que cette mobilité va se poursuivre."
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